La proposition de loi encadrant les pratiques commerciales des influenceurs
mardi 17 janvier 2023

La proposition de loi encadrant les pratiques commerciales des influenceurs

Le 15 novembre 2022, une proposition de loi visant à encadrer les pratiques commerciales liées au marché de l’influence a été déposée à l’Assemblée Nationale.(1)

Fort du constat que le commerce de l’influence est un nouveau modèle publicitaire et marketing qui influence les habitudes de consommation, et ce notamment des plus jeunes, la proposition de loi a pour objectifs d’encadrer cette activité et de « lutter contre les pratiques commerciales trompeuses et illicites sur internet ». 

La proposition de loi projette l’adoption d’un nouveau régime juridique dont les principaux apports sont les suivants : 

1. La création d’un statut juridique d’influenceur et d’agent d’influenceurs

La proposition de loi intègre les statuts d’influenceurs et d’agent d’influenceurs au sein d’un nouveau chapitre au sein du Code du Travail dans les termes suivants : 

L’article L. 7125-1 du Code du Travail définit l’influenceur comme « toute personne physique ou morale qui détient, exploite ou anime, à titre professionnel ou non, une page ou un compte personnel accessible sur une plateforme en ligne et dont l’activité dépasse un seuil d’audience prévu par décret, en vue du partage de contenus exprimant un point de vue ou donnant des conseils susceptibles d’influencer les habitudes de consommation ». L’article précise que cette définition s’applique même si cette activité n’est exercée qu’à titre occasionnel.  

Cette définition assez large englobe donc une pluralité d’acteurs du commerce de l’influence, sous réserve que ce dernier réalise un certain seuil d’audimat.

En raison de son activité consistant à créer du contenu en ligne, l’influenceur est alors qualifié d’éditeur sens de la loi LCEN dite « Loi pour la confiance dans l’économie numérique ».(2)

En conséquence de quoi, et en vertu de l’article 6 III de la loi précitée, l’éditeur est responsable du contenu qu’il diffuse et peut voir sa responsabilité engagée pour tout manquement constaté dans son activité. 

Au surplus, en raison de sa qualité d’éditeur, une liste d’informations obligatoires telles que ses coordonnées professionnelles, doit être communiquée sur le service de communication en ligne à destination du public dans un standard ouvert. 

Enfin, l’article précise que l’activité d’influenceur n’est pas incompatible à d’autres activités, comme celles de mannequin ou d’artiste, de telle sorte que l’une de ces activités n’évince pas l’autre mais se cumule. Ainsi, les obligations qui incombe à l’influenceur peuvent se cumuler avec celles d’artiste.

La proposition de loi poursuit avec un projet d’article L. 7125-3 du Code du Travail qui apporte une définition de l’agent d’influenceurs comme l’activité, qu’elle que soit la dénomination employée par l’agent, d’« une personne physique ou morale, [qui] consiste à recevoir mandat à titre onéreux d’un ou plusieurs influenceurs aux fins de placement et de représentation de leurs intérêts professionnels ». 

Cette activité est qualifiée d’activité commerciale au sens du Code de Commerce en tant qu’activité exercée par des personnes qui effectuent des actes de commerce et en font leur profession habituelle.

2. Les contrats de représentation d’influenceur et de recours aux services d’influenceurs

Dans l’exercice du commerce d’influence, la proposition prévoit la rédaction obligatoire de deux contrats ; un contrat de représentation d’influenceur qui est conclu entre l’agent d’influenceurs et l’influenceur et un contrat établi entre un influenceur et la personne physique ou morale pour le compte de qui est réalisé ses services. 

Concernant le contrat régissant les rapports entre l’influenceur et son agent, l’article 7125-3 précité dispose que le mandat a pour dessein le « placement et de représentation de leurs intérêts professionnels ». Quoique cet article prévoit que les modalités du mandat entre l’influenceur et son agent seront précisées par décret, l’article 7125-6 du Code du Travail en précise les contours. 

D’une part, le contrat de mandat conclu entre l’agent d’influenceurs et l’influenceur qu’il représente devra obligatoirement être établi par écrit. 

D’autre part, ledit contrat devra comporter au minimum les clauses suivantes ; la définition précise de son objet, la(les) mission(s) du mandat, les modalités par lesquelles le mandataire devra en rendre compte à son mandant, les conditions de rémunération et enfin, le terme du mandat intervenant à une date ou à un évènement déterminé.

Le fait pour un agent d’influenceurs de ne pas avoir établi de contrat écrit ou de ne pas avoir fait figurer au sein de ce contrat les mentions susvisées est sanctionné par une peine d’emprisonnement de six mois et d’une amende de 75.000 euros. 

Les dispositions de la proposition de loi régissent également les conditions de rémunération de l’agent d’influenceurs en précisant que la « rémunération de ses services se calculent en pourcentage sur l’ensemble des rémunérations de l’influenceur » et dont la nature des rémunérations de l’influenceur à prendre en compte ainsi que le plafond et les modalités de versement seront ultérieurement déterminés par un décret. 

