Rupture du contrat d’agent commercial pour faute grave et préavis

La Cour d’appel de Rennes retient dans cette affaire que le mandant peut octroyer un préavis dans le cadre de la rupture du contrat d’agent commercial pour faute grave.

L’article L 134-12 alinéa 1 du code de commerce dispose que « En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi. »

L’article L 134-13 du code de commerce précise toutefois que cette indemnité n’est pas due lorsque la rupture est provoquée par la faute grave de l’agent, ou encore lorsque c’est l’agent qui en a pris l’initiative.

L’article L 134-11 du code de commerce prévoit que chacune des parties peut mettre fin au contrat d’agent commercial moyennant un préavis dont il fixe les modalités de calculs. Il précise : « Ces dispositions ne s’appliquent pas lorsque le contrat prend fin en raison d’une faute grave de l’une des parties ou de la survenance d’un cas de force majeure. »

Dans une affaire portée devant la Cour d’appel de Rennes, le mandant avait mis fin au contrat d’agence commerciale qu’il avait conclu avec son mandataire pour la distribution de vins de Bourgogne.

Le motif de la rupture était diverses fautes graves commises par l’agent. La faute grave est celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d’intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel.

En l’espèce, les fautes graves reprochées étaient les suivantes : 

Front de vente et chiffre d’affaires insuffisants
Comportement agressif à l’égard des salariés du mandant
Non-respect de la politique commerciale et des process administratifs
Manque de motivation pour prospecter

Lorsque le mandant a notifié à son agent la rupture du contrat d’agence commerciale, il lui a accordé un préavis de 3 mois.

En première instance la faute grave a été reconnue, et le tribunal a jugé qu’elle portait atteinte à la finalité commune du mandat d’intérêt commun et rendant impossible le maintien du lien.

Mais l’agent contestait cette analyse, en considérant que la faute grave ne pouvait être retenue, car le fait que le mandant avait accordé un préavis montrait bien que le lien contractuel n’était pas impossible à maintenir. En l’absence de faute grave, l’indemnité compensatrice du préjudice subi du fait de la rupture devait lui être versée.  

L’agent sollicitait en outre une indemnité de préavis, correspondant à 16 jours qui manquaient dans le préavis accordé par le mandant.

La Cour d’appel de Rennes confirme la position du tribunal.

Elle considère qu’au vu de la nature des fautes établies, de leur caractère réitéré et des attaques caractérisées contre le personnel, que le mandant se devait de protéger au titre de ses obligations d’employeur, la décision du mandant d’accorder à l’agent un certain préavis de rupture n’est pas de nature à retirer aux fautes leur caractère de gravité.

En outre, le fait que le mandant, pour gérer au mieux de la situation, ait décidé d’accorder un certain préavis ne le contraignait pas à respecter l’ensemble des dispositions légales afférentes au préavis. 

Selon la Cour, le fait que l’article L134-11 du code de commerce ait pris soin de préciser qu’en cas de faute grave les dispositions imposant un préavis ne sont applicables, induit que faute grave et préavis ne sont pas incompatibles. 

Cette décision est favorable aux mandants, dans la mesure où elle ne les prive pas de la liberté d’accorder un préavis en cas de faute grave. Elle est justifiée dans la mesure où la relation ne serait maintenue que sur une courte période et pour favoriser la transition chez le mandant.

Cependant il convient de faire preuve de prudence dans la fixation du délai, dont la longueur excessive laisserait suggérer le maintien des relations pendant une période plus longue que le nécessaire. Dans ce cas, la juridiction éventuellement saisie pourrait retenir que la faute grave ne serait alors pas constituée. 

Cour d’appel de Rennes, 20 juin 2023, 21/04515 

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