Commission-affiliation : illicéité du réapprovisionnement pendant les soldes
mardi 31 mai 2022

Commission-affiliation : illicéité du réapprovisionnement pendant les soldes

En matière de commission affiliation un commissionnaire peut-il se réapprovisionner durant la période des soldes auprès de son commettant pour proposer les produits en soldes alors qu'il ne dispose pas lui-même du stock ?

C'est le sujet qui vient d'être l'objet d'un arrêt rendu le 22 février 2022 par la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation qui est à la fois intéressant mais à mon sens sujet à critique.

Dans les faits, en 2018, un commissionnaire dans un système de commission affiliation s'était approvisionné dans les trente jours auprès de son commettant pour proposer des produits en soldes.

En France, il existe un article L 3103 du Code de Commerce qui prévoit que les produits qui font l'objet de soldes doivent avoir été détenus et payés au moins 30 jours avant le début de la période des soldes. En l'occurrence, ce n'était pas le cas puisqu’effectivement les produits étaient détenus par le commettant ; en matière de commission affiliation, c'est assez logique puisque le commettant reste le propriétaire du stock ; le commissionnaire ne fait que vendre le stock de son commettant et perçoit une commission sur les ventes.

En l'occurrence, le tribunal correctionnel la Cour d'Appel et maintenant la Cour de Cassation considèrent pour autant que ce réapprovisionnement est illicite et ont décidé d'opérer une sanction pénale à hauteur de 10 000 euros pour le commissionnaire.

Cette sanction est critiquable. Pour quelle raison ?

Puisque depuis 2004, la Chambre criminelle de la Cour de Cassation considère que deux sociétés étroitement liées d'un point de vue économique peuvent se réapprovisionner entre elles pour proposer en solde des produits, bien que ces produits n'aient pas été détenus dans les 30 jours. En l'occurrence, la référence est prise eu égard à l'article 233-1 du Code de Commerce qui a trait à la relation mère-fille et donc aux succursales.  Très récemment, la Commission d’Examen des Pratiques Commerciales a rendu un avis reprenant cette jurisprudence de 2004, au terme duquel une question lui a été posée de savoir si effectivement une maison mère pouvait réapprovisionner dans les 30 jours ses succursales via la plateforme logistique dont elle disposait ; la Commission d’Examen des Pratiques Commerciales a considéré que cette pratique n'était pas illicite puisqu’effectivement la société mère et les succursales avaient un lien économique étroit ; en revanche, dans l’arrêt du 22 février 2022, la notion qui est utilisée par la Chambre Criminelle est la notion de société juridiquement indépendante ; la Chambre Criminelle considère qu'effectivement, les deux sociétés juridiquement indépendantes ne pouvaient être considérées comme une et seule société et disposer du même stock

On voit donc coexister deux notions parallèlement : cette notion de sociétés juridiquement indépendantes et cette notion de sociétés étroitement liées, aux termes desquelles dans une acception, elle est considérée que la pratique est licite et dans une autre qu'elle est illicite.

A mon sens, c'est plus contestable puisqu’effectivement si on considère que dans une relation mère-fille, on peut estimer que le stock qui pour autant est le stock de la société fille, qui est également indépendante lui appartient, dans un process de commission affiliation, c'est encore plus le cas, puisque le stock est détenu par le commettant ; le commissionnaire ne fait que les vendre et effectivement perçoit des commissions, alors que le commettant a la possibilité effectivement de conseiller un prix de vente maximum à son commissionnaire. 

C’est donc un arrêt intéressant dans le sens où il rappelle les conditions pour pouvoir proposer les produits en soldes et notamment quant à la détention du stock mais un arrêt aussi source de critiques il faudra être vigilant à la position de la doctrine sur cet arrêt pour se positionner sur la pratique des soldes qui arrivent prochainement.

Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 février 2022, 21-83.226

Guillaume Gouachon
Avocat Associé

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