Obligation de reclassement d’un salarié au sein d’un réseau de franchise (Franchise Magazine, janvier 2016)
lundi 25 janvier 2016

Obligation de reclassement d’un salarié au sein d’un réseau de franchise (Franchise Magazine, janvier 2016)

Une salariée d’un franchisé Mac Donald’s, victime d’un accident du travail, est déclarée inapte à son poste d’employée de restauration. Toutefois, le médecin du travail déclare qu’elle pourrait occuper un poste d’emploi de bureau avec possibilité de changer de position.
Considérant qu’il existait une impossibilité de reclassement au sein de l’entreprise, l’employeur franchisé licencie l’employée. 

Il résulte de l’article L. 1226-10 du Code du Travail que l’employeur a une obligation de reclassement:

« Lorsque (…) le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail. »

Contestant le licenciement, l’employée a saisi le Conseil de prud’hommes de Montauban, qui a  jugé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.
Saisie en appel, la Cour d’Appel de Toulouse considère que « faute par l’employeur d’apporter des éléments démontrant l’impossibilité de permutation, le périmètre du reclassement devait être élargi aux autres membres des franchisés Mac Donald’s ». 
En effet, la Cour d’Appel relève dans les motifs de la décision que « l’activité dans le cadre d’un contrat de franchise ne suffit pas à démontrer l’absence de possibilité de permutation du personnel et ce, alors même que les entreprises d’un même réseau ont nécessairement une organisation et des éléments communs ». L’organisation et l’existence d’éléments communs sont induits  par la nature même du réseau : tous ses membres répliquent des normes qui sont communes bénéficient d’une standardisation des activités et des organisations.
La Cour juge que le franchisé ne justifie pas au cas d’espèce d’une recherche loyale et sérieuse, en limitant ses recherches à sa seule entreprise, étant un franchisé, société indépendante du groupe Mac Donald’s. Il ne démontre pas l’impossibilité dans laquelle il se trouvait de procéder au reclassement. Il n’a donc pas respecté son obligation de reclassement. Le licenciement de l’employée est considéré sans cause réelle et sérieuse.

Cette solution n’est pas inédite. Les juges ont déjà eu l’occasion d’affirmer que le franchisé avait l’obligation de proposer le reclassement imposé par le Code du travail en cas de licenciement économique en proposant au salarié concerné un poste dans un autre point de vente du réseau de franchise (CA Montpellier, 17 sept. 2014, n° 13/02988, n° 13/02991, n° 13/02989). Les possibilités de reclassement d’un salarié déclaré inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment doit en effet s'apprécier au sein du groupe auquel appartient l'employeur, doivent être recherchées parmi les entreprises dont les activités, l'organisation et le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel. Ainsi, la recherche doit  porter sur les différentes sociétés sous contrat de franchise dans la mesure où il existe des permutations de personnel entre les sociétés relevant de cette franchise (Cass. soc., 20 févr. 2008, n° 06-45335). La Cour d’Appel de Toulouse rappelle au cas d’espèce que le groupe au sein duquel le reclassement doit être proposé  peut être indépendant des relations capitalistiques entre différentes sociétés, les possibilités de reclassement pouvant résulter de simples relations de partenariat.

Certaines décisions ont certes pu donner des solutions différentes, dans le cas de coopérative d’achat. Ainsi la Cour d’Appel de Lyon, dans une décision du 7 novembre 2014  (n° 12/03940) a jugé qu'un franchisé qui licencie un salarié n'a pas à rechercher des solutions de reclassement dans l'ensemble des sociétés du groupement et en particulier au sein de la coopérative d'achat à laquelle a adhéré le magasin, si les relations entre le magasin et la coopérative d'achat se limitent aux achats de produits vendus ensuite dans le magasin, les deux entreprises adhérentes de la coopérative n’ayant pas la même activité.

Cependant, la Cour de cassation avait rappelé dans une décision du 10 décembre 2014 (n° 13-18.679)  qu’il appartient à l'employeur, qui prétend s'être trouvé dans l'impossibilité d'effectuer un tel reclassement, d'en apporter la preuve. Elle avait rappelé à ce titre que le fait que l'employeur exerce son activité dans le cadre d'un contrat de franchise n'emporte pas à elle seule la démonstration de l'absence de possibilité de permutation du personnel. Il lui appartient donc de démontrer la possibilité ou l'impossibilité d'une telle permutation.

En l’espèce, la Cour d’Appel de Toulouse a appliqué ce principe, en indiquant avec force qu’en principe,  les entreprises d’un même réseau ont des éléments d’organisation et des éléments communs.

Par conséquent, la jurisprudence adopte une définition large de la notion de groupe dans la mesure où même si les entreprises membres d’un réseau de franchise n’ont en principe aucun lien capitalistique entre elles, elles vont être considérées comme présentant des suffisamment d’éléments communs pour permettre a priori un reclassement des salariés. En pratique, il appartient donc aux sociétés membres d’un réseau de franchise, ou plus généralement d’un réseau organisé, d’interroger systématiquement les autres sociétés membres du groupe et de conserver la preuve de cette recherche. Cela permettra en effet de démontrer que  les recherches nécessaires ont été effectuées et de ne pas être condamnées pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. 

Cour d’Appel de Toulouse, 4ère Ch. Section 2 Chambre Sociale, 9 octobre 2015 (RG : 13/05919)

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