COVID -19 : Fermeture non obligatoire : peut-on demander l’annulation des loyers ?
mardi 21 avril 2020

COVID -19 : Fermeture non obligatoire : peut-on demander l’annulation des loyers ?

Vous avez fermé votre point de vente, non pas parce que vous étiez y étiez obligé par les arrêtés des 14 et 15 mars relatifs à la pandémie de Coronavirus Covid-19, mais parce que vous l'avez décidé, les mesures de confinement vous privant de votre clientèle habituelle, et/ou, parce que vous n'étiez pas en mesure d'assurer la sécurité de vos salariés. Pouvez-vous dans ce cas soulever la force majeure pour ne pas payer votre loyer ?  

Le Coronavirus Covid-19 constitue-t-il un cas de force majeure ?  

La force majeure est un évènement extérieur, imprévisible et irrésistible qui empêche l’exécution du contrat (art. 1218 du Code civil). Le fait du prince, à savoir un acte des pouvoirs publics constituant un obstacle absolu et insurmontable à l'exécution d'obligations conventionnelles ou légales est un cas de force majeure. Lorsque l'établissement est visé par l'obligation de fermeture du fait de la pandémie de Coronavirus COVID-19, le fait du prince peut aisément être démontré. 


Un arrêt admet même que le fait d’être mis dans l’impossibilité de continuer son activité dans les mêmes conditions par le fait du Prince est un cas de force majeure. Pour mémoire, il s’agissait de  l’hypothèse d’une clinique, dont le siège se trouvait en Guadeloupe, et qui avait reçu de l’autorité administrative l’ordre d’évacuer ses locaux, en raison d’un risque d’éruption du Volcan la Soufrière, et de les transférer dans d’autres bâtiments plus éloignés du Volcan, mais non conçus pour abriter la totalité de ses activités, ce qui l’a conduite à licencier du personnel ou à suspendre des contrats de travail. La Cour d’appel avait jugé qu’il n’y avait pas impossibilité absolue d’exécution, mais sa décision est cassée parce qu’elle avait bien été mise dans l’impossibilité de continuer de fonctionner dans les mêmes conditions qu’auparavant (Cass. Soc. 19 nov. 1980 n° de pourvoi 78-41574) :

Face à la pandémie de Coronavirus-COVID-19, le gouvernement s’est résolu à prendre plusieurs mesures radicales restreignant la liberté du commerce et de l’industrie et notamment la fermeture des lieux accueillant du public par arrêtés des 14 et 15 mars 2020. Toutefois, les ERP de la catégorie M sont autorisés à maintenir leurs activités de "livraison et de retraits de commande" et, par exception ils peuvent rester ouverts au public pour les seules activités figurant en annexe 1 de l’arrêté (dont : alimentation générale, pain, pâtisserie et confiserie en magasin spécialisé).

Liste exhaustive des commerces autorisées à rester ouverts au public :
      

