Un inventaire des charges, sans clé de répartition, n’est pas précis et limitatif

Depuis la loi dite PINEL, le bail commercial doit comporter un « inventaire précis et limitatif des catégories de charges et impôts ». Tel n’est pas le cas du bail qui ne comporte pas de clé de répartition expresse des charges. Une charge ne peut donc être refacturée que si son mode de répartition est prévu contractuellement. 

Un des principaux objectifs poursuivis par la loi PINEL du 18 juin 2014 est que le preneur connaisse précisément, au moment où il s’engage, les charges et taxes dont il doit s’acquitter en sus des loyers.

En pratique, dans un immeuble ou un ensemble immobilier, en copropriété, ou faisant partie d’une AFUL ou d’une ASL, les charges sont réparties entre plusieurs propriétaires suivant des clés de répartition. Sur la base des sommes qui leurs sont facturées, les bailleurs procèdent alors à une refacturation des charges auprès de leurs locataires.

Dans de telles hypothèses, il apparait qu’une simple liste des charges refacturables, dressée lors de la conclusion du bail, ne suffit pas à informer « précisément » et « limitativement » le preneur.

En ce sens, il ressort de plusieurs jurisprudences récentes que les refacturations ne sont possibles que si la clé de répartition des charges entre les différents occupants a été portée à la connaissance et, acceptée, par le preneur lors de la conclusion du bail.

La Cour d’appel de Paris considère que :

« Lorsqu’aucune clause du bail ne prévoit le mode de répartition des charges entre deux occupants de l’immeuble, les bailleurs ne peuvent unilatéralement procéder à la répartition des coûts entre les deux locataires, faute de stipulations expresses acceptées par les parties. Faute de clé de répartition contractuelle, les dépenses ne sont pas recouvrables sur la société preneuse ».

Cour d’appel Paris, pôle 5, ch. 3, 15 mai 2019, n° 17/19177, M. X. c/ SARL Austins’s Hotel

La même Cour précise que, si le bail prévoit une clé de répartition unique pour l’ensemble des charges, le bailleur ne peut pas appliquer une clé distincte en fonction des différents types de charges et ce, même en présence d’un sous compteur.

« la clé de répartition mentionnée visant l’ensemble des charges afférentes aux locaux loués sans qu’il ne soit prévu une clé distincte pour tenir compte de l’existence de sous-compteur » est la seule applicable, de sorte que « la circonstance que le restaurant est équipé d’un sous-compteur ne suffit pas à justifier la répartition telle que pratiquée par le bailleur en l’absence de stipulation expresse du bail dérogeant à la seule clé de répartition exprimée » (Cour d’appel de Paris, Pôle 5 – chambre 3, 7 avril 2021, n° 18/28634)

La Cour d’appel de Bordeaux va plus loin lorsqu’elle impose de prévoir, non seulement « une clé de répartition entre les différents locataires » mais également la « quote-part » pesant sur le locataire. Ainsi,

« L’énumération des catégories de charges à la seule charge du preneur, sans aucune clé de répartition entre les différents locataires de l’immeuble et sans clé explicite de la quote-part du preneur, ne constitue pas un inventaire précis et limitatif au sens de l’article L. 145-40-2 susceptible de permettre au preneur d’avoir une visibilité dès la date de conclusion du bail sur les charges qu’il devra assumer ». (Cour d’appel de Bordeaux, 4e ch. civ. 2 mars 2022, n°18/04413, Sté civile de Placement Immobilier de Bordeaux c/ Sté Institut d’Ostéopathie de Bordeaux)

Il ressort de ces décisions que, conformément à l’esprit de la loi PINEL qui exige un inventaire précis et limitatif, les stipulations contractuelles ne doivent pas être équivoques.

A défaut de précision d’une clé de répartition et des charges concernées par cette clé, le bailleur n’est pas fondé à procéder à leur refacturation auprès du preneur.

En conséquence, le preneur peut s’opposer au paiement des charges appelées par le bailleur qui ne seraient pas calculées suivant une clé de répartition contractuellement fixée, mais également, solliciter le remboursement des charges qu’il aurait payées à tort.

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