mardi 4 octobre 2016

Requalification de contrats de gérance en contrat de travail

Des gérants de supérettes ont exercé leurs activités sous un lien de subordination juridique caractéristique d’un contrat de travail de droit commun : les différents contrats de gérance conclus ont été requalifiés en contrats de travail.

L’article L. 7322-2 du Code du travail défini les conditions permettant d’être qualifié de gérant non salarié de succursales de commerce de détail alimentaire. Il indique qu’est gérant non salarié « toute personne qui exploite, moyennant des remises proportionnelles au montant des ventes, les succursales (…) lorsque le contrat intervenu ne fixe pas les conditions de son travail et lui laisse toute latitude d’embaucher les salariés ou de se faire remplacer à ses frais et sous son entière responsabilité ».

En l’espèce, un couple de gérants s’est vu successivement confier par la société Casino, la gestion de quatre supérettes sur une période d’un an environ. L’objet des quatre contrats à durée déterminée était « d’assurer à titre tout à fait précaire, la gestion et l’exploitation » des magasins « pendant la période de congés annuels des co-gérants mandataires non-salariés titulaires ».

Le couple de co-gérants, contestant que la condition posée par l’article L.7322-2 du Code du travail et relative à leur liberté de fixer leurs conditions de travail, d’embaucher du personnel et de se faire remplacer était remplie, ont sollicité la requalification de leurs contrats de gérance en contrats de travail.

La Cour d’Appel a donc recherché si les conditions d’application du statut de gérant non salarié étaient remplies ou si au contraire les gérants étaient placés dans un lien de subordination juridique caractéristique d’un contrat de travail de droit commun.

Elle relève d’une part que la durée des remplacements ne leur permettait pas d’envisager leur propre remplacement ni l’embauche de salariés. Elle relève également que leur mission s’exécutait dans le cadre strict de l’organisation mise en place par les gérants remplacés, eux-mêmes soumis à des règles très strictes, ce qui démontrait l’absence totale de liberté dans la gestion.

La Cour relève, à partir des éléments de preuve et attestations fournies par les gérants : l’interdiction de modifier les horaires du magasin sous peine de sanctions, l’interdiction de modifier l’implantation des marchandises, la fixation des jours d’inventaire sans possibilité de changement, l’absence de contacts avec les gérants titulaires remplacés hors les inventaires de début et de fin et l’absence de consignes données par ces derniers, celles-ci étant données uniquement par Casino et le compte-rendu d’interim étant adressé à Casino. Enfin, les gérants remplaçants recevaient à chaque fin d’année, de la part de Casino le planning des remplacements à effectuer.

En conséquence, la Cour d’Appel prononce la requalification des contrats de gérance en contrats de travail à durée indéterminée dans la mesure où les conditions de recours aux contrats à durée déterminées de l’article L.1242-1 du Code du travail n’étaient pas remplies.

En conséquence, Casino a été condamné à verser aux deux co-gérants une indemnité de requalification, un reliquat de salaire et de congés payés au titre d’heures supplémentaires, une indemnité pour travail dissimulé, une indemnité de préavis, une indemnité de licenciement et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Les critères utilisés par la Cour d’Appel de Rouen sont classiques et trouvent à s’appliquer également pour des contrats de distribution, comme la franchise. En effet, la jurisprudence a pu retenir, parmi les indices permettant de caractériser l’existence d’un lien de subordination aboutissant à requalifier un contrat de distribution en contrat de travail :

•    la fixation des horaires du point de vente franchisé par le franchiseur ;
•    l'intervention du franchiseur pour l'embauche de salariés du franchisé et plus généralement l’exercice du pouvoir de direction des salariés ;
•    la définition des plannings.

Même si cette question est extrêmement casuistique puisque dépendant des conditions effectives de travail, on constate que certains critères sont souvent utilisés. Il conviendra d’être vigilant à cet égard. Cela sera particulièrement vrai au sein des réseaux comportant à la fois des succursales et des distributeurs indépendants, qui devront s’assurer que les relations avec chacun tiennent bien compte de leur statut juridique propre.

(CA Rouen, 13 sept. 2016, n°15/04349)

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