lundi 3 avril 2017

Entrée en vigueur de l’ordonnance et du décret relatifs aux actions en réparation des victimes des pratiques anticoncurrentielles

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Le 9 mars 2017, l’ordonnance n°2017-303 et le décret n°2017-305 relatifs aux actions en dommages et intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles ont transposé la directive 2014/104/UE du 26 novembre 2014 : leurs dispositions facilitent l’exercice des actions en dommages et intérêts des victimes de pratiques anticoncurrentielles.

Les victimes de pratiques anticoncurrentielles ont la possibilité, dans tous les Etats membres de l’Union européenne, de saisir les juridictions nationales afin de demander la réparation de leurs préjudices. 

Elles ont la possibilité d’agir suite à une procédure de sanction engagée par une autorité de la concurrence ou indépendamment d’une telle procédure.

Depuis la loi Hamon n°2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, elles ont également la possibilité, en France, d’introduire une action de groupe devant les juridictions judiciaires.

Constatant que les actions en dommages et intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles étaient peu fréquentes en Europe, le Parlement européen et le Conseil ont adopté, le 26 novembre 2014, la directive 2014/104/UE relative à certaines règles régissant les actions en dommage et intérêts en droit national pour les infractions aux dispositions du droit de la concurrence des Etats membres et de l’Union européenne, afin d’harmoniser le cadre juridique de ces actions au sein des différents Etats membres.

En date du 9 mars dernier, cette directive a été transposée dans un nouveau titre du code de commerce (Livre IV - Titre VIII) et dans le code de justice administrative, par l’Ordonnance n°2017-303 et dans un Décret n°2017-305 relatifs aux actions en dommages et intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles.

Les nouvelles dispositions ont pour objectif de faciliter l’exercice des actions en dommages et intérêts des victimes des pratiques anticoncurrentielles. Elles accordent également au juge des pouvoirs étendus en matière de communication et de production de pièces.

I. Champ d’application

Comme la directive qui vise à l’indemnisation des victimes d’une infraction au droit de la concurrence, celle-ci étant définie dans son article 2 comme « une infraction à l'article 101 ou 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ou au droit national de la concurrence », les  textes nouveaux concernent les actions en réparation résultant :

  • d’une entente affectant ou non le commerce entre Etats membres (C.com L. 420-1 et 101 TFUE);
  • d’un abus de position dominante affectant ou non le commerce entre Etats membres (C.com L. 420-2 et 102 TFUE) ;
  • d’un abus de dépendance économique  (C.com L. 420-2) ;
  • des accords ou pratiques concertées accordant des droits exclusifs d’importation à une entreprise ou à groupe d’entreprises, en outre-mer (C.com L. 420-2-1) ;
  • des accords ou pratiques dans le domaine du transport (C.com L. 420-2-2) ;
  • des pratiques de prix abusivement bas (C.com L. 420-5).

Les dispositions de l’ordonnance entrent en vigueur le 11 mars 2017. 
S’agissant des dispositions de fond (comme celles sur les conditions de la responsabilité), la loi applicable est en principe celle en vigueur au jour du fait générateur du dommage. L’ordonnance devrait s’appliquer dans ce cas seulement aux infractions commises après son entrée en vigueur. Mais ce point suscitera certainement des débats, et il est regrettable que l’Ordonnance ne l’ait pas réglé expressément.

Par ailleurs, l’ordonnance prévoit que les dispositions de nature procédurale sont applicables aux instances introduites devant les juridictions administratives et judiciaires à compter du 26 décembre 2014.

Les dispositions du décret sont également applicables aux instances introduites à compter du 26 décembre 2014.

II. Conditions de la responsabilité

 

Principe de responsabilité

La réforme contient tout d’abord une grande évolution quand au débiteur de la réparation. 
L’article L. 481-1 du Code de commerce pose le principe selon lequel « toute personne physique ou morale formant une entreprise » est responsable du dommage qu’elle a causé du fait de la commission d’une pratique anticoncurrentielle.

