Le Conseil constitutionnel valide la procédure d’engagements

Le Conseil Constitutionnel juge que la procédure d’engagements est conforme à la Constitution, et que le refus de l’Autorité de la concurrence d’accepter les engagements d’une entreprise, de nature à mettre fin à des préoccupations de concurrence, est susceptible de recours.

La procédure d’engagements permet à l’Autorité de la concurrence de faire cesser ou modifier rapidement et volontairement le comportement d’une entreprise qui présentent des aspects anticoncurrentiels.

Cette compétence est prévue par l’article 5 du règlement européen du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence.

En droit français l’article L464-2 du code de commerce dispose que : 

« I.-L’Autorité de la concurrence peut ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou leur imposer toute mesure corrective de nature structurelle ou comportementale proportionnée à l’infraction commise et nécessaire pour faire cesser effectivement l’infraction. Elle peut aussi accepter des engagements, d’une durée déterminée ou indéterminée, proposés par les entreprises ou associations d’entreprises et de nature à mettre un terme à ses préoccupations de concurrence susceptibles de constituer des pratiques prohibées visées aux articles L. 420-1 à L. 420-2-2 et L. 420-5 ou contraires aux mesures prises en application de l’article L. 410-3. »

Ainsi, l’Autorité de la concurrence peut, après avoir identifié des préoccupations de concurrence liées aux agissements d’une entreprise, lui demander des engagements pour remédier à la situation. 

En application de l’article L464-8 du code de commerce, les décisions de l’Autorité de la concurrence mentionnées à cet article peuvent, dans le délai d’un mois, faire l’objet d’un recours en annulation ou en réformation devant la cour d’appel de Paris.

En l’espèce, la société Sony avait formé un recours contre une décision de l’Autorité de la concurrence qui avait refusé ses engagements.

La cour d’appel de Paris a considéré que la décision ne pouvait pas faire l’objet d’un recours, puisqu’elle n’était qu’une mesure d’ordre interne. Selon la Cour, seules les décisions d’acceptation des engagements proposés par les entreprises sont visées par l’article du code comme étant susceptibles de recours, à l’exclusion de celles portant refus desdits engagements. Elle rappelait aussi dans sa décision que les parties n’ont pas de droit aux engagements (Paris, 21 avr. 2022, n° 20/16953).

Le Conseil Constitutionnel a été saisi le 7 décembre 2022 d’une question prioritaire de constitutionnalité par la Cour de cassation : 

Sony fait valoir notamment que l’article L464-2 du code de commerce serait contraire au droit à un recours juridictionnel effectif, du fait de l’impossibilité de former un recours contre les refus de l’Autorité de la concurrence concernant les engagements. En outre il serait contraire aux droits de la défense, car les éléments présentés par l’entreprise en cause dans le cadre de la procédure d’engagements peuvent être réutilisés dans le cadre de la procédure de sanction ;   

Sony fait valoir également que l’article L464-2 du code de commerce serait contraire aux principes d’indépendance et d’impartialité de la justice, car elle considère que les agents de l’Autorité de la concurrence qui interviennent sur une procédure d’engagement se forgent une opinion sur les pratiques en cause, et finalement si une procédure de sanction d’ouvre, ces mêmes personnes ne devraient pas être appelées à se prononcer sur les sanctions.

Le Conseil Constitutionnel a rejeté les griefs soulevés et a jugé que les dispositions en question du code de commerce sont conformes à la Constitution.

Le Conseil constitutionnel vise dans sa décision l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui dispose que « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ».

Le Conseil considère que l’article L464-2 du code de commerce se limite à permettre à l’Autorité de la concurrence d’apprécier la suite à donner aux propositions d’engagement qui lui sont présentées par les entreprises, pour remédier à des situations susceptibles d’être anticoncurrentielles, dans le cadre de sa mission de garantie de bon fonctionnement de la concurrence sur les marchés. 

Le Conseil rappelle que la jurisprudence constante de la Cour de cassation retient que la procédure d’engagements n’a pas pour objet de prouver ou d’écarter la réalité et l’imputabilité des infractions, mais uniquement de vérifier que les engagements proposés permettent d’éliminer les risques anticoncurrentiels.

Dans ces conditions, le Conseil considère que le fait que l’Autorité examine les mêmes faits dans le cadre d’une procédure d’engagements et ensuite dans le cadre d’une procédure de sanction qui ferait suite à son propre refus ne porte pas atteinte au principe d’impartialité.

Par contre, le Conseil juge que, le refus de l’Autorité de la concurrence d’accepter les engagements proposés par une entreprise, au regard des conséquences que ce refus peut avoir pour celle-ci, constitue une décision susceptible de faire l’objet d’un recours en application de l’article L464-8 du code de commerce.

Cette décision permet ainsi aux entreprises de contester les refus qu’elles recevront de la part de l’Autorité à leurs propositions d’engagements.

Conseil constitutionnel 10 février 2023 2022-1035 QPC Société Sony Interactive Entertainment France

Découvrez nos services et outils associés

contentieux_des_contrats_de_distribution

Réseaux de distribution, Concurrence

Assigner ou se défendre contre un distributeur

Un litige vous oppose à un ou plusieurs de vos distributeurs ?

En matière économique, du fait de l’importance du facteur temps, il est souvent primordial de trouver rapidement un arrangement acceptable.

Avocats de réseaux de distribution, notre approche du contentieux réside en premier lieu dans la prévention et l’anticipation de ceux-ci.

Quand survient un contentieux, notre connaissance des réseaux de distribution et du droit de la distribution nous permet d’être très pro actifs à vos côtés pour la recherche et la production des preuves pertinentes. 

Un litige vous oppose à un ou plusieurs de vos distributeurs ?

En matière économique, du fait de l’importance du facteur temps, il est souvent primordial de trouver rapidement un arrangement acceptable.

Avocats de réseaux de distribution, notre approche du contentieux réside en premier lieu dans la prévention et l’anticipation de ceux-ci.

Quand survient un contentieux, notre connaissance des réseaux de distribution et du droit de la distribution nous permet d’être très pro actifs à vos côtés pour la recherche et la production des preuves pertinentes. 

Et les ressources sur le même thème : "Rupture de relations commerciales établies"

Réseaux de distribution, Concurrence

Echange d’informations dans la double distribution

La Commission européenne lance une nouvelle consultation visant à modifier les Lignes directrices du futur règlement d’exemption des restrictions verticales, dans la partie qui concerne les échanges d’informations dans la double distribution. Le projet de nouveau règlement d’exemption …

Réseaux de distribution, Concurrence

Rupture de relation commerciale : précisions sur les règles du préavis

La Cour de cassation clarifie les critères d'évaluation du préavis en cas de rupture de relation commerciale, soulignant l'importance de la durée de la relation et de la dépendance économique. Une analyse essentielle pour les entreprises soucieuses de sécuriser leurs pratiques contractuelles.

Relations clients fournisseurs

Rupture brutale de relations commerciales établies dans l’audiovisuel

Par un arrêt du 17 janvier 2025, la Cour d’appel de Paris confirme l’applicabilité du fondement de la rupture brutale de relations commerciales dans le secteur audiovisuel. 

Relations clients fournisseurs

La brutalité de la rupture écartée en présence d’une relation par nature fluctuante

La Cour d’appel de Paris confirme le jugement déféré en ce qu’il écartait la brutalité de la rupture en présence d’une baisse significative du flux d’affaires, laquelle ne pouvait être établie par référence à un seul semestre. 

Contactez nos avocats

Premier rendez-vous de qualification de besoin gratuit