
Bail commercial : Etendue de l’obligation de délivrance.
Les obligations dont le promoteur immobilier est tenu envers le preneur exonèrent-elles le bailleur de son obligation de délivrer au preneur des locaux aptes à l’exercice de l’activité autorisée à la clause destination du bail ?
Il est rappelé que le bailleur est tenu envers le preneur d’une obligation de délivrance (article 1719 du Code civil).
Inhérente au contrat de bail commercial (elle est la contrepartie du loyer versé), il n’est pas nécessaire qu’elle y soit stipulée.
Le bailleur doit la respecter dès la prise d’effet du bail et pendant toute sa durée.
Il est ainsi tenu de mettre les locaux loués à la disposition du preneur, de l’entretenir en état de servir à l’activité autorisée à la clause destination du bail commercial, et d’en faire jouir paisiblement le preneur au cours du bail commercial.
Afin de limiter l’étendue de l’obligation de délivrance, les bailleurs insèrent dans les baux commerciaux des clauses limitatives ou exonératoires (clauses que les utilisateurs trop souvent ne prennent pas le soin de négocier ou n’ont pas d’autre choix que d’accepter, sauf à perdre le bénéfice de leur emplacement).
Heureusement pour les preneurs, s’agissant d’une obligation essentielle, le juge interprète strictement ces clauses.
Depuis le 1er octobre 2016, date d’entrée en vigueur de l’ordonnance du 10 février 2016, le juge est même en mesure de déclarer ces clauses non écrites, le nouvel article 1710 du code civil disposant que « toute clause qui prive de sa substance l’obligation essentielle du débiteur est réputée non écrite ».
Dans l’arrêt rendu le 18 janvier 2018, et objet de la présente chronique, la Haute juridiction a précisé l’étendue de l’obligation de délivrance du bailleur dans le contexte d’une opération de réhabilitation réalisée par un promoteur immobilier.
La question était de savoir si le bailleur pouvait se prévaloir des obligations du promoteur immobilier pour échapper à son obligation de délivrance, laquelle impliquait la prise en charge de travaux de désamiantage, et dont le manquement était invoqué par le preneur.
La Cour d’appel de Versailles a considéré que le promoteur immobilier était tenu d’une obligation de résultat (le contrôle de la conformité de l’opération aux normes en vigueur) et que le projet de promotion immobilière était annexé au bail commercial, de sorte que le preneur ne pouvait reprocher au bailleur de ne pas l’avoir dénoncé, ni lui réclamer de réaliser des travaux de désamiantage non prévus dans le contrat de promotion immobilière ou de supporter le coût de ces travaux.
Au visa de l’article 1719 du code civil, la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la cour d’appel de Versailles, sauf en ce qu’il avait condamné le bailleur à verser certaines sommes au preneur au titre des travaux à réaliser.
La Haute juridiction a considéré que « les obligations pesant sur le promoteur immobilier envers le preneur, au titre des travaux de réhabilitation d’un immeuble loué, n’exonèrent pas le bailleur, tenu d’une obligation de délivrance, de la prise en charge des travaux nécessaires à l’activité stipulée au bail, sauf clause expresse contraire (…) ».
Comme il le fait avec les clauses limitatives ou exonératoires, le juge interprète donc strictement les circonstances invoquées par les bailleurs (dans l’espèce commentée, les obligations d’un tiers au contrat de bail commercial) pour tenter d’être dispensés de leur obligation de délivrance.
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