lundi 30 janvier 2017

Les informations inexactes données oralement peuvent constituer des pratiques commerciales trompeuses

La Cour de cassation valide un arrêt de Cour d’appel ayant qualifié de pratiques commerciales trompeuses des informations inexactes données oralement par un annonceur à des clients professionnels et ayant altéré la décision commerciale de ces derniers.

Dans cette affaire (Cass. crim., 22 nov.2016), un professionnel exerçant l’activité de régie publicitaire avait démarché des artisans et commerçants auxquels il avait fait souscrire des contrats de vente d’encarts publicitaires dans des supports papiers devant bénéficier d’une large diffusion ou sur un site Internet à large audience, sans respecter les engagements pris oralement. L’annonceur avait par ailleurs déclaré faussement qu’il avait été mandaté par la mairie.

L’annonceur a été poursuivi pénalement pour pratiques commerciales trompeuses.

La Cour d’appel a confirmé le jugement de première instance qui avait déclaré le professionnel coupable de pratiques commerciales trompeuses au motif qu’il avait :

  • donné oralement des délais de livraisons à ses clients professionnels avant de leur faire souscrire des contrats ne mentionnant aucun délai de livraison et comportant des clauses exclusives de responsabilité dans l’hypothèse où la livraison ne serait pas assurée dans les meilleurs délais ;

  • laissé croire, pour emporter l’accord des clients, à une publicité qui bénéficierait d’une large distribution, alors qu’il n’a entrepris aucune démarche pour mener à bien l’exécution de ce contrat ;

  • plus généralement, avait développé oralement des argumentaires commerciaux et fait signer des documents de nature à induire les clients en erreur sur la portée, l’objet et les délais d’exécution des prestations promises.

Le professionnel forme un pourvoi devant la Cour de cassation. 

La Cour de cassation devait se prononcer sur le fait de savoir si la Cour d’appel avait correctement qualifié ces pratiques de pratiques commerciales trompeuses au sens de l’article L.121-1 du Code de la consommation (ancien)1.

Dans son pourvoi, l’annonceur développait principalement deux arguments, lesquels sont rejetés par la Cour de cassation.

1. D’une part, l’annonceur considérait que les allégations, indications ou présentations fausses de nature à induire en erreur portant sur la date de livraison d’un produit ou d’un service ne constituaient pas une pratique commerciale trompeuse, dès lors que la date de livraison ne figurait pas sur la liste des éléments sur lesquels portent les allégations trompeuses visées par l’article L.121-1 du Code de la consommation (ancien).

Pour rappel, en application de l’article L.121-1 I 2° du Code de la consommation (ancien), constituent des pratiques commerciales trompeuses les pratiques commerciales qui reposent « sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l'un ou plusieurs des éléments suivants : 

a) L'existence, la disponibilité ou la nature du bien ou du service ; 

b) Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, à savoir : ses qualités substantielles, sa composition, ses accessoires, son origine, sa quantité, son mode et sa date de fabrication, les conditions de son utilisation et son aptitude à l'usage, ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation, ainsi que les résultats et les principales caractéristiques des tests et contrôles effectués sur le bien ou le service ; 

c) Le prix ou le mode de calcul du prix, le caractère promotionnel du prix et les conditions de vente, de paiement et de livraison du bien ou du service ; 

d) Le service après-vente, la nécessité d'un service, d'une pièce détachée, d'un remplacement ou d'une réparation ; 

e) La portée des engagements de l'annonceur, la nature, le procédé ou le motif de la vente ou de la prestation de services ; 

f) L'identité, les qualités, les aptitudes et les droits du professionnel ; 

g) Le traitement des réclamations et les droits du consommateur ; […] » 

La Cour de cassation, rejetant cette position, valide l’interprétation de la Cour d’appel qui, pour qualifier les pratiques précitées de pratiques commerciales trompeuses, avait retenu que :

  • en laissant croire aux professionnels qu’ils bénéficieraient d’une large diffusion de leurs encarts publicitaires sur supports papiers et sur un site Internet à forte audience, alors qu’il n’avait commandé aucun support papier et que le site Internet ne bénéficiait pas du référencement annoncé, l’annonceur avait induit en erreur ses victimes sur la portée de ses engagements et l’objet du contrat, éléments listés à l’article L.121-1 I 2° précité ;
  • la date et l’effectivité de la livraison constituent une condition essentielle de l’engagement des clients professionnels qui avaient conclus les contrats sur la base des engagements de livraison rapide qu’avaient donné le professionnel à l’oral, alors que les contrats conclus permettaient en réalité à l’annonceur de différer comme bon lui semblait la date de livraison des encarts publicitaires.

2. Subsidiairement, et si la qualification de pratiques commerciales trompeuses était retenue, l’annonceur considérait qu’il s’agissait en réalité de pratiques commerciales trompeuses par omission, dont le champ d’application est limité aux pratiques à l’encontre des consommateurs, et donc non applicables en l’espèce dès lors que les victimes étaient des professionnels.

L’article L.121-1 II du Code de la consommation (ancien) dispose : « Une pratique commerciale est également trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l'entourent, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu'elle n'indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte. »

Cet argument est également rejeté par la Cour de cassation : les pratiques en cause ne consistaient pas en une simple omission mais en la fourniture d’informations inexactes et contradictoires, dans la mesure où les clauses contractuelles différaient des informations communiquées oralement par l’annonceur, et que les clauses contractuelles étaient ambiguës.

Selon la Cour de cassation, le délit de pratiques commerciales trompeuses a donc été correctement qualifié par la Cour d’appel qui a fait une juste application de l’article L.121-1 (ancien) du Code de la consommation.

La Haute juridiction ajoute que les stipulations contractuelles sont sans incidence dans la mesure où ce sont les allégations erronées délivrées oralement par l’annonceur qui ont déterminé la prise de décision commerciale des victimes.

Ce qu’il faut retenir de cette décision c’est que des informations orales inexactes peuvent altérer le comportement économique de la victime dans sa prise de décision commerciale et être ainsi qualifiées de pratiques commerciales trompeuses au sens du Code de la consommation.  Les professionnels doivent donc veiller à l’exactitude des propos tenus dans le cadre de la promotion de leurs produits ou services.

(1) Désormais les articles L.121-2 et suivants du Code de la consommation

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