Caractère proportionné et régime matrimonial de la caution.

Deux arrêts récents de la Cour de cassation permettent de confirmer le régime applicable selon la situation de la caution. 

L’article L. 332-1 du Code de la consommation (antérieurement article L. 341-4 du Code de la consommation), prévoit qu’un « créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation. ». 

Il est admis par la jurisprudence que la notion de créancier professionnel ne vise pas que les seuls banquiers et une enseigne qui fait souscrire un engagement de caution à ses distributeurs sera considérée comme un créancier professionnel. Cet article est donc applicables aux réseaux.  

L’appréciation du caractère proportionné ou non du cautionnement peut poser de nombreuses questions. En particulier comment cette appréciation doit-elle être fait en présence d’une personne physique mariée : doit-on prendre en compte la situation du couple ou uniquement celle de la personne qui souscrit l’engagement ? 

La réponse ne sera pas uniforme et il convient de connaitre le régime matrimonial de la personne qui se porte caution. 

L’arrêt du 26 mai est rendu dans une espèce où les époux étaient séparés de biens. L’un des époux contestait le caractère proportionné du cautionnement qu’il avait souscrit. La Cour d’appel avait considéré que le cautionnement n’était pas disproportionné dans la mesure où le conjoint de la caution disposait de revenus et de biens suffisamment importants pour « contribuer dans de larges proportions à la subsistance de la famille et d’assurer son logement ». La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel au visa de l’article 1536 du Code civil qui dispose qu’en cas de séparation de biens, chaque époux « (…) conserve l’administration, la jouissance et la libre disposition de ses biens personnels. Chacun d’eux reste seul tenu des dettes nées en sa personne avant ou pendant le mariage (…) ». Chaque époux est donc autonome financièrement et l’appréciation du caractère proportionné doit donc se faire au regard des revenus et des biens du seul époux qui s’est engagé comme caution.  

L’arrêt du 6 juin se prononce pour sa part dans une espèce dans laquelle les époux étaient mariés sous le régime de la communauté légale et dans laquelle le conjoint avait donné son accord pour l’engagement des biens communs, en application de l’article 1415 du Code civil. Pour mémoire, celui-ci stipule que « chacun des époux ne peut engager que ses biens propres et ses revenus, par un cautionnement ou un emprunt, à moins que ceux-ci n’aient été contractés avec le consentement exprès de l’autre conjoint qui, dans ce cas, n’engage pas ses biens propres. » La Cour de cassation rappelle qu’il doit être « pris en considération tant les biens propres et les revenus de [la caution] que les biens communs, incluant les revenus de son épouse ». Elle rappelle toutefois que l’appréciation du caractère manifeste doit prendre en considération les biens communs, « sans qu’il y ait lieu de tenir compte du consentement exprès du conjoint ». Cette précision rappelle la position de la Cour de cassation telle qu’elle résulte d’un arrêt du 15 novembre 2017. Elle distingue en effet l’appréciation du caractère proportionné du cautionnement souscrit, pour laquelle l’accord du conjoint commun en bien n’est pas nécessaire, de la capacité de saisir des biens communs aux deux conjoints, qui nécessite l’accord du conjoint, en application de l’article  1415 du Code civil. 

Les enseignes qui souhaitent faire souscrire des engagements de caution ont donc tout intérêt à confirmer le régime matrimonial des cautions, afin de savoir précisément sur quelles bases sera apprécié le caractère proportionné ou non du cautionnement. Au-delà, un engagement solidaire du conjoint, en cas de séparation de biens, ou un accord du conjoint pour la souscription du cautionnement pourra être nécessaire afin de pouvoir disposer d’une assiette suffisante dans le cas où une mesure d’exécution forcée serait requise.   

Cass. com., 24 mai 2018, n° 16-23.036 ; Cass. com., 6 juin 2018, n° 16-26.182

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