Sanction d’accords exclusifs d’importation en outre-mer

Par une décision en date du 20 février 2018, l’Autorité de la concurrence sanctionne des entreprises pour avoir maintenu des accords comportant des droits exclusifs d’importation en outre-mer après la loi « Lurel ».  

Rappel du cadre légal 

La loi n°2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, dite « Lurel », a complété les pouvoirs de l’Autorité de la concurrence afin de lui donner des moyens d’action en rapport avec la situation économique spécifique des collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et des collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre et Miquelon et de Wallis et Futuna. 

L’Autorité est désormais en mesure d’interdire les pratiques et les accords ayant pour objet ou pour effet d’accorder des droits exclusifs d’importation et qui ne sont pas justifiés par les opérateurs économiques concernés. 

L’article 5 de la Loi Lurel : 

  • insère un nouvel article L. 420-2-1 dans le code de commerce, selon lequel : 

«Sont prohibés, dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna, les accords ou pratiques concertées ayant pour objet ou pour effet d’accorder des droits exclusifs d’importation à une entreprise ou à un groupe d’entreprises.». 

  • complète l’article L. 420-4 du même code par un III, en vertu duquel : 

«Ne sont pas soumis aux dispositions de l’article L. 420-2-1 les accords ou pratiques concertées dont les auteurs peuvent justifier qu’ils sont fondés sur des motifs objectifs tirés de l’efficacité économique et qui réservent aux consommateurs une partie équitable du profit qui en résulte».

Cet article vise donc à interdire et à frapper de nullité, dans les outre-mer, les accords et pratiques ayant pour objet ou pour effet d’accorder des droits exclusifs d’importation à une entreprise ou un groupe d’entreprises, sauf lorsqu’elles sont justifiées par l’intérêt des consommateurs. 

L’espèce

Le groupe Dow Agroscience commercialise sous la marque « Sentri TechTM » le seul piège à appâts à base de biocide dont l’efficacité est actuellement certifiée en outre-mer. Ces pièges sont importés dans chacun des territoires concernés par un importateur-grossiste unique qui les commercialise auprès des sociétés spécialisées dans la lutte anti-termites. 

Au terme d’une instruction menée à la suite d’une enquête de la DGCCRF, l’Autorité a constaté que Dow Agrosciences avait maintenu des clauses d’importation exclusive dans les contrats de commercialisation de ses pièges plusieurs années après l’entrée en vigueur de la Loi Lurel. 

L’Autorité a ainsi relevé que Dow Agrosciences a accordé des droits exclusifs d’importation à : 

  • la société Emeraude Environnement, sur le territoire de la Réunion, du 22 mars 2013 au 31 décembre 2016, et à 
  • la société Carib Termite Control sur le territoire des Antilles et de la Guyane du 22 mars 2013 au 16 juin 2017. 

Ces accords, maintenus en violation de l’article L. 420-2-1 du Code de commerce, n’ont pu bénéficier de l’exemption prévue par le III de l’article L. 420-4 du Code de commerce, faute pour les sociétés mises en cause d’avoir démontré l’existence de motifs objectifs tirés de l’efficacité économique pouvant justifier l’octroi d’une exclusivité d’importation illimitée et d’avoir apporté la preuve ou, à tout le moins une estimation, du bénéfice – qualitatif ou financier – que le consommateur pouvait retirer d’une telle exclusivité d’importation. 

Concernant les mesures de sanction adoptées par l’Autorité de la concurrence au terme de cette sanction, celle-ci a en premier lieu enjoint aux sociétés du groupe Dow AGrosciences de supprimer, dans un délai de 2 mois, toute disposition contractuelle instaurant une exclusivité d’importation ou toute clause ayant un effet équivalent, et d’informer par courrier l’ensemble des sociétés utilisatrices de ses pièges en outre-mer de cette suppression. 

Les sociétés doivent également s’abstenir d’insérer toute disposition instaurant une exclusivité d’importation ou toute clause ayant un effet équivalent dans ses contrats de distribution en outre-mer pendant une durée de deux ans. 

Par ailleurs, les sociétés du Groupe Agrosciences ont été sanctionnées à hauteur de 60.000 € et les importateurs grossistes, les sociétés Emeraude Environnement et Carib Termite Control, se sont vues infliger une amende de 5.000 €. 

En outre, l’Autorité ayant établi que la société Emeraude a refusé, de manière discriminatoire, de fournir les pièges à termites à une société spécialisée dans la lutte anti-termites, elle l’a sanctionné d’une amende supplémentaire de 5.000 € pour abus de position dominante. 

Cette affaire donne l’occasion à l’Autorité de préciser que cette disposition de la loi Lurel inscrite à l’article L. 420-2-1 du code de commerce ne limite pas l’application de l’interdiction des exclusivités d’importation aux produits de grande consommation ou à des importations impliquant un transfert de propriété.

Décision 18-D-03 du 20 février 2018 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la commercialisation de pièges à termites à base de biocides à  La Réunion, aux Antilles et en Guyane

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