DGCCRF

L’action du Ministre de l’Economie face au droit international privé

Par une décision du 19 février 2024, la Cour d’appel de Bruxelles fait interdiction au Ministre français de l’Economie d’appliquer le droit français à une société belge, en se fondant sur des principes de droit privé.

Par une décision du 19 février 2024, la Cour d’appel de Bruxelles fait interdiction au Ministre français de l’Economie d’appliquer le droit français à une société belge, en se fondant sur des principes de droit privé.

Le 19 février 2024, la Cour d’appel de Bruxelles a rendu une décision (Cour d’Appel de Bruxelles, 19 février 2024, n°2024_QR_13) à la suite d’une requête de la centrale EURELEC réclamant de faire interdiction à la DGCCRF de procéder à des mesures d’inspection et de recherche de documents et d’informations concernant les contrats conclus par EURELEC et leur négociation.

Pour rappel, EURELEC est une société coopérative à responsabilité limitée de droit belge, créée le 22 mai 2016. Elle représente une entreprise commune, ou « joint-venture », entre trois groupes de sociétés majeurs dans le secteur de la grande distribution : le groupe allemand Rewe, le mouvement français E. Leclerc, et le groupe belgo-néerlandais Ahold Delhaize.

Le 8 février 2024, la DRIEETS (Direction régionale interdépartementale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités), émanation de la DGCCRF (Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes), a fait une demande officielle d’information à EURELEC.

Cette demande s’inscrivait dans le cadre de la vérification du respect de la date butoir de la signature des accords commerciaux prévus par la loi du 17 novembre 2023. Le Ministre requérait qu’EURELEC lui retourne l’ensemble des conventions passées par EURELEC signées ou non à date.

Le 12 février 2024, EURELEC déclinait la demande faite par le Ministre.

Par requête, le même jour, EURELEC sollicitait du juge Belge l’interdiction au Ministre de mettre en œuvre, procéder et/ou collaborer à des mesures d’inspection et de recherche de documents et d’informations concernant les contrats conclus par EURELEC et l’état de leur négociation, soit directement à l’encontre d’EURELEC, ou de ses représentants, soit indirectement à l’encontre des membres ou des fournisseurs d’EURELEC.

Par ordonnance du 14 février 2024, le Président du tribunal de l’entreprise francophone de Bruxelles a déclaré la demande d’EURELEC recevable mais non fondée au motif que la condition de nécessité absolue ne serait pas remplie.

Les demandes originales ont donc été répétées par EURELEC devant la Cour d’appel.

Elle juge que la demande d’EURELEC est recevable en raison de l’urgence de la situation, notamment car la DGCCRF avait fixé une date butoir très proche pour la transmission des documents demandés et avait laissé entendre qu’elle pourrait procéder à des inspections chez les partenaires d’EURELEC. La Cour d’appel a également noté que le refus de se soumettre aux mesures d’investigation de la DGCCRF pourrait entraîner des sanctions pénales.

Celle-ci a considéré qu’en l’espèce, le recours à la procédure unilatérale était justifié sur le fondement de plusieurs motifs.

Premièrement, la Cour considère que prima facie, EURELEC n’est pas soumise aux dispositions invoquées par le Ministre car il s’agit d’une société de droit belge, dont le siège social est situé à Bruxelles, que les accords-cadres auxquels sont annexés les contrats contiennent une clause de juridiction en faveur des tribunaux belges, et que la clause de choix de loi prévoit l’application du droit belge.

En conséquence, les dispositions du droit français invoquées par la DGCCRF à l’appui de sa demande d’information ne sont pas prima facie applicables à EURELEC.

Deuxièmement, selon la Cour d’appel, la demande faite par la DGCCRF est susceptible de violer le secret des affaires d’EURELEC.

La Cour considère également que la demande faite par EURELEC concernant ses membres et fournisseurs permet de la protéger contre les mesures de la DGCCRF qui la viseraient indirectement.

En conséquence, la Cour d’appel de Bruxelles fait interdiction sous astreinte au ministre français de l’Economie de mettre en œuvre, procéder et/ou collaborer à des mesures d’inspection et de recherche de documents et d’informations concernant les contrats conclus par EURELEC, et l’état de leurs négociations, de manière directe ou indirecte.

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