Incidence de loi Pinel sur les travaux lors du renouvellement du bail

Quelles sont les conséquences en matière de travaux du renouvellement d’un bail commercial régularisé avant l’entrée en vigueur de la loi Pinel ? Le preneur peut parfois avoir un intérêt à solliciter le renouvellement de son bail !

La loi Pinel ne s’applique pas encore à tous les baux commerciaux en vigueur

La LOI n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises est entrée en vigueur, pour la plupart de ses dispositions, le 1er septembre 2014.

Les baux conclus ou renouvelés à compter de cette date sont donc régis par la fameuse loi dite « Loi Pinel ».

Cette loi étant en vigueur depuis plus de neuf années, on pourrait penser que l’ensemble des baux commerciaux y sont soumis.

Bien évidemment, les baux conclus avant le 1er septembre 2014, pour une durée supérieure à neuf ans, ou ceux qui se poursuivent par tacite prolongation, restent régis par « l’ancien régime », c’est-à-dire un régime faisant état d’une liberté contractuelle totale au sujet des charges, sous réserve que les baux prévoient une stipulation expresse pour transférer certains travaux au preneur.

Neuf années après la promulgation de cette loi, nous sommes donc toujours face à une dualité de régime en matière de bail commercial, les baux pré-Pinel et les baux post-Pinel.

Rappelons que cette loi a été rédigée dans le but de protéger les locataires commerçants de certaines pratiques des bailleurs.

C’est le cas pour illustration, des locataires entrants, se voyant soudainement refacturer par le bailleur les travaux de rénovation de l’immeuble lorsque ceux-ci étaient prévus, voire imposés dans le bail.

De même, on pouvait s’interroger sur la légitimité du bailleur à faire payer à son locataire les travaux visés à l’article 606 du code civil, à savoir ceux qui intéressent « l’immeuble dans sa structure et sa solidité générale » (Cass. 3ème civ., 13 juil. 2005, Bull. civ. III, n° 155), alors que le bailleur est tenu à une obligation de délivrance du bien loué.

Un arrêt rendu le 29 septembre 2010 avait déjà ouvert une brèche à cet égard :

« Mais attendu qu’ayant retenu à bon droit que la clause du bail, transférant au preneur la charge des grosses réparations et celle du clos et du couvert, devait être interprétée restrictivement et ne pouvait inclure la réfection totale de la toiture de l’un des bâtiments compris dans l’assiette du bail, la cour d’appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision » (Cass. 3ème civ., 29 sept. 2010, Bull. civ. III, n° 173).

D’autres dispositions ont permis d’obliger les bailleurs à justifier des provisions pour charges versées par les locataires commerçants.

On rappellera à cet égard l’arrêt rendu par la Haute juridiction en date du 5 novembre 2014, confirmant l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris le 10 juillet 2013, par lequel il a été jugé que l’absence de régularisation de charges par le bailleur permettait une restitution des provisions versées, au profit du locataire (Cass. 3ème civ., 5 novembre 2014, n° 13-24451).

Refacturation de travaux et charges dans les baux commerciaux post-pinel

Depuis l’entrée en vigueur de la loi Pinel et de son décret d’application, trois changements majeurs sont à noter :

L’article L.145-40-2 du code de commerce prévoit dorénavant que :

« Tout contrat de location comporte un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances liés à ce bail, comportant l’indication de leur répartition entre le bailleur et le locataire. Cet inventaire donne lieu à un état récapitulatif annuel adressé par le bailleur au locataire dans un délai fixé par voie réglementaire. En cours de bail, le bailleur informe le locataire des charges, impôts, taxes et redevances nouveaux.

Lors de la conclusion du contrat de location, puis tous les trois ans, le bailleur communique à chaque locataire :

1° Un état prévisionnel des travaux qu’il envisage de réaliser dans les trois années suivantes, assorti d’un budget prévisionnel ;
2° Un état récapitulatif des travaux qu’il a réalisés dans les trois années précédentes, précisant leur coût ».

L’article R. 145-35 dispose notamment que :

« Ne peuvent être imputés au locataire :

1° Les dépenses relatives aux grosses réparations mentionnées à l’article 606 du code civil ainsi que, le cas échéant, les honoraires liés à la réalisation de ces travaux ;

2° Les dépenses relatives aux travaux ayant pour objet de remédier à la vétusté ou de mettre en conformité avec la réglementation le bien loué ou l’immeuble dans lequel il se trouve, dès lors qu’ils relèvent des grosses réparations mentionnées à l’alinéa précédent ».

Ce texte prévoit également que les honoraires du bailleur liés à la gestion des loyers du local ou de l’immeuble faisant l’objet du bail ne peuvent être imputés au locataire.

En outre, l’article R. 145-36 donne obligation au bailleur, certes sans sanction, de procéder à la régularisation des charges, au plus tard le 30 septembre de l’année suivant celle au titre de laquelle il est établi ou, pour les immeubles en copropriété, dans le délai de trois mois à compter de la reddition des charges de copropriété sur l’exercice annuel.

Le bailleur doit également communiquer au locataire, à sa demande, tout document justifiant le montant des charges, impôts, taxes et redevances imputés à celui-ci.

Nous pouvons en ce sens noter un arrêt rendu le 30 mars 2023 par la cour d’appel de Douai, aux termes duquel il a été jugé que le bailleur ne peut mettre en œuvre la clause résolutoire sans avoir rempli préalablement ses obligations en matière de justification des charges (CA Douai, 30 mars 2023, n° 22/03601).

Conséquences du renouvellement prochain des baux commerciaux pré-Pinel

sur les refacturations de charges et de travaux

Les baux pré-Pinel qui seront prochainement renouvelés, seront soumis aux dispositions issues de la loi Pinel.

Les locataires y verront de nombreux avantages. Pour illustration, les clauses des baux transférant les travaux visés à l’article 606 du code civil seront, à compter du renouvellement, réputées non écrites, et le bailleur devra supporter le coût de ces travaux.

Les baux prévoyant des forfaits de charges devront être revus. A défaut, nous pouvons supposer, dans la mesure où les charges ne seront pas expressément exprimées, que le bailleur ne puisse procéder à leur refacturation.

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