Concernant le contrat entre l’influenceur et la personne physique ou morale qui recours à ses services comme une société, une association, etc, à partir et/ou à destination du territoire français, un contrat doit être établi par écrit entre eux. Si ce contrat n’est pas délivré par la personne qui recourt à ces services, il appartiendra à l’agent d’influenceurs de le lui communiquer. 

Dans l’hypothèse où la personne qui recours aux services de l’influenceur n’est pas établi en France, il devra alors désigner un représentant établi en France pour les besoins de son activité. Le fait de ne pas désigner de représentant établi en France pourra être sanctionné par une amende de 37.500 euros (L. 132-31 du Code de la Consommation). 

Cette obligation de contrat prévue par l’article L. 122-28 du Code de la Consommation est complétée par l’article L. 122-29 du même Code qui précise les mentions obligatoires et obligations contractuelles que la personne qui recourt aux services de l’influenceur doit mentionner à l’instar des supports de communication utilisés pour les services ou les méthodes de rémunération. Cet article prévoit également les obligations auxquelles l’influenceur doit se conformer, comme son obligation de s’assurer de la conformité des contenus publiés ou de la véracité des informations diffusées. 

Le fait pour un influenceur de ne pas avoir conclu de contrat avec une personne qui recours à ses services de promotion ou d’avoir établi un contrat ne comportant pas les mentions prévues par l’article L. 122-28 du Code de la Consommation est sanctionné par six mois d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende (L.132-30 du Code du Travail). Réciproquement, le fait pour la personne qui recourt aux services de l’influenceur de ne pas avoir délivré de contrat à ce dernier ou à son agent sera sanctionné des mêmes peines (L. 132-32 du Code de la Consommation). 

3. La définition du contenu publicitaire d’influence

La proposition de loi modifie également le Code de la Consommation en insérant une nouvelle section 4 au sein du chapitre consacré aux pratiques commerciales règlementées, dénommée « pratiques commerciales et publicitaires liées au marché de l’influence sur internet ». A cette occasion, l’article L. 122-26 du Code de la Consommation donne une définition du contenu à caractère publicitaire comme suit ; « toute communication au public par voie électronique, revêtant un caractère laudatif à l’égard d’une entité ayant une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ou destinée à promouvoir la fourniture de biens ou de services y compris les biens immeubles, les droits et les obligations ». 

Cette définition intègre les « contenus mentionnant explicitement un code promotionnel, un rabais, une remise, une prime, un cadeau, ou toute autre offre promotionnelle » qui sont alors présumés être des contenus à caractère publicitaire. 

Pour ce type de contenu émis depuis et/ou à destination de la France, l’article L. 122-27 du Code de la Consommation imposera à ce que ce contenu mentionne sa finalité publicitaire de manière claire et non équivoque. Pour affiner cette obligation, un décret afférent sera publié en la matière. 

La sanction attachée à cette obligation d’information quant au caractère publicitaire du contenu sera sanctionnée par une amende de 300.000 €, amende pouvant être portée à 10% du chiffre d’affaires annuel moyen(3) de l’influenceur ayant failli à cette règlementation. 

4. Le nouveau dispositif de signalement obligatoire des plateformes présentant des influenceurs

Au surplus des obligations imposées aux influenceurs et aux agents d’influenceurs, la proposition de loi modifie la loi pour la confiance dans l’économie numérique en ajoutant un alinéa à son article 6 qui impose désormais aux éditeurs et hébergeurs de service de communication en ligne au public de mettre en place « un dispositif facilement accessible et visible permettant à toute personne de porter à leur connaissance ce type de contenu ». 

En plus de la mise en place de ce dispositif de signalement, les éditeurs et hébergeurs précités devront répondre à deux obligations dans l’exercice de leur activité afin de rendre cette fonctionnalité efficiente, à savoir : 

« Informer promptement les autorités publiques compétentes de toutes activités commerciales illicites de telle nature qui leur seraient signalées et qu’exerceraient les destinataires de leurs services », et 
« Rendre public les moyens qu’elles consacrent à la lutte contre ces activités commerciales illicites ». 


5. Les règles émises par l’ARPP et le Certificat de l’Influence Responsable

Dans l’attente de la publication de cette loi et des décrets afférents, l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) a édicté des règles de communication applicables au marché de l’influence telles que l’obligation de transparence sur l’existence d’un partenariat et ses modalités de communication. 

De plus, l’ARPP propose aux créateurs de contenus en ligne de se former aux règles régissant le commerce d’influence par l’obtention d’un Certificat de l’Influence Responsable qui se traduit par une formation en ligne dispensant un parcours de sensibilisation aux principales règles éthiques et juridiques et un contrôle des connaissances en fin de chaque session.  


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(1) Proposition de loi n°456 visant à encadrer les pratiques commerciales et publicitaires liées au marché de l’influence sur internet

(2) Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (1)

(3) Ce chiffre d’affaires moyen sera « calculé sur les trois derniers chiffres d’affaires annuels connus à la date des faits » selon l’article L. 132-29 du Code de la Consommation. 

(4) Proposition de loi n°456 visant à encadrer les pratiques commerciales et publicitaires liées au marché de l’influence sur internet. 

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