
Déplafonnement du loyer commercial
Le loyer d’un bail commercial doit correspondre à la valeur locative.
Ce principe a une exception, le mécanisme du « plafonnement » lequel est destiné à protéger l’activité du locataire.
Cette exception peut être écartée par le bailleur ; le loyer est alors déplafonné.
Nous évoquerons ci-après les motifs de déplafonnement du loyer.
Le premier motif est la durée du bail commercial dont le renouvellement est envisagé
L’article L. 145-34 du Code de commerce prévoit que le loyer peut être déplafonné lorsque le bail commercial expiré a duré plus de neuf années ou a été prorogé tacitement au-delà d’une durée de douze années.
Le loyer commercial est automatiquement déplafonné si la durée du bail commercial initial est supérieure à 9 années.
Le loyer est également déplafonné si la durée de la relation contractuelle à laquelle il a été mis fin par l’effet du congé ou de la demande de renouvellement à plus de 12 années.
Ainsi, un bailleur qui souhaite augmenter le loyer à la valeur locative a tout intérêt à attendre l’expiration de la durée de 12 années avant de mettre un terme à la relation locative par la signification d’un congé avec offre de renouvellement.
Le deuxième motif de déplafonnement est la modification notable des éléments déterminant une valeur locative
Le déplafonnement du loyer est autorisé par l’article L. 145-34 du Code de commerce en cas de modification notable des critères mentionnés aux 1° à 4° de l’article L. 145-33 du même Code, à savoir les caractéristiques du lieu loué, la destination des lieux, les obligations respectives des parties ou les facteurs locaux de commercialité.
La modification de ces éléments, qui est appréciée souverainement par les juges, doit s’être réalisé au cours du bail commercial expiré.
Les évolutions future, envisagées, ou non achevées, sont écartées.
Si le bail comporte une clause d’accession, les améliorations au sens de l’article R. 145-8 du Code de commerce sont susceptibles d’entraîner une augmentation du loyer lors du 2ème renouvellement après leur réalisation.
Si la modification notable a fait l’objet d’une contrepartie financière au cours du bail commercial expiré, le bailleur reste en mesure de l’invoquer lors du renouvellement pour provoquer le déplafonnement du loyer.
La Cour de cassation veille à ce que la modification notable ait un intérêt pour le commerce considéré ou l’activité exercée par le preneur.
Ainsi, les modifications notables des facteurs locaux de commercialité ne peuvent être retenues si elles n’ont pas une incidence favorable sur le commerce exercé par le preneur.
En toute hypothèse, toute modification défavorable exclut le déplafonnement et la fixation du loyer à la valeur locative.
Déplafonnement pour modification des caractéristiques du local
La modification peut concerner les caractéristiques du local considéré.
Il faut entendre par caractéristiques :
- la situation du local dans l’immeuble dont il dépend,
- sa surface, la ventilation de celle-ci (partie accessible au public ou non),
- son volume, son adaptabilité à l’activité autorisée à la clause destination,
- son accessibilité,
- l’état d’entretien, notamment des équipements,
- sa conformité aux normes.
Comme vu plus haut, si les travaux sont susceptibles de constituer des améliorations au sens de l’article R. 145-8 du Code de commerce, ils ne seront pris en considération que lors du 2ème renouvellement.
Déplafonnement pour modification de la destination contractuelle du local
La modification peut concerner la destination contractuelle, surtout si elle a été effectuée sans autorisation du bailleur.
Si la modification de la destination est liée à l’évolution de l’activité d’origine alors elle ne constitue pas une cause de déplafonnement.
Ainsi, le fait pour une pharmacie d’exercer l’activité de vente de produits de parapharmacie n’entraîne pas de déplafonnement car la parapharmacie est autorisée par la Loi applicable à la pharmacie.
Déplafonnement pour modifications juridiques et financières des parties
La modification juridique et financière des Parties peut constituer un motif de déplafonnement.
Il peut s’agir d’une obligation qui a été transférée au locataire ou, au contraire, d’une obligation dont il a été déchargé au cours du bail commercial expiré.
La fixation conventionnelle d’un nouveau loyer à la hausse ou à la baisse est un motif justifiant le déplafonnement.
Des modifications aggravant les charges de l’une ou l’autre partie peuvent être retenues. La jurisprudence considère par exemple que l’augmentation importante de l’impôt foncier est susceptible de justifier le déplafonnement.
Déplafonnement pour modification des facteurs locaux de commercialité
La modification des facteurs locaux de commercialité définis à l’article R. 145-6 du Code de commerce est une cause du déplafonnement du loyer.
La modification des facteurs est généralement attestée par l’évolution de la commercialité à raison :
- de l’augmentation de la population,
- de constructions nouvelles,
de la création de nouveaux moyens de transport ou de parking, - de la transformation des aménagements publics,
- du chiffre d’affaires,
- des cessions et de leurs prix,
- de la situation des concurrents.
Déplafonnement lié à la nature du bien
Enfin, le troisième motif de déplafonnement est lié à la nature du bien loué.
Les terrains nus bénéficient du statut protecteur des baux commerciaux sous certaines conditions.
Par application de l’article L 145-36 du Code de commerce, la fixation de leur loyer n’est pas soumise au mécanisme du plafonnement.
Echappent également au plafonnement les locaux construits en vue d’une seule utilisation, autrement dénommés « locaux monovalents », à savoir notamment les Cinémas, théâtres, garages, garages hôtels, cliniques et hôtels.
Ces locaux ne peuvent être affectés à une autre activité sans des travaux coûteux et nombreux
Les locaux à usage exclusif de bureaux ne sont pas soumis au mécanisme du plafonnement. Le loyer de ces locaux est fixé selon l’article R. 145-11 du Code de commerce par référence au prix pratiqué pour des locaux équivalents sauf à être corrigé en considération des différences constatées entre le local loué et les locaux de référence.
La jurisprudence a considéré que l’activité de bureau n’est pas incompatible avec la réception de clientèle.
Les bureaux/boutiques (agences bancaires, agences de voyages, agences immobilières …) rentrent donc dans la catégorie des bureaux.
En conclusion, nous attirons votre attention sur les deux observations suivantes :
– première observation : la question du déplafonnement ne se pose pas si les Parties ont expressément convenu que le loyer, lors du renouvellement du bail commercial, sera exclusivement fixé selon les indices et leur évolution.
Dans une telle hypothèse, le dispositif du plafonnement s’applique et les parties s’interdisent d’invoquer l’un des motifs de déplafonnement du loyer prévus aux articles L 145-33 et L. 145-34 du Code de commerce.
– Deuxième observation : la règle du « plafonnement du déplafonnement », prévue à l’article L. 145-34 du Code de commerce, en son alinéa 4, prévoit que l’augmentation consécutive au déplafonnement “ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l’année précédente”.
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