Contrefaçon, Concurrence déloyale et effet de gamme
Comment l’effet de gamme est-il pris en compte par les tribunaux?
L’articulation entre les actions en contrefaçon, en concurrence déloyale et en parasitisme est une question récurrente qui peut être difficile à appréhender. Un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 16 décembre 2016 vient illustrer cette question, en abordant par ailleurs la question de « l’effet de gamme ».
Les actions en contrefaçon et les actions en concurrence déloyale reposent sur des fondements différents. L’action en contrefaçon repose sur un fondement spécifique, lié au fait de reproduire sans autorisation une marque, un brevet, un dessin et modèle ou une oeuvre protégés par un droit de propriété intellectuelle. L’action en concurrence déloyale ou parasitaire est fondée sur le droit commun de la responsabilité délictuelle: le dommage causé par une faute doit être réparé.
Ces actions peuvent se cumuler, sous réserve que l’action en concurrence déloyale repose sur des faits distincts de ceux invoqués pour l’action en contrefaçon. Elles ne peuvent par ailleurs aboutir à réparer deux fois le même préjudice.
Les faits distincts peuvent être matériellement distincts: ainsi par exemple la contrefaçon d’un objet protégé au titre des dessins et modèles associé à une imitation de l’emballage. Il a également pu être considéré que le risque de confusion résultant d’un acte de contrefaçon pouvait constituer un acte de concurrence déloyale distinct. La Cour de cassation (Cass. com., 15 juin 2010, n°08-20,999: JurisData n° 2010-009655) avait ainsi admis que la commercialisation de vêtements sous la marque « Free Girl » constituait une imitation de la dénomination de la société Free « créant ainsi une confusion dans l’esprit du public » caractérisant « l’existence de faits distincts de concurrence déloyale ».
Au cas d’espèce, deux sociétés membres du groupe Desigual ont assigné une autre société à laquelle ils reprochaient des actes de contrefaçon de dessins et modèles et de droits d’auteur sur des sacs.
La Cour d’Appel a reconnu d’une part la contrefaçon de droits d’auteur et de dessins et modèles. Elle a également caractérisé des faits de parasitisme dans la mesure où il s’agissait d’un motif phare pour promouvoir la marque Desigual, utilisé à de nombreuses reprises dans des publicités, ayant connu un succès commercial avéré et décliné sur plus de 70 modèles. La société poursuivie avait ainsi profité de la notoriété et des investissements opérés. Elle a enfin reconnu qu’en « déclinant un motif contrefaisant sur trois modèles de sacs différents, la société Fashion Power a créé un effet de gamme qui accroit le risque de confusion entre le les produits; qu’il s’agit là d’un fait distinct de ceux déjà retenu au titre de la contrefaçon. »
Cette notion d’effet de gamme a déjà été reconnue par la jurisprudence. Il s’agit en résumé d’imiter l’ensemble d’une production. L’effet de gamme vient alors renforcer le risque de confusion. La Cour d’Appel de Paris (CA Paris 20 fée. 2013, n° 11/06089) avait ainsi jugé que « la création d’un effet de gamme par la reproduction de plusieurs modèles d’une même collection, constitue un fait distinct de la contrefaçon ». Il constitue une faute dans la mesure où il consiste « à introduire un risque de confusion sur l’origine des produits ».
L’appréciation de cet effet de gamme est toutefois stricte. Il a ainsi pu être refusé lorsque les modèles copiés ne faisaient pas partie d’une même collection
(n°16/03656, JurisData n°2016-029420)
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Concurrence déloyale et parasitaire
Si tout professionnel peut porter préjudice à son concurrent, c’est à condition de ne pas utiliser de procédés déloyaux, c’est-à-dire, contraires aux usages professionnels, afin de détourner la clientèle de son concurrent. La faute dans l’exercice de la concurrence oblige son auteur à verser des dommages et intérêts si un préjudice a été subi.
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