Un avis sur Internet peut-il engager la responsabilité de son auteur ?

Certains avis négatifs postés en ligne peuvent révéler une réelle intention de nuire. Peut-on agir contre ces derniers ? 

Il est désormais usuel de pouvoir laisser des avis en ligne sur un magasin, un site de vente en ligne, un prestataire de service ou encore un restaurant. Très utiles pour les consommateurs, ainsi que pour développer la notoriété des enseignes, la publicité donnée à ces avis peut par contre présenter des risques pour les enseignes, s’ils s’avèrent négatifs. Quelles sont les possibilités pour une enseigne d’agir contre de tels avis ? 

Nous n’aborderons pas ici la question des avis qui relèveraient de la diffamation. Dans ce cas en effet, il est nécessaire de caractériser une atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne visée. La Cour de cassation rappelle d’ailleurs souvent, comme dans un arrêt de sa première chambre civile du 20 septembre 2012 (n°11-20.963), que « les appréciations, même excessives, touchant les produits, les services ou les prestations d’une entreprise industrielle et commerciale n’entrent pas dans les prévisions de l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881, dès lors qu’elles ne portent pas atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne physique ou morale qui l’exploite ».  

Hormis les cas de diffamation, les tribunaux rappellent que le commentaire critique de services ou de prestations publiées sur un site internet n’est pas en soi constitutif d’une faute.  

Ils peuvent toutefois le devenir dans certains cas, et être alors susceptibles d’engager la responsabilité civile délictuelle de leur auteur. C’est ce que confirme un arrêt de la Cour d’appel de Dijon du 20 mars 2018 (n°15/02004), qui après avoir rappelé des commentaires critiques ne sont pas fautifs en soi, ils le deviennent dès lors que (i) l’auteur n’a pas bénéficié des services ou prestations critiquées et (ii) que le commentaire concerné procède d’une véritable intention de nuire. 

Cet arrêt était relatif à un commentaire négatif posté sur le site des pages jaunes, et relatif à un restaurant. Il ressortait des faits que l’auteur des commentaires n’avait pas pu bénéficier des services du restaurant puisqu’il n’était pas ouvert au moment où il avait posté son commentaire pour la première fois. Il avait par ailleurs reconnu ne pas avoir mangé dans le restaurant concerné. L’intention de nuire était par ailleurs caractérisée par le fait qu’après le retrait du premier commentaire, l’auteur de celui-ci l’avait à nouveau publié, avant d’en publier un troisième, toujours sur le même site.  

La Cour d’appel considère que ces commentaires « peu flatteurs (…) étaient destinés à dissuader la clientèle potentielle de le fréquenter, et ils constituent un dénigrement manifeste de nature à engager la responsabilité civile délictuelle de leur auteur ». Elle a donc octroyé des dommages et intérêts compte tenu de l’atteinte certaine à l’image de la société exploitant le restaurant, laquelle intervenait par ailleurs au moment de l’ouverture du restaurant.  

Le caractère fautif d’un commentaire peut donc être difficile à apprécier, et encore plus à prouver. Toutefois il est possible d’agir contre des internautes qui cherchent manifestement à nuire à une enseigne. S’il s’avérait par ailleurs qu’il s’agissait de commentaires laissés par des concurrents, ceux-ci seraient constitutifs d’actes de concurrence déloyale. 

Cour d’appel de Dijon du 20 mars 2018 (n°15/02004)

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Le dénigrement se définit comme le discrédit dirigé contre un produit ou un service. C’est une forme de concurrence déloyale. Il se distingue de la diffamation qui exige que l’attaque, blessant l’honneur ou la considération, soit portée contre une personne physique ou morale.

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