Dans la directive, c’est l’entreprise qui est débitrice de réparation (M. Behar-Touchais et S. Carval, Le débiteur des dommages et intérêts dus en cas de pratique anticoncurrentielle,  Revue Concurrences N° 4-2015, Art. n° 75837, pp. 84-100, n°18; contra R. Saint-Esteben, La question de la responsabilité civile des sociétés mères du fait des infractions aux règles de concurrence commises par leurs filiales : La voix du silence, 23 juin 2014, Concurrences no 3-2014, Art. no 67244, pp. 5-7).
Le texte nouveau n’a pas osé faire directement de l’entreprise, qui n’est pas un sujet de droit, la débitrice de la réparation. C’est pourquoi elle fait des personnes juridiques qui composent l’entreprise les débitrices de la réparation. Un auteur relève à cet égard que  « si une décision définitive de l’autorité de la concurrence impute à une société mère l’acte fautif de sa filiale entièrement contrôlée, parce qu’elles font partie de l’entreprise qui a commis la pratique, la mère répondra comme la fille de la pratique anticoncurrentielle. Et c’est donc bien l’entreprise, par le biais de cette imputation, qui est condamnée, à travers les personnes physiques et morales qui la constituent. En outre, cette imputation sera susceptible de reposer sur la présomption parentale (qui veut qu’une mère qui détient 100% du capital de sa filiale soit présumée la contrôler sauf preuve contraire). Dans ce cas, le juge statuant sur les intérêts civils, devra tenir compte de cette imputation. » (cf M. Behar-Touchais, Du débiteur de la réparation dans l’ordonnance du 9 mars 2017 relative aux actions en dommages et intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles, RDC 2017 , 2ème trim., à paraître).

Allègement de la preuve pour les victimes

La victime doit en principe apporter la preuve de l’existence de la pratique et des préjudices subis tant dans leur principe (sous réserve de ce qui sera dit plus loin sur le passing on) que dans leur quantum. Ces preuves sont facilitées par une série de présomptions.

En premier lieu, les textes instaurent une présomption irréfragable de l’existence de la pratique anticoncurrentielle dès lors que son existence et son imputation ont été constatées par des décisions de l’Autorité de la concurrence, par la Cour d’appel de Paris ou de la Commission européenne qui ne peut plus faire l’objet d’une voie de recours (C. Com art. 481-2). Les victimes ont donc plutôt intérêt à n’introduire leur action qu’après la fin de la procédure publique afin de pouvoir bénéficier de cette présomption (action dite en follow on).  Si elles intentent une action autonome (dite stand-alone), elles devront prouver l'existence de la pratique anticoncurrentielle.

En deuxième lieu, la preuve de l’existence du préjudice et du lien de causalité entre l’entente entre concurrents  et le préjudice est facilitée puisque les textes instaurent une présomption (qui est toutefois réfragable) : « est présumé jusqu’à preuve contraire qu’une entente entre concurrents cause un préjudice » (L.481-7). Cette présomption résulte du fait qu’il est considéré que la plupart des ententes entre concurrents, perturbent le fonctionnement du marché. Cette présomption ne concerne cependant que les ententes entre concurrents, et donc principalement les cartels, et non les restrictions verticales de concurrence entre non concurrents, ni les abus de position dominante. C'est une aide précieuse pour les victimes qui auparavant devaient faire cette preuve en utilisant la technique du faisceau d'indices. 

La victime d'un cartel déjà condamné par l'Autorité de la concurrence de manière définitive bénéficie donc d'une présomption de responsabilité des auteurs du cartel. Leur faute résulte irréfragablement de la condamnation, et l'existence d'un préjudice causé par cette infraction est présumée. Il lui suffira donc de prouver l'ampleur de son préjudice.  

En troisième lieu, cette dernière preuve est facilitée. L’article L.481-3 du Code de commerce pose une liste indicative des différents types de préjudices subis par une victime de pratiques anticoncurrentielle. 

  • En font ainsi partie d'une part la perte subie, qui comprend la perte résultant du surcoût correspondant à la différence entre le prix du bien ou du service que l'acheteur direct a effectivement payé et celui qu’il aurait payé en l’absence de commission de l’infraction (sous réserve du passing on: cf infra), et la minoration résultant du prix plus bas que lui a payé l’auteur de l’infraction. 
  • D'autre part, le préjudice est également constitué du gain manqué, résultant notamment de la diminution du volume des ventes liée à la répercussion partielle ou totale du surcoût qu'il a été amené à opérer sur ses contractants directs ou de la prolongation certaine et directe des effets de la minoration des prix qu'il a dû pratiquer. 
  • De troisième part, est indemnisée  la perte de chance. 
  • Enfin, le texte admet la réparation du   préjudice moral.

