
Les effets de clause résolutoire insérée dans un bail commercial peuvent être suspendus
Le locataire qui se voit délivrer un commandement visant la clause résolutoire peut solliciter des délais pour exécuter son obligation, y compris lorsque le manquement reproché par le bailleur ne concerne pas le paiement des loyers.
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Un bailleur a donné à bail des locaux commerciaux à usage de restaurant.
Le bail stipulait une clause selon laquelle les lieux loués devaient toujours rester ouverts, être exploités et achalandés.
Le 10 janvier 2019, le bailleur a fait constater par un commissaire de justice que le restaurant était fermé.
Par acte extrajudiciaire du 24 janvier 2019, il a fait signifier au preneur un commandement de reprendre l’exploitation du fonds de commerce et visant la clause résolutoire du bail.
Ce commandement est demeuré sans effets, si bien que le bailleur a assigné le locataire afin de faire constater la résiliation du bail au torts du locataire.
Le locataire a alors sollicité la suspension des effets de la clause résolutoire et un délai pour s’exécuter.
La cour d’appel refuse de suspendre les effets de la clause résolutoire et d’accorder les délais sollicités, au motif que l’alinéa 2 de l’article L145-41 du code de commerce autorise le juge à suspendre les effets de la clause résolutoire seulement dans l’hypothèse où la résiliation du bail est recherchée en raison du non-paiement des loyers et charges.
Elle considère qu’en l’espèce, le commandement de reprendre l’activité, délivré par le bailleur, ne vise pas une obligation de paiement du loyer ou des charges seule susceptible de motiver une demande de délais d’exécution et de suspension de la clause résolutoire.
La cour d’appel retient cette solution car l’alinéa 2 de l’article L.145-41 fait référence aux conditions de l’article 1343-5 du code civil.
Or, l’article 1343-5 du code civil autorise le juge à reporter ou échelonner le paiement de créances de sommes d’argent, pendant deux ans.
De ce fait, la cour d’appel a limité la possibilité, pour le locataire titulaire d’un bail commercial, de solliciter des délais aux seules obligations de payer.
Selon ce raisonnement, seuls les locataires ayant manqué à leur obligation de payer le loyer et/ou les charges peuvent solliciter des délais d’exécution.
Le locataire a formé un pourvoi en cassation, considérant que la demande qui consiste à solliciter la suspension des effets de la clause résolutoire et des délais d’exécution peut être formulée quel que soit le manquement reproché par le bailleur.
Au visa de l’article L.145-41 du code de commerce, la cour de cassation rappelle que la suspension des effets de la clause résolutoire peut être prononcée par le juge, quel que soit le manquement à ses obligations reproché au preneur.
Par conséquent, elle estime que la cour d’appel a fait une application erronée de l’article L.145-41 du code commerce, dans la mesure où elle a refusé d’étudier la demande de suspension des effets de la clause résolutoire et de délais d’exécution du locataire.
Dès lors, l’arrêt est cassé en ce qu’il a constaté l’acquisition de la clause résolutoire stipulée au bail au 24 janvier 2019, débouté le locataire de sa demande de suspension des effets de la clause et ordonné son expulsion à défaut de départ volontaire.
Le locataire qui a cessé d’exploiter le fonds de commerce est légitime à solliciter devant le juge des délais lui permettant de reprendre l’exploitation de son activité.
Dans le présent arrêt, la Cour de cassation application de l’adage « Il est interdit de distinguer là où la loi ne distingue pas ».
En effet, l’alinéa 2 de l’article L.145-41 du code de commerce dispose que les juges saisis d’une demande de délais peuvent les accorder et suspendre la résiliation et/ ou ses effets, dès lors qu’elle n’a pas déjà été constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis autorité de la chose jugée.
Si le locataire se conforme aux conditions fixées par le juge, la clause résolutoire ne joue pas et l’exécution du bail peut être poursuivie.
Cet alinéa a une portée générale car il énonce que tout bailleur qui invoque une clause prévoyant la résiliation du bail peut se voir opposer une demande de délais.
Il ne distingue pas, parmi les obligations du locataire, lesquelles peuvent être sanctionnées par la résiliation du bail.
Dès lors que toutes les obligations du locataire peuvent être sanctionnées par la résiliation du bail, celui-ci peut obtenir des délais pour leur exécution.
Autrement dit, la possibilité pour le locataire de solliciter la suspension des effets de la clause résolutoire n’est pas déterminée par la nature de l’obligation qui a fait l’objet d’une violation.
Le fait que l’article L.145-41 du code de commerce fasse référence à l’article 1343-5 du code civil ne prive pas le locataire de la faculté de solliciter des délais d’exécution.
Le locataire, qui a manqué à une obligation de faire, stipulée dans un bail commercial, peut ainsi solliciter un délai allant jusqu’à deux ans pour exécuter son obligation.
Le juge devant lequel la demande est présentée la demande de délais doit apprécier celle-ci au regard de la situation du locataire.
Pour obtenir des délais et la suspension des effets de la clause résolutoire, le locataire doit, comme en matière de paiement, démontrer qu’il est en capacité de respecter les délais qu’il sollicite.
La solution énoncée par la Cour de cassation doit être approuvée car elle confirme la possibilité pour le locataire de solliciter des délais d’exécution, quel que soit le manquement qui lui est reproché par le bailleur.
Cass, Civ. 3ème, 6 février 2025, n°23-18.360
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