Contrefaçon de marque : quelle réparation du préjudice subi
La détermination des dommages et intérêts alloués en réparation du préjudice subi par la victime d’une contrefaçon de marque relève de l’appréciation souveraine des juges.
Il est souvent considéré que la contrefaçon de marque est nécessairement préjudiciable au titulaire de la marque contrefaite. Cela ne signifie toutefois pas qu’il est suffisant de faire la démonstration d’actes de contrefaçons pour obtenir des dommages et intérêts. Un arrêt de la Cour de cassation du 8 juin 2017 (n°15-21.357) vient parfaitement illustrer cette question.
En l’espèce, la société Cheval Blanc est titulaire de la marque semi-figurative Cheval Blanc depuis 1933, afin de désigner des vins. Elle assigne en 2008 une autre société pour annulation pour déceptivité de deux marques utilisant le terme Cheval Blanc ou reproduisant une tête de cheval, ainsi que pour contrefaçon du fait de l’usage du vocable « Cheval Blanc » dans la dénomination sociale de cette société. Nous n’aborderons ici que la question des dommages et intérêts liés à l’usage dans la dénomination sociale du vocable « Cheval Blanc », seul élément finalement retenu comme portant une atteinte à l’image de marque, à l’issue d’un long processus judiciaire ayant impliqué un précédent arrêt de cassation.
La société Cheval Blanc reprochait à l’arrêt d’appel d’avoir rejeté ses demandes d’expertises et de provisions, ainsi que ses demandes de publication et de dommages et intérêts. Elle soutenait que les actes de contrefaçon lui avaient nécessairement causé un préjudice.
La Cour de cassation rappelle tout d’abord que le préjudice doit être réparé dans son intégralité « sans perte ni profit pour aucune des parties ». Elle rappelle ensuite que l’appréciation des éléments de preuve soumis relève du « pouvoir souverain d’appréciation » de la Cour d’appel. Ce faisant, elle relève que dans le cadre de ce pouvoir, la Cour d’appel a considéré que la société Cheval Banc « ne justifiait d’aucun préjudice spécifique résultant de l’usage du vocable « Cheval Blanc » dans la dénomination sociale » de l’autre société. Elle ne prétendait pas que cet usage aurait permis l’enrichissement du contrefacteur. Enfin, elle ne démontrait pas que le caractère distinctif, la notoriété ou le prestige de sa marque « Cheval Blanc » aurait été affaiblis par l’usage fait par le contrefacteur. Elle a donc pu souverainement considérer que l’interdiction sous astreinte d’utiliser le terme Cheval Blanc dans la dénomination du contrefacteur était suffisante pour « assurer la réparation intégrale du préjudice résultant de la contrefaçon de marque subi par la société Cheval Blanc ».
Si la contrefaçon est considérée comme causant nécessairement un préjudice, encore faut-il donc être en mesure de démontrer l’étendue du préjudice allégué en fonction des demandes de réparation formulées.
Rappelons à cet égard que l’article L. 716-4 du Code de la propriété intellectuelle (modifié en 2014) aborde spécifiquement la question des dommages et intérêts en cas de contrefaçon. Il prévoit deux modes de calculs alternatifs des dommages et intérêts.
Le premier prévoit que la juridiction prend en considération :
– Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
– Le préjudice moral causé à cette dernière ;
– Les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissement intellectuels, matériels et promotionnels retirés de la contrefaçon.
Cet article pose une deuxième méthode, alternative, qui peut être sollicitée par la partie lésée. Il s’agit d’allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire, laquelle serait supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient du être payés si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Elle peut être complétée par une indemnisation du préjudice moral.
Cet article ne dispense toutefois pas de la nécessité de faire la démonstration du préjudice invoqué et des sommes réclamées à ce titre.
Cass. crim., 10 déc. 2013, n°13-81.572
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