Les avances sur remises sont contraires au monopole bancaire

La Cour de cassation qualifie des avances sur remises d’opération de crédit relevant du monopole bancaire, mais n’annule pas ledit contrat.

L’article L.511-5 du code monétaire et financier interdit la réalisation d’opérations de crédit à titre habituel à toutes personnes autres que les établissements de crédit. Une opération de crédit est définie comme « tout acte par lequel une personne agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la disposition d’une autre personne ou prend, dans l’intérêt de celle-ci, un engagement par signature tel qu’un aval, un cautionnement, ou une garantie. »  Certaines exceptions sont toutefois prévues par l’article L.511-7, I, 1°) du même code, parmi lesquelles le fait « dans l’exercice de son activité professionnelle [de] consentir à ses contractants des délais ou avances de paiement ».

Sur la base de cette exception il avait été admis que des fournisseurs pouvaient réaliser certaines opérations avec leurs distributeurs, comme le fait de consentir un prêt pour l’installation et l’équipement des artisans et commerçants, en contrepartie d’un accord d’approvisionnement. Ces opérations devaient constituer un complément indissociable d’un contrat commercial. Concernant l’octroi de délais de paiement il convenait toutefois de tenir compte des règles spécifiques sur ces derniers, résultant du code de commerce.

En l’espèce une société fabricant des lubrifiants pour véhicules avait conclu un contrat d’approvisionnement avec un distributeur par lequel ce dernier s’engageait à acheter un certain volume de produits. Des remises de fin d’année étaient prévues en fonction des volumes achetés, ainsi qu’une avance sur remises de 30.000 € versée par le fournisseur dès le début du contrat. Cette avance était remboursable en cinq annuités, avec application d’un taux d’intérêt. Si en fin d’année les droits à remise du distributeur étaient inférieurs au montant de l’annuité due, il devait reverser la différence majorée d’un taux de 10% depuis la date de départ du contrat. Le contrat conclu entre les parties utilisait le terme de « prêt », il prévoyait un taux d’intérêt et le fournisseur reconnaissait que c’était une opération qu’il pratiquait régulièrement avec ses distributeurs.

La Cour de cassation a donc qualifié l’opération d’opération de crédit et considérait qu’il ne s’agissait ni de l’octroi d’un délai de paiement, ni de la perception d’avance de paiement. Ce dernier point pourrait être discuté. Il ne s’agit certes pas d’une avance de paiement faite par le distributeur mais bien d’un paiement anticipé de remises dues contractuellement par le fournisseur.

La Cour de cassation relève en outre que dès lors qu’il s’agit d’une opération de crédit, peu importe que celle-ci ait été considérée par les parties comme un complément indissociable de l’engagement d’approvisionnement.

Par contre, la Cour de cassation a considéré que « le seul fait qu’une opération de crédit ait été conclue en méconnaissance de cette interdiction n’est pas de nature à en entrainer l’annulation ». Cette solution pourrait sembler surprenante s’agissant de la violation d’une disposition d’ordre public, sanctionnée pénalement par l’article L.571-3 du Code monétaire et financier. Toutefois elle est conforme à un arrêt d’assemblée plénière (Cass. Ass. Plén., 4 mars 2005, n°03-11.725). L’absence de nullité de l’acte n’empêche par contre pas l’application d’éventuelles sanctions pénales ou disciplinaires.

Il est donc essentiel pour les fournisseurs et les distributeurs de prendre en compte cet arrêt qui, en faisant une application stricte du code monétaire et financier, restreint sensiblement les avantages financiers pouvant être consentis entre fournisseurs et distributeurs.

Cass. Com., 15 juin 2022, n°20-22.160

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