La guerre de E.Leclerc contre le monopole des pharmaciens continue

La Cour de cassation valide une fois de plus les campagnes publicitaires menées par E.Leclerc sur les médicaments non remboursés. Nouvelle attaque au monopole des pharmaciens.

Une décision de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 21 juin 2016 a été rendue au sujet d’une campagne de communication menée par la société coopérative Groupement d’achats des centres Leclerc, la société Galec (Cass.com., 21 juin 2016, pourvoi n° 14-22.709).

La campagne de communication mise en œuvre portait sur le prix des médicaments non remboursés. Elle comportait deux affiches ayant respectivement comme slogan «  Etes-vous assez riches pour avoir mal à la tête » et « Aujourd’hui, pour soulager les jambes lourdes, il faut le budget qui va avec ». Ces slogans étaient suivis de la mention « Oui aux médicaments non remboursés à prix E.Leclerc ».

La société Univers Pharmacie et l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UGDPO) estimant que cette campagne constituait une pratique commerciale déloyale et avait pour effet de discréditer et dénigrer le secteur de la pharmacie, ont assigné le Galec devant le TGI de Paris en vue d’obtenir la cessation de la campagne ainsi que l’indemnisation de leur préjudice.

Ces demandes ont été rejetées par la Cour d’appel. La société Univers Pharmacie et l’UGDPO forment un pourvoi devant la Cour de cassation.

1.    Sur les pratiques commerciales déloyales

Dans un premiers temps, la société Univers Pharmacie et l’UGDPO considèrent que la campagne de E.Leclerc constituait une pratique commerciale déloyale au sens de l’article L.120-1 du Code de la consommation.

Ils précisent tout d’abord que la déloyauté peut s’évincer des seuls titres et passages très apparents d’un support de communication, à l’exclusion des passages en très petits caractères qui ne sont pas lus par un consommateur moyen.

Or, ils considèrent qu’en l’espèce, les passages lisibles des campagnes litigieuses, constitués des slogans indiqués, laissaient faussement croire aux consommateurs moyens que les centres E. Leclerc pouvaient d’ores et déjà vendre des médicaments non remboursés. Ce message était susceptible d’altérer le comportement économique du consommateur  en les attirant dans ces parapharmacies sur la foi d’information qui seraient erronées.

Par ailleurs, selon la société Univers Pharmacie et l’UGDPO, les campagnes de communication constituaient des allégations trompeuses allant à l’encontre des messages de santé publique, dans le seul but d’attirer les consommateurs dans les parapharmacies E.Leclerc.

La Cour de cassation confirme la position de la Cour d’appel qui avait apprécié les publicités litigieuses dans leur ensemble pour refuser de les qualifier de pratique commerciale déloyale.

D’une part, la haute juridiction considère que les messages publicitaires ne comportent ni fausse allégation sur l’augmentation du coût des médicaments  du fait de leur déremboursement, ni allégations trompeuses allant à l’encontre des messages de santé publique, dès lors que la vente de médicaments n’est pas banalisée et reste, au regard de ces publicités, l’apanage des pharmaciens.

D’autre part, en présentant des centres E.Leclerc comme aptes à vendre des médicaments (si une modification de la loi le leur permettait) aux prix bas qu’ils pratiquent, ces publicités ne trompent pas le consommateur même peu avisé.

2.    Sur le dénigrement et le discrédit du secteur de la pharmacie

Dans un deuxième temps, la Cour de cassation confirme la position de la Cour d’appel qui avait refusé de considérer que ces campagnes publicitaires constituaient un dénigrement et un discrédit des pharmaciens et des officines de pharmacie.

Pour la Haute Cour, ces publicités constituent une revendication en faveur des intérêts commerciaux des centres E.Leclerc en appelant à une vraie concurrence et s’insèrent dans un débat d’actualité sur le monopole des pharmaciens s’agissant des médicaments non remboursés.

Elle en déduit que c’est à juste titre que la Cour d’appel a écarté le caractère mensonger de l’information et considéré que cette campagne ne cherchait pas à ternir la réputation du secteur de la pharmacie mais seulement à remettre en cause leur monopole.

Une autre décision a été rendue par la Cour de cassation le même jour entre les mêmes parties et concernait uniquement le grief de dénigrement. Je vous renvoie à nos commentaires sur cette décision (Cass.com., 21 juin 2016, pourvoi n° 14.22-710).

Cette décision s’inscrit dans la campagne menée par les centres E.Leclerc contre le monopole des pharmaciens, qui dure depuis plusieurs années déjà.

Le Galec avait déjà été assigné en 2009 par plusieurs syndicats du secteur de la pharmacie pour sa campagne basée sur le slogan «  Avec l’augmentation du prix des médicaments, soigner un rhume sera bientôt un luxe » (Cass.com., 13 oct.2009, pourvoi n° 08-16.972). La Cour de cassation avait confirmé l’arrêt de la cour d’appel ayant considéré que cette campagne ne constituait pas un trouble commercial illicite.

La publicité trompeuse, comme le dénigrement et le discrédit, n’avaient pas non plus été retenus par la Cour de cassation en 2011 s’agissant du slogan « En France, le prix d’un même médicament peut varier du simple au triple : il faut changer de traitement ! » (Cass.com., 27 avril 2011, pourvoi n° 10-15.648).

Ce combat est loin d’être terminé et la présente décision ne fait que confirmer l’analyse de la cour de cassation qui estime que ces campagnes publicitaires sont licites.

De quoi refroidir les professionnels du secteur de la pharmacie.

Cass.com., 21 juin 2016, pourvoi n° 14-22.709

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