  • Entretien et réparation de véhicules automobiles, de véhicules, engins et matériels agricoles
  • Commerce d'équipements automobiles
  • Commerce et réparation de motocycles et cycles
  • Fourniture nécessaire aux exploitations agricoles
  • Commerce de détail de produits surgelés
  • Commerce d'alimentation générale
  • Supérettes
  • Supermarchés
  • Magasins multi-commerces
  • Hypermarchés
  • Commerce de détail de fruits et légumes en magasin spécialisé
  • Commerce de détail de viandes et de produits à base de viande en magasin spécialisé
  • Commerce de détail de poissons, crustacés et mollusques en magasin spécialisé
  • Commerce de détail de pain, pâtisserie et confiserie en magasin spécialisé
  • Commerce de détail de boissons en magasin spécialisé
  • Autres commerces de détail alimentaires en magasin spécialisé
  • Les distributions alimentaires assurées par des associations caritatives
  • Commerce de détail de carburants en magasin spécialisé
  • Commerce de détail d'équipements de l'information et de la communication en magasin spécialisé
  • Commerce de détail d'ordinateurs, d'unités périphériques et de logiciels en magasin spécialisé
  • Commerce de détail de matériels de télécommunication en magasin spécialisé
  • Commerce de détail de matériaux de construction, quincaillerie, peintures et verres en magasin spécialisé
  • Commerce de détail de journaux et papeterie en magasin spécialisé
  • Commerce de détail de produits pharmaceutiques en magasin spécialisé
  • Commerce de détail d'articles médicaux et orthopédiques en magasin spécialisé
  • Commerces de détail d'optique
  • Commerce de détail d'aliments et fournitures pour les animaux de compagnie
  • Commerce de détail alimentaire sur éventaires et marchés
  • Commerce de détail de produits à base de tabac, cigarettes électroniques, matériels et dispositifs de vapotage en magasin spécialisé
  • Vente par automates et autres commerces de détail hors magasin, éventaires ou marchés n. c. a.
  • Hôtels et hébergement similaire
  • Hébergement touristique et autre hébergement de courte durée lorsqu'il constitue pour les personnes qui y vivent un domicile régulier
  • Terrains de camping et parcs pour caravanes ou véhicules de loisirs lorsqu'ils constituent pour les personnes qui y vivent un domicile régulier
  • Location et location-bail de véhicules automobiles
  • Location et location-bail d'autres machines, équipements et biens
  • Location et location-bail de machines et équipements agricoles
  • Location et location-bail de machines et équipements pour la construction
  • Activités des agences de placement de main-d'œuvre
  • Activités des agences de travail temporaire
  • Réparation d'ordinateurs et de biens personnels et domestiques
  • Réparation d'ordinateurs et d'équipements de communication
  • Réparation d'ordinateurs et d'équipements périphériques
  • Réparation d'équipements de communication
  • Blanchisserie-teinturerie
  • Blanchisserie-teinturerie de gros
  • Blanchisserie-teinturerie de détail
  • Services funéraires
  • Activités financières et d'assurance 

A noter que certains ERP ne sont pas visés comme devant fermer. C’est la catégorie W par exemple, sous laquelle les agences immobilières notamment sont usuellement autorisées à recevoir du public.

Pour tous ces commerces, la fermeture ne résulte pas du fait du prince, et donc d’un cas de force majeure qui affecterait l’obligation de délivrance du bailleur (article 1719 du code civil) dont il est rappelé qu’elle oblige le bailleur à délivrer au locataire un local apte à l’exercice de l’activité autorisée à la clause destination du bail et donc un local ouvert au public et à le faire jouir paisiblement le locataire pendant la durée du bail.

La conjonction de raisons qui a conduit dans ce cas le preneur a devoir cesser son exploitation résulte :

- de la pandémie de COVID 19 qui constitue un cas de force majeure ;
- de mesures légales prises pour lutter contre celle-ci.

La question est de savoir si la pandémie de COVID19 est susceptible d’empêcher les parties au bail de louer et d’exploiter le local dans des conditions normales, conformément à ce qui a été prévu au bail, dès lors que couplée à des mesures administratives affectant votre activité, il est impossible d’exploiter votre activité dans vos locaux.

Certains bailleurs contestent le caractère de force majeure de la pandémie du Covid-19, en se fondant sur des arrêts qui auraient écarté le caractère de force majeure pour des épidémies virales de moindre envergure. Mais la pandémie de COVID 19 n’a rien à voir avec les pandémies précédentes. En outre, la pandémie s’accompagne de mesures administratives de confinement qui viennent renforcer le caractère irrésistible de l’événement en empêchant toute exploitation dans le local conformément à sa destination.

Il est vrai que certaines épidémies n’ont pas rempli les conditions de la force majeure : elles ont été jugées imprévisibles ou irrésistibles. Ce fut le cas du chikungunya, le juge considérant que « cette maladie soulagée par des antalgiques est généralement surmontable » (Cour d'appel de Basse-Terre, 17 décembre 2018 n° 17/00739) ou la dengue (Cour d'appel de Nancy, 22 novembre 2010 n° 09/00003)  pour laquelle « des mesures de protection individuelles à respecter, tels que l'utilisation de moustiquaires et de répulsifs ainsi que le port de vêtements longs » permettent d’y résister.

