
Absence d’inventaire & remboursement des charges indûment appelées
La Loi oblige la mise en place d’un inventaire des catégories de charges, impôts, taxes et redevances. Selon la cour d’appel de Versailles, dans une décision du 7 mars 2024, si cet inventaire fait défaut, la clause prévoyant le remboursement de certaines charges doit être réputée non écrite. Voici une décision que les preneurs pourront invoquer pour obtenir la restitution des charges indûment payées.
Une société donne à bail commercial divers locaux au rez de chaussée d’un immeuble à destination de « restaurant, notamment à service rapide, à l’exclusion de toute autre utilisation », pour une durée de neuf années.
Quelques années plus tard une SCI acquiert l’ensemble immobilier et fait délivrer à la société preneuse un commandement visant la clause résolutoire d’avoir à payer une certaine somme.
Par jugement, le tribunal judiciaire de Versailles :
– déclare nul et de nul effet le commandement de payer visant la clause résolutoire délivré par la SCI
– rejette les autres demandes des parties
– dit qu’il appartient aux parties de faire leurs comptes
La société bailleresse interjette appel et demande à la Cour de :
– juger qu’elle est recevable et bien fondée en l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions
– juger que le commandement de payer visant la clause résolutoire est valable
– constater acquise au profit de la SCI la clause résolutoire visée dans le commandement de payer
En conséquence, elle demande à la Cour de condamner la société preneuse à lui payer des arriérés de loyers et charges.
La cour d’appel rappelle les dispositions de l’article L.145-40-2 du Code de commerce qui exige un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts taxes et redevances liés à ce bail, comportant l’indication de leur répartition entre le bailleur et le locataire.
La cour d’appel rappelle également que l’inventaire prévu par les dispositions susvisées a un caractère limitatif et constitue la seule façon d’imputer des charges au locataire. Les charges doivent nécessairement être récapitulées, de telle sorte que toute catégorie de charges non mentionnée à cet inventaire ne pourra pas être récupérée.
Pour justifier sa refacturation des charges, la bailleresse invoque plusieurs articles relatifs à l’entretien, au gardiennage, à la surveillance des locaux loués ou encore aux impôts et taxes.
La cour d’appel estime que ces différents articles ont pour objet soit de rappeler les dispositions de l’article R 145-35 du Code de commerce soit d’organiser la répartition de dépenses qui ne sont pas constitutives de charges.
Elle relève par ailleurs que les parties s’accordent quant à l’absence d’inventaire annexé au bail, et à l’existence d’une clause prévoyant le remboursement de certaines charges.
Elle se pose donc la question de savoir si la clause prévoyant le remboursement de certaines charges permettait au bailleur de les refacturer.
La Cour considère que cette clause contourne l’exigence d’inventaire des charges prévue à l’article L 145-40-2 du code de commerce, lequel est d’ordre public au sens de l’article L 145-15 du code de commerce.
Elle décide par conséquent que cette clause doit être réputée non écrite.
La Cour en déduit que la bailleresse ne peut prétendre à des charges récupérables malgré la production en cause d’appel des décomptes de régularisations de charges.
Commentaire :
La Cour d’appel de Versailles dans sa décision du 7 mars 2024 rappelle le principe prévu par l’article L.145-40-2 du Code de commerce.
Un bail commercial doit prévoir un inventaire de charges.
La Cour d’appel semble considérer que cet inventaire, qui ne peut pas correspondre à une simple clause, devrait faire l’objet d’une annexe.
La prudence invite donc les rédacteurs à annexer au bail commercial l’inventaire au sens de l’article L. 145-40-2 du Code de commerce.
Voici en toute hypothèse une décision que les preneurs pourraient invoquer pour obtenir la restitution des charges indûment perçues par le bailleur, lorsque le bail ne comporte pas un inventaire conforme à la Loi.
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Contrôler la refacturation des charges locatives dans un bail commercial
Vous êtes locataire, titulaire d’un bail commercial, et avez réglé au cours de l’année des provisions sur charges.
Votre bailleur vous réclame le paiement de charges complémentaires qui ne semblent pas exigibles ni quant à leur nature ni quant à leur quantum.
Vous pouvez exiger de votre bailleur qu’il justifie de la régularisation annuelle et vous adresse les pièces justifiant de la nature et du montant des charges complémentaires réclamées.
Votre bailleur ne peut pas vous réclamer le paiement de toutes les charges.
Vous êtes locataire, titulaire d’un bail commercial, et avez réglé au cours de l’année des provisions sur charges.
Votre bailleur vous réclame le paiement de charges complémentaires qui ne semblent pas exigibles ni quant à leur nature ni quant à leur quantum.
Vous pouvez exiger de votre bailleur qu’il justifie de la régularisation annuelle et vous adresse les pièces justifiant de la nature et du montant des charges complémentaires réclamées.
Votre bailleur ne peut pas vous réclamer le paiement de toutes les charges.
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