
Une publicité comparative peut-elle être une pratique commerciale déloyale
Le recours à la publicité comparative est fréquent, mais les frontières avec les pratiques commerciales déloyales rendant la publicité comparative illicite, sont parfois ténues, ce qui implique d’être vigilant quant à son usage.
1 – Publicité comparative : définition
Toute publicité comparative est réglementée par les articles L 122-1 et suivants du Code de la consommation.
La réglementation s’applique à toute publicité qui met en comparaison des biens ou services en identifiant, implicitement ou explicitement, un concurrent ou des biens ou services offerts par un concurrent (C. consom. art. L 122-1, al. 1).
Aux termes de l’article L122-1 du Code de la consommation :
« Toute publicité qui met en comparaison des biens ou services en identifiant, implicitement ou explicitement, un concurrent ou des biens ou services offerts par un concurrent n’est licite que si :
1° Elle n’est pas trompeuse ou de nature à induire en erreur ;
2° Elle porte sur des biens ou services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif ;
3° Elle compare objectivement une ou plusieurs caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives de ces biens ou services, dont le prix peut faire partie. »
L’article L. 122-2 du Code de la consommation précise que :
« La publicité comparative ne peut :
1- Tirer indûment profit de la notoriété attachée à une marque «de produits ou de services », à un nom commercial, à d’autres signes distinctifs d’un concurrent ou à l’appellation d’origine ainsi qu’à l’indication géographique protégée d’un produit concurrent ;
2- Entraîner le discrédit ou le dénigrement des marques, noms commerciaux, autres signes distinctifs, biens, services, activité ou situation d’un concurrent ;
3 – Engendrer de confusion entre l’annonceur et un concurrent ou entre les marques, noms commerciaux, autres signes distinctifs, biens ou services de l’annonceur et ceux d’un concurrent ;
4 – Présenter des biens ou des services comme une imitation ou une reproduction d’un bien ou d’un service bénéficiant d’une marque ou d’un nom commercial protégé. »
2 – Publicité comparative illicite : sanctions
Les infractions à la réglementation afférente aux publicités comparatives sont pénalement sanctionnées, le cas échéant, des peines prévues (C. consom. art. L 132-25) :
– en cas de pratique commerciale trompeuse (C. consom. art. L 132-2 s.) ; Sanctions pénales dès lors que la publicité comparative constitue une pratique commerciale trompeuse, l’annonceur encourt une peine d’emprisonnement de deux ans et une amende de 300.000 euros. Le montant de l’amende peut être porté à :10% du chiffre d’affaires moyen annuel, calculé sur les trois derniers chiffres d’affaires annuels connus à la date des faits, ou à 50% des dépenses engagées pour la réalisation de la publicité ou de la pratique constituant le délit.
– en cas de contrefaçon de marque (CPI art. L 716-9 et L 716-12). Les sanctions applicables sont alors de quatre ans d’emprisonnement et 400.000 euros d’amende.
3 – Publicité comparative illicite : exemples
Les exemples de condamnation de sociétés ayant diffusé des publicités comparatives considérées comme illicites sont nombreux :
A été jugé illicite : « une publicité comparative reproduisant par un papier déroulé sur lequel est inscrit dix-huit fois le mot le mot abonnement au pluriel, un petit animal facilement indentifiable comme un coyote ; que dès lors l’allusion est claire pour un consommateur moyen qui comprend qu’il s’agit du système proposé par COYOTE ; que la comparaison est soulignée par le titre en gros caractères « pourquoi payer un abonnement», le Juge des référés du Tribunal de commerce de Nanterre relevant : « que de façon pernicieuse la société INFORAD ne se livre pas à une comparaison directe des appareils mais qu’au contraire elle reste très laconique sur les fonctionnalités de l’appareil qu’elle propose à la vente; que ce laconisme laisse croire à un consommateur moyen qu’il s’agit d’un appareil comparable à celui proposé par COYOTE SYSTEM alors que de l’aveu même d’INFORAD il s’agit d’un appareil ayant des fonctionnalités différentes plus nombreuses semble-t-il pour celui de la société COYOTE ; Que ce manque de précision constitue une tromperie qu’il y aura lieu de faire cesser en statuant dans les termes ci-après». (Ordonnance de référés T. com Nanterre, 5 juillet 2012)
Une campagne publicitaire diffusée à Paris par une société de location de véhicules qui compare les prix de cette société à ceux pratiqués par un concurrent, qui ne précisait pas que la location au prix annoncé n’était possible, le samedi, qu’à la condition de se rendre dans une agence à la périphérie de Paris, a été jugée illicite dans la mesure où l’omission de cette restriction importante étant de nature à induire le consommateur en erreur et l’empêchant de procéder à un constat objectif des différences entre les offres respectives (Cass. com. 1-7-2008 n° 07-15.839 : RJDA 12/08 n° 1317).
Une publicité effectuée par un fabricant d’aspirateurs sans sac comparant l’un de ses aspirateurs à celui d’un concurrent avec la photographie des deux aspirateurs sous laquelle le message suivant était inscrit en gros caractères « X concentre ses efforts sur le silence », a été jugée comme illicite dans la mesure où les juges du fond ont considéré qu’elle est trompeuse car l’affirmation « X concentre ses efforts sur le silence » laisse croire que le fabricant concurrent délaisse la puissance d’aspiration de son appareil, critère essentiel de choix d’un aspirateur, pour ne se concentrer que sur l’absence de bruit, critère de moindre pertinence t (CA Paris 5-11-2010 n° 09/21980 : RJDA 6/10 n° 687).
A été jugée comme illicite une publicité diffusée par le constructeur automobile Renault reprenant le slogan « Qui mieux que Renault peut entretenir votre Renault ? » et dans laquelle des réparateurs, présentés sous une enseigne inexistante, étaient habillés dans des tenues similaires à celles portées par les salariés de centres de réparation automobile implantés en milieu urbain ou périurbain, dans la mesure où les juges du fond ont considéré que les réparateurs, qui incarnaient implicitement l’ensemble des réparateurs appartenant à des centres de réparation automobile ou des garagistes artisans ne faisant pas partie du réseau du constructeur, étaient indéniablement présentés comme ignorants et totalement dépassés par la technologie des véhicules Renault (CA Versailles 16-3-2011 n° 10/00956 : RJDA 8-9/11 n° 741).
Enfin de manière générale, la Cour de cassation a, quant à elle, jugé que, pour que la comparaison effectuée exclusivement en termes de prix soit pertinente pour le consommateur, les produits comparés doivent être identifiés ou désignés avec suffisamment de précision afin de vérifier qu’ils répondent aux mêmes besoins, ce qui n’est pas le cas lorsqu’un tableau comparatif se contente de lister les produits sans autre précision (Cass. com. 31-10-2006 n° 05-10.541 : RJDA 4/07 n° 415).
Au regard des condamnations, qui sont assez nombreuses, il est donc nécessaire de bien maitriser son contenu comparatif, en se faisant assister par un conseil spécialisé dans la phase de validation, ou au contraire lorsqu’une publicité comparative vous vise de manière déloyale, d’agir pour en faire cesser les effets, ou réparer les préjudices subis.
Guillaume Gouachon
Avocat Associé
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