Les juges retiennent en revanche que d’autres épidémies sont des cas de force majeure. Le caractère potentiellement mortel d’un virus est pris en considération. Ainsi, à propos de l’épidémie d’Ebola, la Cour d’appel de Paris, par arrêt du 17 mars 2016 (RG 15/04263) a admis qu’elle pouvait être considérée « comme un cas de force majeure ». De même, s’agissant de l’épidémie de Covid-19, les décisions se multiplient, qui reconnaissent qu’elle constitue un cas de force majeure.

Ainsi la Cour d’appel de Colmar vient d’admettre que la non-comparution d’un prévenu à l’audience à cause du Covid-19 était un cas de force majeure, car  « ces circonstances exceptionnelles, entraînant l'absence de M. G. à l'audience de ce jour revêtent le caractère de la force majeure, étant extérieures, imprévisibles et irrésistibles » (Colmar, 6e ch., 12 mars 2020, n° 20/01098). 

Il en va de même pour la Cour d’appel de Bordeaux, dans un arrêt du 19 mars 2020 (RG n° 20/0142), où « en raison de l'actuelle pandémie du coronavirus », le prévenu n’a pu se déplacer, ce qui est considéré par la Cour d’appel comme des éléments de force majeure et des circonstances insurmontables.   

Il faut aussi souligner que deux ordonnances prises par le gouvernement dans le contexte de l’état d’urgence sanitaires lié au COVID 19 visent la force majeure alors que l’une la reconnaît expressément. C’est d’ailleurs ce qu’avait relevé Bruno LEMAIRE, lors d’une conférence de presse le 28 février dernier : cette pandémie doit être considérée pour les entreprises comme un cas de force majeure pour l’exécution des marchés publics.

Donc, cette épidémie de COVID 19, imprévisible au jour de la conclusion de votre bail, irrésistible car susceptible d’être mortelle même pour des sujets jeunes, et  aucune mesure, même les gestes barrières, ne permettant de s’en préserver à coup sûr, peut être considérée comme un cas de force majeure.

De toute façon, à la pandémie s’ajoute des mesures de fait du prince.

En premier lieu, celle ordonnant le confinement. Dans le contexte de la lutte nationale contre la pandémie de Covid 19, le décret du 16 mars 2020 interdit les déplacements hors domicile et les exceptions à ce principe sont strictement encadrées. Ce décret ne permet les déplacements que « pour effectuer des achats de fournitures nécessaires à l'activité professionnelle et des achats de première nécessité dans des établissements dont les activités demeurent autorisées par arrêté (..) ». Il ne suffit donc pas qu’un magasin demeure ouvert pour s’y rendre : l’acte d’achat doit être justifié par la nécessité pour les professionnels et même par la première nécessité, c’est-à-dire la plus grande, celle qui est vitale, pour les particuliers.

Il faut y ajouter l’ensemble des règles obligatoires pour veiller à la sécurité des salariés et des clients, dont le déploiement, n’est pas envisageable dans de nombreuses activités, du fait de ses caractéristiques et qui rendent donc toute exploitation et toute jouissance du local impossible.

L'employeur est tenu par la loi de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés (article L. 4121-1 du Code du travail). L'employeur ne doit pas seulement diminuer le risque, mais l'empêcher. Or empêcher un salarié de contracter le COVID 19 dans l’exercice de ses fonctions est plus que difficile, d’autant qu’il a été et demeure difficile, voir impossible de se procurer des matériels de protection individuelle efficients contre la transmission du virus sur le marché.

Cette règlementation liée à la limitation à la liberté d’aller et venir peut être qualifiée de fait du prince, puisqu’elle est une règlementation administrative autoritaire à laquelle on ne peut échapper. Donc, même si le commerçant ne doit pas impérativement fermer en vertu de l’arrêté du 15 mars 2020, ses clients ne peuvent plus se déplacer librement du fait du confinement : seuls peuvent s’y rendre ceux qui y sont contraints par l’urgence impérieuse ; vous ne pouvez donc plus exploiter vos activités dans les mêmes conditions qu’auparavant (Cass. Soc. 19 nov. 1980 n°78-41574) par l’effet de la pandémie,  comme du fait du prince.

Les loyers peuvent-ils être annulés ?  


La conjonction de cette pandémie  de Coronavirus COVID-19 et des mesures autoritaires de confinement du décret du 16 mars 2020 constitue donc un cas de force majeure, au sens de l’article 1218 du Code civil, empêchant le commerçant de jouir paisiblement des locaux loués conformément à leur destination.

