L'Equipe n'a pas abusé de sa position dominante
mercredi 11 décembre 2024

L'Equipe n'a pas abusé de sa position dominante

Le Kiosque.fr n’arrive pas à démontrer le caractère excessif de la nouvelle rémunération sollicitée par L’Equipe, ni la mesure dans laquelle l'acceptation d'une telle condition financière entraverait son activité ou réduirait sa rentabilité. La Cour a conclu que L'Equipe n'a pas abusé de sa position dominante.  

La SAS Le Kiosque.fr, opérant sous le nom commercial Cafeyn, distribue des titres de presse en format numérique. Cette société, éditrice du quotidien sportif L'Equipe, a été accusée par Le Kiosque.fr d'avoir abusé de sa position dominante sur le marché de la presse quotidienne nationale d'information sportive. Le Kiosque.fr a reproché à L'Equipe d'avoir tenté d'imposer des conditions tarifaires excessives et d'avoir mis fin de manière abusive à leur relation commerciale. 

Le litige a commencé lorsque L'Equipe a informé Le Kiosque.fr de sa volonté de ne pas renouveler leur contrat de diffusion, invoquant une redéfinition de sa stratégie commerciale. Le Kiosque.fr s'est opposée à cette résiliation et a saisi le tribunal de commerce de Paris, alléguant un abus de position dominante et des pratiques restrictives de concurrence. Le tribunal ayant rejeté les demandes de Le Kiosque.fr, celle-ci a interjeté appel. 

Le Kiosque.fr a fondé cumulativement son action pour abus de position dominante sur les dispositions des articles 102 du TFUE et L 420-2 du code de commerce. 

Par ailleurs, en vertu de l'article L 420-1 du code de commerce, sont prohibées même par l'intermédiaire direct ou indirect d'une société du groupe implantée hors de France, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions, notamment lorsqu'elles tendent à : 

1° Limiter l'accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises ; 

2° Faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse ; 

3° Limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements ou le progrès technique ; 

4° Répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement. 

Et, en application de l'alinéa 1 de l'article L 420-2 du même code, est prohibée, dans les conditions prévues à l'article L420-1, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises d'une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales établies, au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées. 

Les conditions d'application de ces textes supposent celle d'une position dominante d'une entreprise sur un marché, qui n'est pas critiquable en soi, et d'un abus de celle-ci.  

La Cour d'appel a donc apprécié le marché pertinent et l’existence d’une position dominante : 

- définition du marché pertinent : la Cour, s'appuyant sur l'avis de l'Autorité de la concurrence, a considéré que le marché pertinent est celui de la presse quotidienne nationale d'information sportive, incluant les versions papier et numérique en format PDF ; 

- position dominante de L'Equipe : la Cour a conclu que L'Equipe occupe une position dominante sur ce marché, en raison de sa notoriété et de l'absence de concurrents directs offrant des produits substituables. 

La cour a rappelé que la notion d'abus d'exclusion recouvre les comportements d'une entreprise en position dominante qui sont de nature à influencer la structure d'un marché où, à la suite précisément de la présence de l'entreprise en question, le degré de concurrence est déjà affaibli. Sont ainsi visés les actes destinés à empêcher un concurrent réputé aussi efficace de se développer ou d'entrer sur le marché sinon à l'en exclure, par exemple des accords d'exclusivité, des rabais de fidélité, des ventes liées ou groupées, des prédations tarifaires, des refus de vente ou des compressions de marges. 

L'abus allégué par Le Kiosque.fr réside dans la tentative de L'Equipe de lui imposer, dans le cadre de la renégociation des conditions de leur partenariat et sous la menace réitérée de sa rupture, une hausse de sa rémunération de 84 %. 

La Cour considère que Le Kiosque.fr n’arrive pas à démontrer le caractère excessif de la nouvelle rémunération sollicitée, ni la mesure dans laquelle l'acceptation d'une telle condition financière entraverait son activité ou réduirait sa rentabilité.  

Ainsi, la Cour a conclu que L'Equipe n'a pas abusé de sa position dominante

- La Cour a ensuite analysé les accusations de refus de vente discriminatoire.  

Au sens du droit des pratiques anticoncurrentielles, les pratiques discriminatoires peuvent être restrictives de concurrence lorsqu'elles ont pour objet ou pour effet d'évincer un concurrent du marché ou quand des clients de l'entreprise en position dominante se voient désavantagés dans la concurrence sur leur propre marché. 

La Cour a considéré qu’aucun abus n'étant imputable à cet égard à L'Equipe, qui demeure libre de contracter avec le partenaire de son choix ou de s'autodiffuser pour recentrer son activité les abonnements directs et mieux contrôler ses sources de revenus conformément à l'article 1102 du code civil, son refus est justifié par des éléments tangibles et vérifiables. 

Et, outre le fait que l'attractivité du titre L'Equipe, comme son caractère incontournable sur le marché de la presse d'information sportive, n'est pas en soi de nature à imposer à son éditeur une obligation de contracter, ce quotidien n'est pas indispensable à l'activité de Le Kiosque.fr qui, sur le marché distinct et plus large des kiosques numériques, s'est développée sans lui pendant plus de dix ans et s'est poursuivie après l'arrêt de sa diffusion. 

Ainsi, le refus de contracter opposé par L'Equipe, conséquence mécanique de l'échec des négociations, n’était ni abusif ni discriminatoire. 

Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - Chambre 4, 15 mai 2024, RG n° 22/12917

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