Responsabilité du franchiseur et/vs devoirs du franchisé

La Cour d’appel de Paris rappelle le devoir du franchisé, en qualité de commerçant indépendant, de renseignement au cours de la phase précontractuelle et refuse l’annulation du contrat de franchise conclu en l’absence de transmission d’un DIP.  

La Cour d’appel de Paris dans une décision du 9 novembre 2022 interroge sur le rapport -potentiellement ambivalent – entre responsabilité du franchiseur, tête de réseau, et devoirs du franchisé, commerçant indépendant.
En dépit de la reconnaissance de différents manquements du franchiseur, tant dans la phase précontractuelle qu’au cours de son exécution, un franchisé, dont le caractère indépendant irriguera le raisonnement de la cour d’appel, échoue à obtenir la nullité du contrat de franchise et l’intégralité de ses demandes en dommages et intérêts.

Court et rapide rappel des faits : un contrat de franchise est signé en prévision de l’exploitation d’une boutique de vêtement. Deux ans plus tard, le franchisé, rencontrant des difficultés financières, exprime ses critiques et inquiétudes quant à la politique tarifaire du réseau mettant d’ailleurs le franchiseur en demeure de remédier à ces difficultés. Peu de temps après, le franchisé notifie à la tête de réseau la résiliation du contrat pour inexécution fautive.

Le franchisé décide d’assigner le franchiseur devant le Tribunal de commerce de Paris afin de solliciter l’indemnisation de ses préjudices, invoquant la nullité du contrat de franchise pour réticence dolosive et sa résiliation pour faute.

Le Tribunal de commerce déboute le franchisé de l’ensemble des demandes, à l’exception des dommages et intérêts sollicités en écho au manquement du franchiseur lié à la définition préalable des travaux d’aménagement de la boutique.

La Cour d’appel de Paris confirme – en substance – l’essentiel du jugement rendu en premier instance, écartant la réticence dolosive, alors qu’elle retient pourtant différents manquements du franchiseur comme l’absence de remise de Document d’information précontractuel.

La Cour d’appel revenant également sur la rentabilité de la boutique, estime que le « déficit d’exploitation n’est pas imputable au franchiseur mais consécutif à la politique commerciale du franchisé ».

Ainsi, la Cour d’appel de Paris apparait décidée à mettre en avant, plus que la responsabilité du franchiseur, les devoirs du franchisé en tant que commerçant indépendant.
Revenons tout d’abord sur la phase précontractuelle du contrat : bien que la tête de réseau n’ait pas communiqué de Document d’information précontractuel, conformément à l’obligation prévue à l’article L330-3 du Code de commerce, la cour d’appel explique que le « franchisé ne démontre ni en quoi son consentement a été vicié, ni la faute du franchiseur, ni réticence intentionnelle ou grossières erreurs de la phase précontractuelle ». Par conséquent, l’annulation du contrat ne peut être prononcée, conformément à une jurisprudence constante et établie sur le sujet.

En outre la Cour d’appel de Paris, dans la continuité du développement du Tribunal de commerce évoque pour exclure toute faute du franchiseur que de nombreux échanges ont eu lieu entre les deux entités, tant sur le coût des travaux liés à l’aménagement de la boutique que sur le personnel nécessaire à l’exploitation de ladite boutique. Le franchisé ne doit pas se cantonner à un rôle passif, il lui appartient de s’informer et d’évaluer, pour reprendre les faits de l’espèce, « les coûts de travaux et d’établir des comptes prévisionnels ».

Attardons-nous maintenant sur l’exécution du contrat : si la Cour d’appel relève et confirme les différents manquements du franchiseur au cours de l’exécution du contrat, notamment liés à la définition des travaux d’aménagement et à l’exécution desdits travaux, contraignant, notamment, le franchisé à décaler la date d’ouverture de la boutique et occasionnant des frais supplémentaires, elle considère que les manquement, bien que avérés, « ne constituent pas un motif de résiliation ». En effet, la Cour d’appel estime que les manquements visés ne peuvent constituer « un motif de résiliation plusieurs années après la réalisation des travaux ».

Enfin, la Cour d’appel de Paris déboute le franchisé de sa demande fondée sur un comportement déloyal du franchiseur lié notamment à des retards de livraison ou encore un défaut de respect de la marge convenue. La Cour d’appel estime que le franchisé n’a pas rapporté la preuve de ces manquements et que le déficit évoqué par le franchisé pour assoir sa demande était du ressort de la politique commerciale du franchisé.

En définitive, la Cour d’appel de Paris, à l’aune des faits de l’espèce, met en exergue un élément central du contrat de franchise, l’indépendance du franchisé.

Cour d’appel de Paris, 9 novembre 2022

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