Impécuniosité d’une partie et clause compromissoire
vendredi 5 mai 2023

Impécuniosité d’une partie et clause compromissoire

L’impécuniosité d’une partie n’est pas susceptible de faire échec au principe de compétence-compétence en cas de clause compromissoire stipulée dans un contrat de franchise. 

Par un arrêt du 28 septembre 2022 (Cass. Civ. 1ère, 28 septembre 2022, n°21-21.738, Publié au Bulletin), la Cour de cassation a confirmé un arrêt d’appel ayant déclaré l’incompétence d’un Tribunal de commerce pour connaître d’un litige opposant un franchisé à son franchiseur au regard du principe de compétence-compétence. 

Un franchisé soutient être victime de pratiques anticoncurrentielles et restrictives de concurrence et assigne son franchiseur et son fournisseur devant le tribunal de commerce de Rennes.

 
Les sociétés assignées soulèvent l’incompétence des juridictions étatiques pour connaître du litige en invoquant l’existence de clauses compromissoires dans les contrats de franchise et d’approvisionnement. 

Devant la cour d’appel, le franchisé soutient qu’il existe une incompatibilité manifeste des clauses compromissoires avec son impécuniosité. 

En premier lieu, le franchisé considère que l’organisation mise en place par le franchiseur de son système contractuel empêche son accès au juge. En ce sens, le franchisé avance que la relation contractuelle qui le lie avec le franchiseur s’inscrit dans un ensemble indivisible et commun constitué par des statuts à objet social exclusif imposés aux franchisés, et par des contrats de franchise et d’approvisionnement qui empêcheraient les juridictions saisies d’appréhender les litiges dans leur intégralité, ces contrats contenant chacun (à l’exception des statuts) une clause d’arbitrage

Le franchisé avance également qu’il existe une atteinte de l’article 6§1 de la Convention européenne de Sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. Pour rappel, cet article consacre le droit à un procès équitable. Le franchisé soutient qu’une atteinte serait caractérisée du fait du coût de la procédure et de la situation financière des parties. Le franchisé argue que l’article 6§1 précité oblige à prendre en compte le coût que peut représenter pour une partie un procès civil, et ces dispositions sont applicables aux procédures d’arbitrage. Le coût moyen d’une procédure d’arbitrage avoisine, en effet, a minima la somme totale de 120.000 € par arbitrage, hors frais d’avocats.

La clause compromissoire en l’espèce, prévoyait un arbitrage avec 3 arbitres, le coût de la procédure est estimé pour des litiges de montant identique à celui engagé à 150.000 € par arbitrage. Le franchisé avance qu’il est dans l’incapacité la plus absolue de financer de tels frais, notamment au regard de la situation de sa trésorerie.

Malgré ces arguments, la Cour d’appel retient l’exception d’incompétence avancée par le franchiseur et juge que l’impécuniosité d’une partie n’est pas de nature à faire échec à l’application du principe de compétence-compétence. L’impécuniosité ne permet pas de caractériser l’inapplicabilité manifeste d’une clause compromissoire, et il revient, selon la cour d’appel, aux acteurs de l’arbitrage d’écarter tout risque de déni de justice face à un plaideur aux moyens financiers limités. 

La Cour d’appel déclare donc le tribunal de commerce de Rennes incompétent pour connaître du litige en cause, et renvoie le franchisé à mieux se pourvoir en application des clauses compromissoires stipulées dans les contrats de franchise et d’approvisionnement.  

Pour rappel, il résulte du principe de compétence-compétence découlant de l’article 1448 du Code de procédure civile que dans un litige relevant d’une convention d’arbitrage, le juge étatique ne peut être saisi sans que l’arbitre ait statué prioritairement sur sa propre compétence. 

Le franchisé se pourvoit donc en cassation en soutenant à nouveau, qu’au regard de l’article 6 de la CEDH l’état d’impécuniosité avéré d’une partie à un contrat contenant une clause compromissoire suffit à caractériser l’inapplicabilité de cette clause. 

Cet argument est rejeté par la Haute juridiction au visa de l’article 1448 du Code de procédure civile précité. La Cour de cassation juge en effet que l’invocation, par le franchisé, de son impécuniosité n’est pas en soi de nature à caractériser l’inapplicabilité manifeste des clauses compromissoires.

Au regard de cette décision, il est possible de s'interroger si a contrario en cas d'échec de la procédure arbitrale du fait de l'impécuniosité d'une partie, le juge étatique pourrait se déclarer compétent.

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