L’idée d’une partie de la doctrine était de faire une sorte  de "nomenclature Dintilhac" (nomenclature des préjudices corporels) pour le préjudice dû aux pratiques anticoncurrentielles. Voici donc le début de cette nomenclature.

Enfin, l’argument de la répercussion par les acheteurs des surcoûts causés par la pratique anticoncurrentielle sur leurs propres clients ("passing on") est souvent invoqué par les auteurs des pratiques anticoncurrentielles afin de voir limiter leur responsabilité.  Sur ce point, la réforme prévoit deux articles qui ne sont pas si faciles à concilier.

D'une part, l'article L.481-4 du Code de commerce  vise la situation de la victime qui pourrait répercuter un surcoût. Il  opère un changement par rapport au droit antérieur en posant une présomption de non répercussion des surcoûts par l’acheteur direct ou indirect qui est « réputé n’avoir pas répercuté le surcoût sur ses contractants directs, sauf la preuve contraire d’une telle répercussion totale ou partielle apportée par le défendeur, auteur de la pratique anticoncurrentielle ». Le texte nouveau abandonne donc la solution ancienne de la Cour de cassation  sur la preuve du « passing on » (cf Cass. Com.15 mai 2002 n°11-18495 selon lequel il appartenait à la victime directe de prouver qu'elle n'avait pas répercuté le surcoût). Ceci se justifie par le fait que la jurisprudence ancienne  considérait que l'absence de surcoût permettait de déterminer le préjudice dont la preuve repose sur la victime, alors que la directive de 2014 a fait du "passing on" un moyen de défense de l'auteur des pratiques, dont il lui appartient de prouver que les conditions sont remplies. 

D'autre part, l'article 481-5 du Code de commerce vise ensuite la situation de lavictime qui supporte le surcoût (soit il s'agit de l'acheteur direct qui ne l'a pas répercuté, ce qui est présumé simplement par l'article précédent, soit il s'agit du  sous-acquéreur auquel le produit a été revendu par un acheteur qui lui a répercuté le surcoût). Dans ce cas,  l’article L. 481-5 du Code de commerce prévoit également que l’acheteur direct ou indirect qui prétend avoir subi l’application ou la répercussion d’un surcoût doit en prouver l’existence et l’ampleur. 
On peut comprendre que la présomption simple de l'article précédent ne concerne que la preuve entre la victime directe et l'auteur de l'infraction.

Mais pourquoi dire aussi dans ce dernier texte que "l'acheteur direct... qui prétend avoir subi l'application ... d'un surcoût doit en prouver l'existence ..". Il y a là une maladresse législative qui va susciter du contentieux.

C'est plus clair pour l'acheteur indirect qui s'est vu répercuter le surcoût. Lui, ne bénéficie d'aucune présomption simple, et doit faire la preuve de cette répercussion.

Cependant cette preuve est facilitée pour l'acheteur indirect, dès lors que l’acheteur est réputé avoir apporté la preuve de cette répercussion lorsqu’il justifie que le défendeur a commis une pratique anticoncurrentielle, que cette pratique a entrainé un surcoût pour le contractant direct du défendeur et qu’il a acheté des biens ou utilisé des services concernés par la pratique anticoncurrentielle, ou acheté des biens ou utilisé des services dérivé de ces derniers ou les contenant. Le défendeur peut cependant démontrer que le surcoût n’a pas été répercuté sur l’acheteur indirect ou qu’il ne l’a été que partiellement par son contractant antérieur.

Solidarité entre les différents auteurs de la pratique anticoncurrentielle

L’article L. 481-9 du Code de commerce instaure une solidarité entre les différents auteurs de la pratique anticoncurrentielle. La solidarité est retenue, plutôt que l'obligation in solidum des coauteurs d'un même dommage, pour être en conformité avec la directive. La contribution finale à la dette s’effectuera en proportion de la gravité de leurs fautes respectives et de leur rôle causal dans la réalisation du dommage.

