Bail commercial : adjonction d'une activité connexe ou complémentaire par le locataire

Rappel des conditions dans lesquelles une activité peut être adjointe à celle prévue au bail.

Le preneur doit respecter la destination prévue au bail commercial et s’il souhaite modifier, notamment élargir celle-ci, il doit en principe obtenir l’autorisation préalable du bailleur.

Toutefois, la loi prévoit que certaines activités annexes ou accessoires sont incluses par nature dans la destination des locaux et ne nécessitent donc pas d’accord préalable exprès du bailleur :

« Le locataire peut adjoindre à l’activité prévue au bail des activités connexes ou complémentaires.

A cette fin, il doit faire connaître son intention au propriétaire par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, en indiquant les activités dont l’exercice est envisagé. Cette formalité vaut mise en demeure du propriétaire de faire connaître dans un délai de deux mois, à peine de déchéance, s’il conteste le caractère connexe ou complémentaire de ces activités. En cas de contestation, le tribunal de grande instance, saisi par la partie la plus diligente, se prononce en fonction notamment de l’évolution des usages commerciaux. 

Lors de la première révision triennale suivant la notification visée à l’alinéa précédent, il peut, par dérogation aux dispositions de l’article L. 145-38, être tenu compte, pour la fixation du loyer, des activités commerciales adjointes, si celles-ci ont entraîné par elles-mêmes une modification de la valeur locative des lieux loués(art. L 145-47 du Code de commerce)

Cette disposition est d’ordre public, si bien que le bailleur ne peut exclure contractuellement le droit du locataire à cette adjonction.

L’article L. 145-47 du Code de commerce ne donne aucune définition des activités connexes ou complémentaires ni aucun critère d’appréciation et la Cour de cassation affirme le pouvoir souverain des juges du fond dans l’appréciation du caractère connexe ou complémentaire d’une activité au regard de la destination (Cass. 3e civ., 18 mars 1998 : Rev. loyers 1998, p. 539. – Cass. 3e civ., 27 mai 1998 : JCP E 1999, p. 1872). L’appréciation se fait donc au cas par cas, in concreto.

La Cour d’appel de Caen a pu définir l’activité connexe comme celle qui présente une similitude, une analogie ou un lien de dépendance des produits en cause des méthodes de fabrication avec celle exercée dans les lieux, tandis que l’activité complémentaire serait celle qui est susceptible de favoriser le développement de celles déjà exercées sans en modifier la nature (CA Caen, 13 sept. 2012, n° 11/01479 : JurisData n° 2012-026351 : Loyers et copr. 2013, comm. 18).

Dans l’affaire commentée ici, des locaux commerciaux ont été donnés à bail pour l’activité d’entretien et de réparation automobile. La locataire s’était engagée à ne pas exercer l’activité de pneumatique et le bailleur lui garantissait l’exclusivité et la non-concurrence des activités de vente et pose de tous éléments concernant l’échappement et l’amortisseur.

La locataire a par la suite signifié aux bailleurs une demande d’extension d’activité pour la vente, la pose et la réparation pneumatique, sur le fondement de l’article L. 145-47 du code de commerce. Les bailleurs ayant refusé cette demande, la locataire les a assignés en constatation du caractère connexe ou complémentaire de l’activité pneumatique avec celle autorisée par le bail commercial et nullité des clauses du bail interdisant cette activité.

La cour d’appel sur renvoi après cassation, rejette la demande de la locataire. La Cour de cassation approuve la cour d’appel.

Ce sont les motivations des différents arrêts d’appels et de cassation qui sont intéressants :

  • La Cour de cassation rappelle qu’en vertu de l’article L. 145-15 du code de commerce, une clause d’exclusivité et de non-concurrence ne peut faire échec au droit du locataire à exercer une activité connexe ou complémentaire. Une telle clause est nulle et de nul effet.
  • La Cour d’appel de Chambéry met en exergue 2 critères d’appréciation de la notion d’activité connexe ou complémentaire (critères dans la lignée de ceux retenus par la Cour d’appel de Paris dans d’autres affaires) :
    « l’activité pneumatique, qui certes concerne les véhicules tout comme l’entretien et la réparation automobile et est aussi utile à la clientèle d’automobiliste, ne présente pas de rapport objectif étroit avec l’activité initiale et n’est pas non plus nécessaire à un meilleur exercice de l’activité principale. Les usages locaux distinguent facilement les lieux commerciaux
  • Enfin la Cour de cassation rappelle que le bailleur n’est pas tenu de motiver sa contestation, l’important étant qu’il ait manifesté de manière non équivoque son opposition à l’adjonction aux activités autorisées au bail de l’activité envisagée par la locataire dans le délai de deux mois imparti aux termes de l’article L. 145-17 précité.

Cass. 3e civ., 9 févr. 2017, n° 15-28.759, FS-P+B : JurisData n° 2017-001906

 

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