Loyauté entre anciens contractants

En l’absence d’information du distributeur de sa participation à un appel d’offres, le fournisseur commet-il une déloyauté ?

Dans cette affaire, deux sociétés avaient conclu en 2004 un contrat de distribution ; l’une distribuant du matériel électrique produit par l’autre. Le contrat avait une durée de 3 ans, renouvelable tacitement.

En 2007 elles avaient en outre conclu un contrat tripartite par lequel le distributeur devait installer chez un client des onduleurs fabriqués par le fournisseur. Le contrat avait une durée d’un an et ne comportait pas de mécanisme de tacite reconduction. Par la suite le client organise des appels d’offres pour la maintenance de certains appareils de diagnostic dans des laboratoires de biologie. Le distributeur gagne cet appel d’offre pour l’année 2011, le fournisseur celui pour l’année 2016. 

Le distributeur poursuit le fabricant pour lui avoir caché sa participation à l’appel d’offre et lui avoir dissimulé des informations sur ses tarifs, l’empêchant d’ajuster son offre et lui faisant perdre une chance de gagner l’appel d’offre. Elle a par la suite assigné le fournisseur, sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

La Cour d’appel énonce le principe suivant : « En l’absence de clause contractuelle, la demande ne peut prospérer qu’à charge pour l’appelante de rapporter la preuve que les rapports qui les unissaient faisaient peser sur [le fabricant] une obligation de loyauté ».

Elle constate ensuite que depuis le contrat tripartite de 2007, lequel n’avait pas été reconduit, elles n’étaient liées par aucun accord de partenariat et avaient depuis cette date chacune répondues seules lors des appels d’offres. Le fournisseur ne connaissait pas plus les conditions proposées par le distributeur. Elle relève donc qu’aucun élément ne permettait de considérer l’existence d’une obligation spécifique de loyauté, les deux candidatures aux appels d’offre s’inscrivant dans le jeu normal de la concurrence.

Nous en profitons pour rappeler, au titre des échanges d’information entre membres d’un réseau de distribution, que le nouveau règlement européen d’exemption entré en vigueur le 1er juin 2022 comporte des restrictions spécifiques portant sur les échanges d’information entre membres d’un réseau, en cas de double distribution, c’est à dire, lorsque la tête de réseau commercialise les produits ou services objets du contrat, en concurrence avec ses propres distributeurs. Les échanges sont dans ce cas limités à ce qui permet l’exécution de l’accord de distribution ou l’amélioration des produits ou services. Par contre, des échanges sur les prix futurs proposés par l’un ou l’autre pour les produits ou services concernés seraient prohibés, faisant perdre le bénéfice de l’exemption par catégorie. Les informations privilégiées que le distributeur prétendait devoir recevoir n’auraient en toute hypothèse pas pu être transmises. 

Nous rappellerons enfin qu’au regard du dernier règlement d’exemption les réponses à appel d’offre sont des ventes passives, qu’il est impossible d’interdire ou d’empêcher. Les membres d’un réseau de distribution doivent donc pouvoir répondre librement à des appels d’offres

CA Bordeaux, 20 sept. 2022, n°20/04288

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