
Contrefaçon et exportation : Revirement de la Cour de Cassation
Apposer une marque en France en vue d’une exportation dans un pays dans lequel on dispose de droits sur ladite marque peut-il constituer une contrefaçon ?
La protection des marques est territoriale. En conséquence, une marque n’est protégée que pour le ou les pays dans lesquels elle a été enregistrée. Le titulaire d’une marque française peut donc être protégé pour sa marque en France, et une autre personne titulaire d’une autre marque similaire pour d’autres pays, comme la Chine par exemple.
Si le titulaire de cette autre marque appose ou fait apposer sa marque en France sur des produits destinés à être exportés vers la Chine, cela peut-il constituer un acte de contrefaçon de la marque française ? Dès lors que les produits ne sont pas commercialisés sur le territoire français et qu’ils ne font l’objet d’aucun autre usage, hormis voir la marque apposée, il pourrait être considéré que cela n’est pas constitutif d’un acte de contrefaçon.
C’est la position qu’avait adoptée la Cour de cassation dans un arrêt du 10 juillet 2007 considérant que cela ménagerait « une exception de motif légitime de détention de tels produits revêtus du signe litigieux sur le territoire français dans lequel ce signe était protégé en tant que marque, dès lors que ces produits étaient destinés à l’exportation vers des pays tiers dans lesquels ils étaient licitement commercialisés et qu’il n’existait pas de risque que ces marchandises puissent être initialement commercialisées en France, de sorte que les entreprises poursuivies n’avaient fait usage du signe litigieux qu’afin d’exercer leur droit exclusif portant sur la première mise sur le marché de produits revêtus du signe incriminé dans des pays où elles disposaient de ce droit ».
Il résulte des articles L. 713-2 et L. 716-10 du Code de la propriété intellectuelle que le fait « d’exporter des marchandises présentées sous une marque contrefaisante », « sans motif légitime » est constitutif d’actes de contrefaçon.
La Cour de cassation considérait donc que l’exportation des marchandises hors de France sans autre usage dans le pays constituait un tel motif légitime.
Par un arrêt du 17 janvier 2018 (Cass. com., 17 janv. 2018, n°15-29.276) la Cour de cassation opère un revirement significatif sur cette question. Se référant aux directives européennes en matière de marque (tant de 1988, 2008 ou 2015), lesquelles avaient pour but de rapprocher totalement les législations des Etats-membres elle constate qu’elles ne prévoyaient pas cette exception, ce qui avaient été confirmé par la jurisprudence européenne (CJCE, 20 nov. 2001, aff. C-414/99 à C-416/99 et CJCE, 12 nov. 2002, aff. C-206/01).
En conséquence, la cour d’appel, ayant constaté que la marque avait été apposée en France, où elle est protégée, en a exactement déduit, alors même que les produits étaient destinés à l’exportation vers la Chine, que des actes de contrefaçon étaient constitués.
Cet arrêt ouvre donc la possibilité à tous les titulaires de marques françaises ou de l’Union européenne, d’agir contre toutes personnes qui procéderaient à l’apposition d’une marque similaire sur des produits similaires au sein du territoire de protection, quand bien même ces produits seraient destinés à l’exportation vers des pays tiers.
A l’inverse, les titulaires de marques étrangères, non protégées en France mais pouvant être similaires à des marques françaises antérieures, devront prendre soin de faire apposer la marque hors de France, sauf le cas échéant à avoir conclu des accords de coexistence avec ces titulaires de marques françaises ou européennes.
Cass. com. 10 juill. 2007, n°05-18.571
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