Mise en œuvre de bonne foi d’une clause résolutoire par un franchiseur
jeudi 17 octobre 2019

Mise en œuvre de bonne foi d’une clause résolutoire par un franchiseur

La Cour d’appel de Paris vient apporter d’utiles rappels et précisions sur la mise en œuvre d’une clause résolutoire par un franchiseur, en jugeant que celle-ci n’est pas intervenue de manière abusive et que le franchiseur n’a pas fait preuve de mauvaise foi, dans un arrêt en date du 10 avril 2019.

Les faits de l’espèce étaient les suivants. Une société spécialisée dans le secteur d'activité de la location de véhicules automobiles utilitaires et de tourisme a conclu avec une autre société un contrat de franchise portant sur l'activité de location de véhicules pour une durée déterminée de 5 années.

Par la suite, le franchisé a fait part au franchiseur de son intention de céder son fonds de commerce de location de véhicules. Le franchisé ayant refusé une offre du franchiseur qu’il n'estimait pas au prix du marché, les relations entre les parties se sont dégradées. Estimant le franchisé redevable de factures impayées à son égard, le franchiseur a notifié la résiliation du contrat de franchise.

Le franchisé a alors assigné le franchiseur devant le Tribunal de commerce de Paris en vue de voir engagée sa responsabilité contractuelle sur fondement de la rupture abusive et de le voir condamné à réparer le préjudice que le franchisé estimait avoir subi.

En première instance, le Tribunal de commerce de Paris, sans remettre en cause la résiliation du contrat de franchise, juge que le franchiseur a manqué à son devoir de loyauté et le condamne à verser au franchisé une somme de 20.000 euros au titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de franchise. Le Tribunal relevait que le franchiseur n’avait fourni aucune explication à cette exigence soudaine de paiement sans aucun délai alors même qu’il était au courant des difficultés enregistrées par son franchisé (la créance du franchiseur s’élevait à environ 2.300 €). Selon le Tribunal, il apparaissait qu’ayant jugé que les relations avec son franchisé n’avaient pas d’avenir et que celle-ci avait refusé de céder son fonds à des conditions qui lui paraissaient à lui acceptables, le franchiseur avait souhaité accélérer le processus de résiliation du contrat de franchise.

Le franchisé a toutefois fait appel de ce jugement et demandait notamment à la Cour d’appel de Paris de constater à nouveau que le franchiseur avait résilié le contrat de franchise de manière déloyale et abusive, et de le condamner à une somme totale de plus d’un million d’euros au titre de dommages-intérêts.

Pour apprécier si le contrat de franchise avait été résilié de manière déloyale, la Cour d’appel va reprendre point par point le processus de résiliation engagé par le franchiseur, en relevant :

  • (i) que le contrat de franchise stipulait une clause permettant au franchiseur de résilier le contrat, en cas de d’inexécution ou de manquement par le franchisé à l’une de ses obligations (précisément définies dans le contrat) après une mise en demeure préalable restée sans effet pendant 30 jours ; 
  • (ii) que le franchiseur a adressé au franchisé une lettre recommandée avec accusé de réception dans laquelle il mettait en demeure le franchisé de payer sous 8 jours la somme due, au visa de la clause résolutoire du contrat de franchise ;
  • (iii) qu’étaient joints à cette mise en demeure les relevés d’échéance de la somme due ;
  • (iv) que plus de 30 jours après l’envoi de la mise en demeure, le franchiseur a notifié au franchisé la résiliation du contrat de franchise au visa de la clause résolutoire du contrat de franchise.
  • (v) la Cour d’appel note également que cette lettre de résiliation rappelait en outre quelles étaient les conséquences de l'expiration du contrat et l'existence des clauses de non-concurrence, de non affiliation et de secret, stipulées au contrat de franchise.
  • (vi) enfin, la Cour d’appel relève que les éléments versés aux débats par le franchisé étaient inopérants à démontrer le principe et le montant des créances invoquées par ce dernier pour que soit opérée une compensation.

Ainsi, selon la Cour, contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal de commerce de Paris, le franchiseur n'a pas rompu le contrat de franchise de manière abusive et n'a pas fait preuve de mauvaise foi dans la mise en œuvre de la clause résolutoire figurant dans ledit contrat.

Le franchisé est ainsi débouté de l’ensemble de ses demandes indemnitaires et condamné à payer au franchiseur les sommes restant dues au titre des redevances de franchise impayées.

Si cet arrêt montre qu’il n’y a pas, en soi, déloyauté à résilier un contrat, quand bien même la créance à l’origine de la résiliation serait d’un faible montant, il rappelle aussi utilement qu’un contrôle de la bonne foi dans l’exécution des clauses résolutoires, est exercé par les juges.

Ce contrôle opéré par les juges du fond s’inscrit dans la jurisprudence de la Cour de cassation, qui avait pu juger dans un arrêt du 31 janvier 1995 publié au Bulletin, que les conventions devant être exécutées de bonne foi, une clause résolutoire n'est pas acquise si elle a été mise en œuvre de mauvaise foi par le créancier.

Il conviendra donc d’être attentif au respect de cette exigence de bonne foi en cas de résiliation du contrat de franchise, et bien-sûr, au respect des conditions, notamment formelles, prévues dans la clause résolutoire.


CA Paris, 10 sept. 2019, n° 16/12542

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