
Distinction entre clause pénale et clause encadrant la résiliation anticipée du contrat
Sur les conséquences d’une résiliation contractuelle prononcée aux torts exclusifs d’une partie, la Cour d’appel de Paris distingue entre deux stipulations dont l’objectif et le régime diffèrent : clause d’indemnité de résiliation anticipée et clause pénale.
En l’espèce, une société prestataire de services a conclu avec une entreprise exploitant un hypermarché quatre contrats à durée déterminée, tacitement reconductibles, ayant pour objet la mise à disposition d’un service de location et d’entretien d’articles textiles et d’accessoires professionnels, comme notamment des tenues pour le personnel du supermarché.
En alléguant l’inexécution, l’exploitant d’hypermarché a procédé à la résiliation des contrats, résiliations contestées par le prestataire de services. Ce dernier avançait que la rupture était intervenue aux torts exclusifs de l’exploitant et demandait judiciairement l’application des différentes clauses prévues dans ses CGV et encadrant les conséquences de la résiliation. Le prestataire a obtenu gain de cause en première instance, entre autres, pour ses demandes de paiement de factures impayées, de paiement d’une clause d’indemnité de résiliation anticipée et de paiement d’une clause pénale. L’exploitant de l’hypermarché a interjeté appel.
Dans un premier temps, la Cour d’appel de Paris s’applique à reprendre les différents manquements allégués par l’hypermarché dans des courriers pour avoir procédé à la résiliation des contrats. Était avancé par exemple la qualité des vêtements livrés par le prestataire. Toutefois, la Cour affirme que les éléments apportés par l’exploitant « ne suffisent pas à caractériser des manquements graves [du prestataire de services] justifiant la résiliation des contrats à ses torts exclusifs » et en déduit que, dès lors que les griefs allégués ne sont pas démontrés, « la résiliation des contrats, à l’initiative [du gérant de l’hypermarché] lui est seule imputable ».
Dans un second temps, la juridiction du second degré analyse les clauses contractuelles prévues en cas de résiliation et commence par la clause « d’indemnité de résiliation anticipée ». Cette clause prévoyait le paiement pour deux des contrats « d’une indemnité égale à 70% de la moyenne des factures d’abonnement service établies depuis les douze derniers multipliée par le nombre de semaines ou de mois restant à courir jusqu’à l’échéance du contrat » et pour les deux autres contrats le paiement « d’une indemnité égale à la moyenne des factures d’abonnement services établies depuis les douze derniers mois multipliée par le nombre de semaines ou de mois restant à courir jusqu’à l’échéance ».
La Cour rappelle qu’une clause pénale possède à la fois un caractère indemnitaire et comminatoire et écarte en l’espèce la caractérisation d’une telle clause pénale pour les stipulations visées. Le juge d’appel considère en effet que la clause n’a pas « pour objet de sanctionner l’inexécution de ses obligations par le client, mais est destinée à maintenir l’équilibre financier des contrats à durée déterminée en cas de rupture anticipée de ceux-ci non justifiée par de graves manquements du prestataires ». Dès lors que la caractérisation de clause pénale est écartée, le juge indique ne pas pouvoir réviser et venir moduler son montant, et en fait donc une application en l’état « telle qu’elle est prévue dans les conditions générales ». A noter que les juges d’appel n’ont pas entendu rappeler dans leur attendu en quoi l’absence de caractère indemnitaire ou comminatoire de la stipulation visée était établie, justifiant donc leur décision sur la protection dudit équilibre financier pour les contrats à durée déterminée. Le prestataire avançait dans ses conclusions comme argument que la clause n’aurait « pas vocation à dissuader le client de résilier le contrat avant son terme mais de créer une faculté de dédit ». C’est bien cet argument qui semble donc avoir été suivi par la Cour, sans pour autant que cette dernière l’affirme expressément.
Concernant l’autre stipulation contractuelle dont l’application était contestée par l’exploitant de l’hypermarché, les CGV du prestataire prévoyaient une « clause pénale », selon son propre intitulée, qui impliquait le paiement « d’une indemnité de 15% sur les sommes dues par le client » en cas de non-paiement d’une facture après mise en demeure. La Cour confirme alors la décision des juges de première instance qui avaient considéré que « le montant de 15% fixé dans cette clause est manifestement excessif par rapport au préjudice effectivement subi par [le prestataire de services] et réduit celui-ci à une somme de 5% au vu des montants à juste titre réclamés » des factures impayées. Est en ce sens, est expressément rappelée la faculté du juge de réviser à la hausse ou à la baisse les stipulations, étant elles, bien qualifiées de clause pénale.
Cour d’appel de Paris, Pôle 5 – chambre 5, 5 septembre 2019, n° 17/10883
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