Comment passer d’un loyer de 130 000 euros à 83 000 euros ?

Le cabinet Gouache Avocats a obtenu une décision du juge des loyers commerciaux particulièrement favorable pour un locataire qui a vu le loyer de son bail renouvelé baisser de près de 40 % !

Par une décision rendue le 14 septembre 2023, le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Versailles a fixé le loyer d’un bail renouvelé en février 2021, à la somme annuelle de 81 292,47 euros hors charges et hors taxes, alors que le bail avait initialement été conclu moyennant un loyer annuel en principal de 120 000 euros.

Bien plus, en fin de bail, par le jeu de l’indexation, le loyer s’élevait à près de 130 000 euros en principal.

En l’espèce, les locaux se situaient dans un centre commercial.

Nous savons que l’article L. 145-33 du code de commerce prévoit que :

« Le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative.

A défaut d’accord, cette valeur est déterminée d’après :

1 Les caractéristiques du local considéré ;
2 La destination des lieux ;
3 Les obligations respectives des parties ;
4 Les facteurs locaux de commercialité ;
5 Les prix couramment pratiqués dans le voisinage ;

Un décret en Conseil d’Etat précise la consistance de ces éléments ».

Il s’agit de la valeur locative « statutaire » (telle qu’issue de la méthode de fixation prévue par le statut des baux commerciaux), ou autrement appelée la valeur locative « code de commerce ».

Elle se différencie de la valeur locative de « marché », issue de l’accord des parties, reflétant l’offre et la demande.

En posant le principe selon lequel le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative, il apparaît simple, pour un locataire de faire fixer le loyer de son bail renouvelé à un loyer inférieur au dernier loyer en vigueur, voire même à un loyer inférieur au montant du loyer initial. 

Il convient simplement de démontrer que cette valeur locative est inférieure aux loyers sus évoqués (Pour illustration : Cass. 3ème civ., 5 février 1992, n° 90-10554 ; Cass. 3ème civ., 16 juin 2004, n° 02-21523).

Il n’existe pas de limite minimale pour fixer le loyer du bail renouvelé, si ce n’est précisément celle de la valeur locative.

La Cour de cassation a d’ailleurs précisé que lorsque le locataire demande que le loyer du bail renouvelé soit fixé à un montant inférieur à celui du loyer indexé, la juridiction saisie doit rechercher d’office si le loyer du bail renouvelé correspond à la valeur locative (Cass. 3ème civ., 5 nov. 2014, n° 13-21990 ; Cass. 3ème civ., 12 novembre 2020, n° 18-25967).

En revanche, lorsque le bailleur entend voir fixer un nouveau loyer, qui est supérieur à la variation des indices, il doit réussir, sauf si la durée du bail a été supérieure à douze ans, à mettre un évidence un motif de déplafonnement, ce qui n’est pas toujours aisé.

Dans la décision commentée, le loyer du bail renouvelé a été fixé à une valeur drastiquement inférieure au dernier loyer en vigueur, mais également au loyer du bail initial.

Pour ce faire, la juridiction versaillaise a suivi les solutions posées par la Cour de cassation dans ces récents arrêts relatifs aux abattements pour transfert de charges et ce, même lorsque les éléments de référence comportent les mêmes transferts de charges, notamment en centres commerciaux, comme c’était le cas en l’espèce (Cass. 3ème civ., 23 mai 2019, n° 18-14917 ; Cass. 3ème civ., 8 avril 2021, n° 19-23183 ; Cass. 3ème civ., 24 novembre 2021, n° 20-21570 ; Cass. 3ème civ., 25 janvier 2023, 21-21.943).

En effet, le montant du loyer est notamment déterminé au regard des obligations respectives des parties.

Rappelons que l’article R. 145-8 du code de commerce dispose que :

« Du point de vue des obligations respectives des parties, les restrictions à la jouissance des lieux et les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci se serait déchargé sur le locataire sans contrepartie constituent un facteur de diminution de la valeur locative. Il en est de même des obligations imposées au locataire au-delà de celles qui découlent de la loi ou des usages. Les améliorations apportées aux lieux loués au cours du bail à renouveler ne sont prises en considération que si, directement ou indirectement, notamment par l’acceptation d’un loyer réduit, le bailleur en a assumé la charge.

Les obligations découlant de la loi et génératrices de charges pour l’une ou l’autre partie depuis la dernière fixation du prix peuvent être invoquées par celui qui est tenu de les assumer.

Il est aussi tenu compte des modalités selon lesquelles le prix antérieurement applicable a été originairement fixé ».

Après avoir procédé à une pondération des surfaces et estimé une valeur locative unitaire, le juge des loyers n’a pas manqué de pratiquer les abattements nécessaires au regard de la clause d’accession différée en fin de jouissance, mais également du transfert de charges exorbitantes et de la taxe foncière sur le preneur.

De plus, le magistrat a rappelé, conformément à la demande du preneur, que la décision rendue était un titre exécutoire qui permet au créancier d’agir à ses risques et péril en exécution forcée pour recouvrer le trop-perçu de loyer sous réserve du recours au droit d’option prévu par l’article L. 145-57 du code de commerce.
Il s’agit ainsi d’une décision motivée et complète !


TJ Versailles, Bx. com., 14 septembre 2023, n° 22/04574

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