Dans ce cas, il ne peut être reproché au locataire qui peut avoir contractuellement une obligation d’exploiter son commerce dans les locaux loués, de ne pas le faire. En l’absence de clause en ce sens, l’obligation d'exploiter est une condition d'application du statut des baux commerciaux, mais  son inexécution ne peut entraîner la résiliation du bail  (Cass. 3ème civ. 13 janvier 2015 n°13-25197 ; Cass. 3e civ., 10 juin 2009, n° 07-18.618 ). Cette obligation du preneur ne peut plus être mise à sa charge pendant la pandémie de COVID 19, tant que celle-ci dure, associée qui plus est aux mesures réglementaires précitées.

Ainsi, vous pouvez fermer même si l’administration n’interdit qu’une seule partie de vos activités ou les autorise (Exemple : l’activité de « livraison et de vente à emporter » dans le domaine de la restauration qui reste possible, ou l’activité d’agent immobilier ou encore celle d’opticien). La question est en effet de savoir si vous êtes dans l’impossibilité ou non de continuer à fonctionner dans les mêmes conditions qu’auparavant, ce qui est bien le cas. 

En revanche, La jurisprudence a exclu la possibilité d’invoquer la force majeure pour s’opposer au paiement : la maladie du débiteur ne rend pas impossible le paiement du créancier par une autre source de financement que celle de son activité (Cass. com., 16 sept. 2014, n° 13-20.306, P+B).  De même, les mesures gouvernementales n’empêchent pas d’exécuter l’obligation de payer le loyer. La force majeure ne peut pas être invoquée comme seule moyen : comme elle est couplé à l’exception d’inexécution quand c’est le fait du prince qui interdit l’ouverture au public du local, il faut ici y associer un autre fondement.

Ce fondement pourrait être le défaut de consistance de la contrepartie (ancienne cause) : le local ne peut plus être mis à disposition dans les conditions contractuelles, de sorte qu’il y a outre l’empêchement d’exploiter, une absence de contrepartie normale, ce qui justifierait le non-paiement du loyer.

Cette solution, consacrée par le droit commun plus favorable que le droit d’urgence, qui peut bénéficier aux entreprises éligibles au fonds de solidarité (critères précisés par décret 2020-371 du 30 mars 2020), 

Voici quelques-unes des conditions à remplir pour être éligible au fonds de solidarité : 

- Votre effectif salarié est inférieur ou égal à dix salariés, 
- le montant de votre chiffre d’affaires lors du dernier exercice clos est inférieur à 1 million d’euros, 
- votre bénéfice imposable augmenté des sommes versées au dirigeant, est inférieur à 60 000 euros au titre du dernier exercice ;
- vous n’êtes pas lié à votre société par un contrat de travail à temps complet ;
- vous n’avez pas de holding ;
- vous avez subi une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 % durant la période comprise entre le 1er mars 2020 et le 31 mars 2020, – par rapport à la même période de l’année précédente.

Le droit d’urgence ne permet en outre que le report et/ou l’étalement des loyers. Cette solution est moins disante que celles que permet de supprimer les loyers dès lors que l’exploitation du local, conformément aux prévisions des parties, s’est trouvée impossible.

Il est important d’écrire individuellement à son bailleur pour formaliser votre position et caractériser la force majeure.

C’est pourquoi nous vous proposons, pour 49 € HT + le coût de la LRAR électronique*, d’écrire par pour :

Obtenir non pas des reports de loyers mais l'annulation définitive de vos loyers pendant votre fermeture,
Eviter que le bailleur ne vous oppose un défaut d’ouverture fautif et cherche à résilier le bail ou vous priver d’indemnité d’éviction en fin de bail s’il ne renouvelle pas.

*soit 7.48 € HT pour un courrier de 2 pages recto/verso en noir et blanc.

Pour demander l'annulation totale ou partielle de vos loyers pendant la période de fermeture administrative de votre point de vente : 

 

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Nos solutions

Nous rédigeons un courrier d'avocat pour votre bailleur pour demander non pas le report du paiement de votre loyer mais son annulation totale ou partielle.  


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