Cet article prévoit cependant des exceptions, sous conditions, pour les petites et moyennes entreprises ainsi que pour la personne ayant bénéficié d’une exonération totale de sanction pécuniaire dans le cadre d’une procédure de clémence. En effet, le souci du législateur  est de ne pas priver d'intérêt les programmes de clémence. C'est ainsi que l'article L. 481-11 du Code de commerce dispose que "La personne mentionnée à l'article L. 481-1 ayant bénéficié d'une exonération totale de sanction pécuniaire en application d'une procédure de clémence n'est tenue solidairement de réparer le préjudice subi par les victimes autres que ses contractants directs ou indirects que si ces victimes n'ont pas pu obtenir la réparation intégrale de leur préjudice auprès des autres codébiteurs solidaires après les avoir préalablement et vainement poursuivis." Il en résulte que le demandeur de clémence reste un vrai codébiteur solidaire pour réparer les dommages causés à ses acheteurs directs ou indirects (sous-acquéreurs). En revanche, il devient un débiteur subsidiaire pour réparer les dommages des acheteurs directs ou indirects des autres membres du cartel (Un auteur a remarqué que même si le texte continue de parler de solidarité car la directive en parlait, elle donne au demandeur de clémence dans ce dernier cas un bénéfice de discussion, qui n'existe pas en principe dans la solidarité: cf M. Behar-Touchais, Une application curieuse de la solidarité : la solidarité avec bénéfice de discussion, RDC 2017, 2ème trim, à paraître).

Evaluation du préjudice

L’article L. 481-8 du Code de commerce prévoit qu’il faut évaluer "les dommages et intérêts" (le préjudice) au jour du jugement en tenant compte de toutes les circonstances qui ont pu affecter la consistance et la valeur du préjudice depuis le jour de la manifestation du dommage, ainsi que de son évolution raisonnablement prévisible.

L’article R. 481-1 du même code prévoit que le juge peut demander à l’Autorité de la concurrence des orientations sur l’évaluation du préjudice dont il est demandé réparation. L’Autorité a 2 mois pour communiquer ses observations. A défaut de réponse dans ce délai, l’instance est poursuivie à l’initiative des parties ou à la diligence du juge.

Délai de prescription: point de départ glissant

L'action en réparation se prescrit à l'expiration d'un délai de cinq ans.

Ce délai ne commence à courir qu’à partir du jour où le demandeur a connu ou aurait dû connaître de façon cumulative :

  • les actes ou faits litigieux et le fait qu'ils constituent une pratique anticoncurrentielle ;
  • le fait que cette pratique lui cause un dommage ;
  • l'identité de l'un des auteurs de cette pratique.

Toutefois, la prescription ne court pas tant que la pratique anticoncurrentielle n'a pas cessé.

Par ailleurs, les victimes du bénéficiaire d'une exonération totale de sanction pécuniaire en application d'une procédure de clémence bénéficient d’une protection supplémentaire car la prescription ne court pas « tant qu'elles n'ont pas été en mesure d'agir à l'encontre des auteurs de la pratique anticoncurrentielle autres que ce bénéficiaire » (C.com art. 482-1).

L’ordonnance élargit également les causes d’interruption de la prescription prévue à l’article L. 462-7 du Code de commerce. Maintenant, « tout acte tendant à la recherche, à la constatation ou à la sanction de pratiques anticoncurrentielles par l'Autorité de la concurrence, une autorité nationale de concurrence d'un autre Etat membre de l'Union européenne ou la Commission européenne interrompt la prescription de l'action civile », à l’instar de la prescription de l’action publique devant l’Autorité de la concurrence.

Auparavant, cet article prévoyait que la prescription de l’action civile des victimes était interrompue par l’ouverture d’une procédure devant l’Autorité de la concurrence, de la Commission européenne ou d’une autorité de concurrence d’un Etat membre.

Les dispositions relatives à la prescription qui allongent la durée d’une prescription s’appliquent lorsque le délai de prescription n’est pas expiré à la date d’entrée en vigueur de l’ordonnance (soit le 11 mars 2017). Il est alors tenu compte du délai déjà écoulé. 

Incidence de la transaction

L’article L. 481-13 du Code de commerce prévoit que la victime qui a conclu une transaction avec l'un des codébiteurs solidaires ne peut réclamer aux autres codébiteurs non parties à la transaction que le montant de son préjudice diminué de la part du préjudice imputable au codébiteur partie à la transaction. 

Par ailleurs, les codébiteurs non parties à la transaction ne peuvent réclamer au codébiteur partie à celle-ci une contribution à la somme qu'ils ont payée à cette victime.

