Enquête de la DGCCRF dans le secteur de la location financière
lundi 28 mars 2022

Enquête de la DGCCRF dans le secteur de la location financière

La Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) a communiqué le 16 mars 2022 avoir réalisé plusieurs enquêtes dans le secteur de la location financière à l’issue desquels, des suites correctives (avertissements et injonctions) et des suites répressives (procès-verbaux) ont été mises en œuvre.

La Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes précise avoir dressé :

3 avertissements ont ainsi été adressés à des fournisseurs ou apporteurs d’affaires (dénomination donnée aux fournisseurs par certains bailleurs financiers) pour non-respect des dispositions relatives au contrat conclus hors établissement commercial (L. 221-8 à L. 221-10 du Code de la consommation) avec des professionnels (L. 221-3) en matière d’information précontractuelle obligatoire (L. 221-5 à L. 221-7) et de droit de rétractation (L. 221-18 à L. 221-28).

8 injonctions ont été adressées à des fournisseurs et apporteurs d’affaires pour mise en conformité avec les règles précitées du Code de la consommation applicables aux professionnels ou aux non professionnels (clauses abusives (L. 212-1)) ou clauses interdites (L. 212-1, 4° et 6°),  

3 procès-verbaux pénaux ont été dressés à l’encontre de bailleurs, pour non-respect des règles relatives à la vente hors établissement commercial auprès des professionnelspratiques commerciales trompeuses sur la portée des engagements du vendeur et des droits du client, manœuvre frauduleuse pour faire renoncer le professionnel à son droit de rétractation, pratiques commerciales agressives.

1 procès-verbal d’amende administrative a été notifié pour manquement aux obligations d’information précontractuelle prévues à l’article L. 221-5 du Code de  la consommation et utilisation d’un signe distinctif d’un service public sans autorisation préalable du service public concerné (article L. 731-2 du Code de la propriété intellectuelle).

La Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) précise par ailleurs poursuivre ses investigations dans plusieurs régions et que d’autres sanctions seront prises si nécessaire. 

Cela pose ainsi la question de la soumission desdits contrats au droit de la consommation.

L’article L221-3 du Code de la consommation dispose :

« Les dispositions des sections 2, 3, 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq. »

Les dispositions sur la vente hors établissement sont applicables, entre professionnels, uniquement lorsque les trois conditions suivantes sont respectées :

1. le contrat doit être conclu hors établissement,
2. l'objet du contrat ne doit pas entrer dans le champ d'activité principale de l'entreprise,
3. le nombre de salariés de l'entreprise doit être inférieur ou égal à cinq.

Le professionnel est défini comme étant « toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu’elle agit au nom ou pour le compte d’un autre professionnel » (C. consom., art. liminaire).

Le non-professionnel est « toute personne morale qui n’agit pas à des fins professionnelles », définition résultant de la loi de ratification de l’ordonnance du 14 mars 2016(C. consom., art. liminaire. – Ord. n° 2016-301, 14 mars 2016 , relative à la partie législative du Code de la consommation ratifiée par L. n° 2017-203, 21 févr. 2017 – Cass. 1re civ., 17 oct. 2019, n° 18-18.469 :– Cass. 1re civ., 1er juin 2016, n° 15-13.236 : JurisData n° 2016-010690). 

Ainsi, des personnes morales peuvent bénéficier de certaines dispositions du Code de la consommation, mais c’est à la seule condition d’agir hors du cadre de leur activité professionnelle et sous réserve qu’un texte précise qu’il s’applique aux non-professionnels (Cass. 1re civ., 27 nov. 2019, n° 18-22.525). 

Il faut donc vérifier si les contrats conclus entrent dans le champ d’activité des professionnels concernés. En effet, la loi du 17 mars 2014 (dite loi Hamon) a substitué pour les contrats conclus après le 13 juin 2014, la notion de « champ de l’activité principale » à celle de « rapport direct » avec l’activité. 

Les juridictions se sont positionnées à des très nombreuses reprises sur l’inapplicabilité du droit de la consommation à des contrats conclus par des professionnels.

Ainsi, ne sont pas des non-professionnels pouvant bénéficier du droit de la consommation :

un sophrologue ayant conclu un contrat d’insertion publicitaire, (Civ. 1re, 29 mars 2017, n° 16-11.207, Dalloz jurisprudence) ;

un expert-comptable - commissaire aux comptes ayant conclu un contrat de maintenance et location financière de plusieurs photocopieurs (CA Aix-en-Provence (ch. 3-3), 16 janvier 2020 : RG n° 18/01067 ; arrêt n° 2020/6);

une société ayant conclu un contrat de location financière portant sur un stockeur numérique et des caméras (CA Colmar (3e ch. civ. A), 17 juin 2019 : RG n° 18/01052 ; arrêt n° 19/432) ;

une société ayant conclu un contrat de télésurveillance ayant pour finalité d'assurer la protection des biens nécessaires à l'exercice de cette activité (CA Dijon (2e ch. civ.), 5 juillet 2018 : RG n° 16/01798) ;

un garagiste ayant conclu un contrat  crédit-bail portant sur une imprimante et un photocopieur , la Cour relevant que le contrat a été conclu dans le cadre de l’activité de garagiste et dans les locaux de sa société avec le tampon de sa société (CA Paris (pôle 5 ch. 11), 30 novembre 2018 : RG n° 17/06625); 

un pharmacien ayant conclu un contrat de location d'un standard téléphonique (CA Colmar (3e ch. civ. A), 9 septembre 2019 : RG n° 17/05381 ; arrêt n° 19/551) ;

une société ayant conclu un contrat de location avec abonnement d'une installation de télésurveillance (CA Chambéry (ch. civ. sect. 1), 24 septembre 2019 : RG n° 17/02526 ) ;

un expert-comptable ayant conclu un contrat de location de six appareils multifonction, pour l'établissement et la reproduction de documents (CA Aix-en-Provence (ch. 3-3), 16 janvier 2020 : RG n° 18/01067 ; arrêt n° 2020/6);

un architecte ayant conclu un contrat de location de deux photocopieurs et d'un serveur informatique par un architecte (CA Paris (pôle 1 ch. 8), 10 mai 2019 : RG n° 18/20891) ;

un avocat ayant conclu un contrat de location financière d’un équipement de dictée vocale, de « secrétaire vocal » et des prestations associées d'assistance et de maintenance (CA Aix-en-Provence (ch. 3-3), 17 octobre 2019 : RG n° 18/11926 ; arrêt n° 2019/419); 

un avocat ayant conclu un contrat portant sur un logiciel de comptabilité (CA Aix-en-Provence (ch. 3-3), 17 octobre 2019 : RG n° 18/11935 ; arrêt n° 2019/420) ;

un avocat ayant conclu un contrat de location de matériel portant sur le financement d'un photocopieur multifonctions. (Cour d'appel, Paris, Pôle 5, chambre 11, 26 Juin 2020 – n° 17/22837) ;

un avocat ayant conclu un contrat de location portant sur un photocopieur (Cour d'appel, Versailles, 1re chambre, 1re section, 8 Juin 2021 – n° 20/02105).

Pour les sociétés concernées qui font l’objet de cette enquête, il sera donc nécessaire de vérifier cette question de l’application du droit de la consommation à leurs contrats, pour vérifier si les sanctions prises par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes sont fondées. 

Guillaume Gouachon 
Avocat Associé 

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