Peut-on modifier la marque de produits destinés à être importés dans l’UE sans l’accord de son titulaire?

C’est la question préjudicielle qui a été soumise à la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE), à laquelle elle a répondu dans un arrêt du 25 juillet 2018.  

Dans cette affaire, une société de droit belge importait des chariots élévateurs fabriqués par la société Mitsubishi, laquelle est titulaires de marques de l’Union Européenne pour ces produits. Ces chariots étaient achetés hors de l’espace économique européen et portaient la marque Mitsubishi. La société belge les plaçaient alors sous le régime de l’entrepôt douanier, avant de procéder à des modifications en vue de les rendre conformes aux normes de l’Union Européenne. Elle retirait également toutes les marques, plaquettes d’identification et numéros de série pour y apposer les siens propres. Les chariots étaient ensuite importés et commercialisés au sein de l’espace économique européen.  

La société Mitsubishi a demandé la cessation de ces agissements. La Cour d’appel de Bruxelles a saisi la CJUE afin de savoir si le titulaire d’une marque de l’Union Européenne peut s’opposer à ce qu’un tiers, sans son consentement, supprime tous les signes identiques à cette marque et appose d’autres signes en vue de les importer et les mettre dans le commerce dans l’espace économique européen, où il n’ont jamais été importés. 

Pour rappel, en matière de marque il existe un principe dit de « l’épuisement des droits », consacré en droit français par l’article L.713-4 du Code de la propriété intellectuelle et au niveau communautaire par l’article 13 du règlement n°207/2009 du 26 février 2009 sur la marque de l’Union Européenne. Dans sa version actuelle il prévoit : « Une marque de l’Union européenne ne permet pas à son titulaire d’interdire l’usage de celle-ci pour des produits qui ont été mis sur le marché dans l’espace économique européen sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement ».

Une exception, prévue par l’alinéa 2 de cet article, permet au titulaire de s’opposer à la commercialisation ultérieure des produits sous sa marque, en cas de motifs légitimes et notamment lorsque l’état des produits est modifié ou altéré après leur mise dans le commerce.  

En l’espèce la situation est différente puisque les produits concernés n’ont pas fait l’objet d’une première importation au sein de l’espace économique européen par le titulaire ou avec son consentement. Après avoir rappelé ce principe, la CJUE indique que la rédaction de cet article 7 signifie que le législateur européen a souhaité permettre au titulaire d’une marque de contrôler la première mise dans le commerce de l’espace économique européen de ses produits. En procédant au remarquage des produits, la société belge a porté atteinte à ce droit du titulaire de la marque

De plus, le remarquage des produits porte atteinte aux fonctions de la marque, à savoir l’indication de la provenance du produit mais également celle visant à garantir la qualité du produit ou service, celles de communication, d’investissement (dans un but d’acquisition et de conservation d’une réputation permettant de fidéliser une clientèle) ou encore de publicité. La CJUE relève notamment « le fait que les produits du titulaire de la marque soient mis dans le commerce avant que ce titulaire les y ait mis revêtus de cette marque, de sorte que les consommateurs connaîtront ces produits avant de pouvoir les associer à celle-ci, est de nature à gêner de manière substantielle l’emploi de ladite marque, par ledit titulaire, pour acquérir une réputation susceptible d’attirer ou de fidéliser des consommateurs et pour servir d’élément de de promotion des ventes ou d’instrument de stratégie commerciale. » 

Enfin, les pratiques de l’importateur sont contraires à l’objectif d’assurer une concurrence non faussée. 

Il convient donc d’être très prudent en matière de remarquage de produits sous une marque de tiers, que ces produits aient déjà été importés au sein de l’espace économique européen ou non. 

 CJUE 25 juil. 2018, aff. C-129/17

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