Bail commercial & location-gérance : point sur l’opportunité d’obtenir le remboursement de la TEOM.

Dans un arrêt rendu le 5 avril, la chambre commerciale de la Cour de cassation a rejeté la demande d’un locataire-gérant (la société carrefour proximité France) visant à obtenir du loueur du fonds de commerce la restitution du montant de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) acquittée pendant plusieurs années.

Le locataire-gérant faisait valoir notamment que :

  • le propriétaire du fonds de commerce ne pouvait pas lui faire supporter le paiement de la TEOM dès lors qu’elle n’était pas expressément stipulée, 
  • le contrat de location-gérance n’avait mis à sa charge que les taxes afférentes au statut de commerçant et celles assujettissant l’exploitation du fonds donné en gérance, lesquelles selon lui ne correspondaient pas à la TEOM,
  • son interprétation erronée, selon laquelle la TEOM était incluse dans les impositions et taxes visées dans le contrat de location-gérance et qui l’avait amené à régler la TEOM, ne pouvait avoir pour effet de le priver du droit de réclamer sa restitution.

La Cour de cassation a cependant relevé que le locataire-gérant avait volontairement payé la TEOM en exécution de la clause du contrat de location-gérance stipulant que « le preneur devrait acquitter à compter de son entrée en jouissance les impôts, contributions, charges et taxes de toute nature fiscale ou parafiscale afférentes au statut de commerçant ou celles auxquelles l’exploitation du fonds donné en gérance pouvait ou pourrait être assujettie« .

La haute juridiction a, dans ces conditions, considéré que la cour d’appel, par une appréciation souveraine du sens et de la portée de cette clause, avait, par motifs propres et adoptés, fait ressortir que cette clause mettait à la charge du locataire-gérant la TEOM, laquelle est une taxe parafiscale relative à l’exploitation du fonds.

Cette solution peut paraître sévère pour le locataire-gérant et contraire à la jurisprudence de la Cour de Cassation qui considère en matière de bail commercial que les paiements effectués par le locataire ne sont pas une renonciation à demander le remboursement des taxes facturées à tort par le bailleur (Cass. 3ème civ.  26 mars 2013, n°11-24311).

Elle est cependant conforme à la jurisprudence en matière de bail commercial (Cass. 3ème civ. 13 juin 2012, n°11-17114) qui avait été invoquée par le locataire-gérant lui-même dans l’affaire commentée.

Contrairement à ce que ce dernier croyait, il ne ressort pas de l’arrêt du 13 juin 2012 que la TEOM doit être expressément nommée. Il y est seulement précisé que la TEOM ne peut être mise à la charge du locataire qu’en vertu d’une stipulation contractuelle.

En l’espèce, le rédacteur avait pris le soin de prévoir une telle stipulation et la Cour de cassation a validé la position de la cour d’appel considérant que cette stipulation transfère la charge de la TEOM sur le locataire gérant, même si cette stipulation ne désigne pas expressément la TEOM.

Cet arrêt ne doit pas freiner les locataires-gérants ou les preneurs de surfaces commerciales dans leur volonté d’obtenir le remboursement de la TEOM indûment payée.

Leur action en restitution est justifiée si la clause de leur contrat n’est pas dénuée d’ambiguïté.

Ce principe demeure après l’entrée en vigueur de la loi Pinel, l’article R 145-35 du code de commerce organisant une répartition des catégories de charges, impôts, taxes et redevances sans exiger une dénomination précise des dépenses.

Ainsi, il est certain que les bailleurs de locaux commerciaux ne peuvent pas récupérer la TEOM pour les motifs suivants :

  • si le bail prévoit que la taxe foncière est à la charge du preneur, la TEOM, alors qu’elle figure sur l’avis de la taxe foncière, ne constituant pas un élément de celle-ci, 
  • au motif que la TEOM figure dans la liste des charges récupérables du décret du 87-713 du 26 août 1987, celui-ci n’étant applicable qu’aux locations de locaux à usage d’habitation principale (ou mixte).

Notre cabinet se tient à la disposition des locataires-gérants ou des preneurs de surfaces commerciales qui souhaitent vérifier si leur cocontractant peut les obliger à payer la TEOM et/ou étudier l’opportunité de mettre en place une action (amiable ou judiciaire) en restitution des sommes indûment versées.

Cour de Cassation – chambre commerciale Audience publique du jeudi 5 avril 2018 
N° de pourvoi: 17-13559 – Non publié au bulletin 

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