Clause abusives et « non-professionnels », nouvelle décision
lundi 18 novembre 2019

Clause abusives et « non-professionnels », nouvelle décision

La Cour de cassation vient à nouveau de se prononcer sur l’appréciation de la qualité de non-professionnel au regard des dispositions du code de la consommation. Elle précise en outre la qualification de clause abusive.

Après une décision rendue le mois dernier (Cass. 3e civ., 17 octobre 2019, n°18-18.469), la Cour de cassation vient à nouveau de rendre une décision sur la notion de non professionnel en matière de droit de la consommation. L’article L.212-2 du code de la consommation précise ainsi que son article L.212-1 s’applique aux contrats conclus entre professionnels et non professionnels. Pour rappel, l’article L.212-1 (anciennement article L. 132-1), indique que « sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ».

Pour rappel également, l’article liminaire du code de la consommation définit le non-professionnel comme « toute personne morale qui n’agit pas à des fins professionnelles ».

Dans l’affaire objet de la décision du mois d’octobre, deux sociétés étaient liées par un contrat, contenant une clause limitative de responsabilité. La société prestataire, condamnée à reprendre des travaux, a fait appel de cette condamnation en invoquant la clause limitative de responsabilité contenue dans le contrat. La société cliente contestait la validité de cette clause, sur le fondement de l’ancienne rédaction de l’article L.132-1 du code de la consommation, considérant qu’elle avait la qualité de non-professionnelle.

La Cour de cassation avait rappelé « qu’une personne morale est un non-professionnel (…) lorsqu’elle conclut un contrat n’ayant pas de rapport direct avec son activité professionnelle ». Elle précisait ensuite, pour fonder la cassation de l’arrêt d’appel, que « la qualité de non-professionnel d’une personne morale s’apprécie au regard de son activité et non de celle de son représentant légal ».

Dans l’affaire objet de cette nouvelle décision, il s’agit encore de la réalisation de travaux. Une société civile immobilière avait confié à un architecte la maîtrise d’œuvre complète pour des opérations de construction d’un immeuble à usage professionnel. Le contrat prévoyait que les honoraires de l’architecte sont dus, même en cas d’abandon du projet, pour quelque raison que ce soit. La SCI ayant abandonné le projet et refusant de payer les honoraires de l’architecte s’est vue assignée par celui-ci.

L’arrêt d’appel ayant considéré que la clause en question était une clause abusive au sens de l’ancien article L.132-1 du Code de la consommation, l’architecte s’est pourvu en cassation. Il faisait valoir que la SCI, dont l’objet social est « l’investissement et la gestion immobiliers (…) » avait agi dans le cadre de son activité et poursuivait ainsi des fins professionnelles. Il faisait en outre valoir que la clause ne saurait être considérée comme abusive dans la mesure où elle n’avait comme finalité que d’assurer le caractère obligatoire du contrat.

La Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir considéré que si la SCI était bien un professionnel de l’immobilier, elle n’était pas un professionnel de la construction, ce qui serait le seul « de nature à la faire considérer comme étant intervenue à titre professionnel à l’occasion du contrat de maitrise d’œuvre litigieux dès lors que le domaine de la construction faisait appel à des connaissances ainsi qu’à des compétences techniques spécifiques distinctes de celles exigées par la seule gestion immobilière ». Elle retient donc une interprétation très restrictive de la notion de non-professionnel puisque même si une SCI n’est pas un professionnel de la construction, il peut sembler nécessaire à son activité de recourir à des contrats de maîtrise d’œuvre en vue de la construction de locaux.

En outre la Cour de cassation vient préciser en quoi la clause litigieuse est abusive. Elle relève ainsi qu’elle garantit au professionnel le paiement de ses honoraires, indépendamment « du volume de travaux qu’il aurait effectivement réalisé », sans aucune contrepartie réelle pour le maître de l’ouvrage. C’est donc le fait que le revenu était assuré au professionnel, indépendamment de toute contrepartie effectivement fournie, qui caractérisait le caractère abusif de la clause. Il y a donc bien là un déséquilibre entre les droits et obligations des parties.

Comme nous l’avions précédemment signalé, ce n’est donc pas parce que l’opération intervient entre deux personnes morales que le code de la consommation ne trouvera pas à s’appliquer. Encore faut-il qu’elles soient toutes deux des professionnels du domaine objet du contrat concerné. En conséquence, les entreprises peuvent donc, en fonction de la situation, agir en déséquilibre significatif selon trois fondements : celui du code de la consommation s’il s’agit d’une personne morale qui contracte sans rapport direct avec son activité, celui du code de commerce (art. L. 441-1-I-2°) ou enfin celui du code civil (art. 1171), dès lors que les dispositions spéciales ne seraient pas applicables.

Cass. 3e civ., 7 novembre 2019, n°18-23.259

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