
Tierce complicité d’une violation d’une clause de non-réaffiliation par un réseau concurrent
Cette décision illustre le risque pour un réseau d’engager sa responsabilité en signant un contrat de distribution avec un candidat tenu par une clause de non réaffiliation.
Cette décision illustre le risque pour un réseau d’engager sa responsabilité en signant un contrat de distribution avec un candidat tenu par une clause de non réaffiliation.
La société Laxe Immobilier a adhéré à la coopérative ORPI en 2011 pour exploiter une agence de gestion locative. En décembre 2015, Laxe Immobilier a informé ORPI de son intention de céder 100 % de ses parts sociales à la société Citya Immobilier, exploitant un autre réseau d’agence immobilière. ORPI a rappelé l’existence d’une clause de non-réaffiliation dans son règlement intérieur, interdisant à ses anciens membres de rejoindre un réseau concurrent pendant une durée d’un an après leur départ. Malgré cela, Laxe Immobilier a quitté le réseau ORPI et a finalisé la cession de ses parts à Citya Immobilier en avril 2016. ORPI a alors poursuivi Laxe Immobilier et Citya Immobilier pour violation de cette clause et pour concurrence déloyale.
La Cour a d’abord confirmé la validité de la clause, préalable indispensable à ce type d’action, et son opposabilité à l’ancien adhérent, même si elle ne figurait pas dans les statuts mais dans un règlement intérieur voté en assemblée générale. La question était ensuite de savoir si Citya Immobilier a été complice de la violation par Laxe Immobilier de la clause de non-réaffiliation indiquée dans le règlement intérieur d’ORPI.
La Cour d’appel de Paris a confirmé que Laxe Immobilier avait violé la clause de non-réaffiliation en cédant ses parts à Citya Immobilier, un réseau concurrent. La Cour a également jugé que Citya Immobilier, en tant que professionnel avisé du secteur immobilier, était informée de cette clause dans la mesure où elle était mentionnée dans le protocole d’accord de cession des parts sociales de Laxe Immobilier, et avait néanmoins procédé à l’acquisition des parts, malgré un refus de dérogation exprimé par ORPI. Elle avait ainsi commis une faute engageant sa responsabilité civile délictuelle.
Sur le préjudice, la Cour a relevé toutefois qu’ORPI ne rapportait pas la preuve qu’avaient été apposés, sur l’agence, les documents commerciaux ou la façade de la société Laxe Immobilier, les signes distinctifs du réseau Citya Immobilier, dans le délai de la clause à savoir un an. De plus, la Cour relève qu’ORPI ne contestait pas avoir coupé l’accès aux bases de données du réseau dès avant la réalisation de la cession. Ainsi, il n’était pas prouvé que l’adhésion au réseau Citya Immobilier ait permis à cette dernière d’avoir un accès direct aux informations confidentielles du réseau ORPI. La Cour relève ainsi qu’ORPI échoue à démontrer le dommage.
La Cour relève par contre que la violation de la clause et la complicité de Citya Immobilier ont porté atteinte à l’image et à la réputation d’ORPI. En effet, ces actions ont fragilisé la confiance des coopérateurs et des clients dans la capacité d’ORPI à protéger ses informations et à maintenir l’exclusivité de son réseau. Elles ont permis en outre à Citya Immobilier de renforcer de manière déloyale son réseau.
En conséquence, la Cour a condamné Citya Immobilier à verser 10 000 euros à ORPI mais sur le fondement de la concurrence déloyale, en plus des dommages et intérêts déjà imposés à Laxe Immobilier pour la violation de la clause de non-réaffiliation.
Cet arrêt rappelle les conditions de mise en œuvre de la tierce complicité dans la violation des clauses de non-concurrence. Concernant la connaissance que l’enseigne concurrente pouvait avoir de la clause, celle-ci était spécifiquement démontrée dans cette affaire. Nous rappellerons toutefois que dans le passé, la Cour d’appel de Paris avait considéré que l’enseigne concurrente ne pouvait ignorer la clause au motif que ce type de clause présentait un caractère habituel. Pour une enseigne qui souhaite se prévaloir de la clause il est toutefois préférable de pouvoir démontrer que l’enseigne concurrente était bien informée de l’existence de la clause.
Elle est également intéressante par le fait qu’elle apprécie différemment le préjudice résultant de la violation de la clause par l’ancien adhérent, du préjudice résultant de la complicité de l’enseigne concurrente, les deux pouvant être différents.
(CA Paris, 18 sept. 2024, n°22/11995)
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