En outre, sauf stipulation contraire, la victime peut réclamer au codébiteur partie à la transaction le paiement du solde de son préjudice imputable aux autres codébiteurs solidaires non parties à la transaction, après les avoir préalablement et vainement poursuivis. C'est une atteinte au fait que la transaction a entre les parties autorité de la chose jugée, mais le texte réserve lui même la clause contraire. 

La réforme contient une autre innovation intéressante pour inciter les auteurs de pratiques anticoncurrentielles à indemniser les victimes : L’Autorité de la concurrence pourra décider de réduire la sanction pécuniaire infligée à une entreprise lorsque celle-ci a, en cours de procédure devant l’Autorité, « versé à la victime de la ou des pratiques anticoncurrentielles sanctionnées une indemnité due en exécution d’une transaction au sens de l’article 2044 du Code civil » (article L.464-2 modifié).

III. Production et communication des éléments de preuve et secret des affaires

Sous réserve du secret des affaires, l’ordonnance instaure une procédure d’accès aux documents contenus dans le dossier détenu par l’Autorité de la concurrence ou détenus par un tiers. Même si certains ont rapproché ces règles de la procédure de discovery américaine, il faut relever que les sanctions prévues en cas de non-respect de ces règles ne peuvent conduire le dirigeant de l'entreprise en prison, ce qui fait tout de même une grande  différence.

Le demandeur en réparation peut demander la communication ou la production de pièces ou catégories de pièces détenues par le défendeur ou un tiers (C.com art. L.483-1). Il est étonnant que ce texte ne bénéficie qu’au demandeur et non au défendeur qui pourrait également rencontrer des difficultés pour accéder à certaines informations, par exemple à des informations lui permettant de prouver qu’il y a eu une répercussion du surcoût. Si les juges ne bilatéralisent pas ce texte, il faudra recourir pour le défendeur à l'article 145 du code de procédure civile.

La demande de production porte sur des " pièces ou de(s) catégorie(s) de pièces". Cette notion de "catégorie de pièces" a suscité bien des discussions pendant la préparation du texte de la réforme, et il est probable qu'elle sera à la source de contentieux. 

Lorsqu’il statue sur une demande de communication ou de production, le juge doit en apprécier la justification en tenant compte des intérêts légitimes des parties et des tiers. Il lui appartient de concilier la mise en œuvre effective du droit à réparation avec la protection du caractère confidentiel des éléments de preuve et l’efficacité de l’application du droit de la concurrence par les autorités compétentes (C.com art. L483-1).

Afin de protéger le secret des affaires, le juge peut décider que les débats auront lieu et que la décision sera prononcée hors présence du public. Il a également la possibilité de limiter la communication ou la production de la pièce à certains de ses éléments, restreindre l’accès à cette pièce et adapter la motivation de sa décision afin de préserver la confidentialité des informations couvertes par le secret des d’affaires (C.com art. L483-3 et -6).

Le juge peut enjoindre à l’Autorité de la concurrence, au ministre chargé de l’économie, à toute autorité de concurrence d’un Etat membre ou à la Commission européenne la production d’une pièce figurant dans son dossier. 

Cependant, cette production ne peut être ordonnée :

  • que lorsqu’une de parties ou un tiers n’est pas en mesure de fournir ces pièces (C.com art. L.483-4) ;
  • à condition que les pièces ne contiennent pas des déclarations d’une personne contribuant à établir la réalité d’une pratique anticoncurrentielle et à en identifier les auteurs en vue de bénéficier d’une exonération totale ou partielle de sanctions en application d’une procédure de clémence, et ne comportent pas une auto-incrimination de la part d’une entreprise (C.com art. L.483-5). On relèvera à cet égard que seul l'aveu initial du demandeur de clémence est soumis à confidentialité, et non les pièces qu'il a fournies pour collaborer à la procédure.

Le défaut de respect ou le refus de se conformer à une injonction de communication ou de production de pièces, la destruction de pièces pertinentes, le non-respect des obligations imposées par une injonction du juge protégeant des informations confidentielles ou le refus de s’y conformer , sont sanctionnés par  une amende civile de 10.000 euros. Le juge peut également en tirer toute conséquence de fait ou de droit au préjudice de l’auteur du manquement (C.com art. R.483-14).

Ordonnance n°2017-303 et décret n°2017-305 relatifs aux actions en dommages et intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles 

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