KPMG Le financement de la reprise d'un réseau de franchise
lundi 30 novembre -0001

KPMG Le financement de la reprise d'un réseau de franchise

1 – Quel est le montant à prendre à compte au moment de financer la reprise d’un réseau ?

Réfléchir au bon financement de la reprise d’un réseau de franchise nécessite de bien poser la question de ce qui doit être financé. 

L’assiette de financement  à déterminer va inclure en tout premier lieu la valeur du réseau telle que vous avez pu la déterminer à travers le chapitre qui en décrit les principes. Mais cette valeur va être corrigée au travers de la négociation, et il faut très rapidement poser des bornes pour le prix effectif que vous êtes prêt à consentir pour devenir propriétaire de ce réseau : l’attrait de la marque créée, la dynamique de croissance de l’activité sous-jacente ainsi que le  nombre de franchisés vont peser sur les négociations de cette valeur théorique. 

Une fois cadrée ce prix de transaction, et le pourcentage de la structure porteuse des contrats et de la marque que vous allez acquérir, il est important de bien réfléchir aux conséquences financières de ce qui est prévu en matière de développement ou de restructuration du réseau.  

L’établissement d’un business plan complet, détaillé, et cohérent par rapport à ce que vous imaginez pour le futur de l’enseigne est donc une priorité au moment de la négociation, et doit permettre non seulement de comprendre comment sera remboursée la dette issue de la négociation sur le prix, mais plus largement quelle est la capacité du réseau à faire face à l’endettement lié à sa reprise et aux investissements nécessités par le plan d’action du repreneur.

Montant à financer = valeur du réseau + impact prévisible de la négociation + investissements liés à la reprise du réseau afin de mettre en place la vision du repreneur

2 – Qui sont les financeurs possibles de l’opération ?

Si vous avez soigneusement préparé la négociation avec les cédants de la structure qui portent le réseau, vous devrez faire de même avec l’ensemble des acteurs qui vont intervenir sur le financement de votre opération. Ceux-ci peuvent être grossièrement classés en deux parties : les intervenants en dette et les intervenants en fonds propres.  

Les intervenants sous forme de dettes, essentiellement des banques, vont s’interroger sur votre capacité à rembourser les emprunts mis en place, en analysant les risques liés à votre activité, les risques liés au financement que vous mettez en place, et les garanties que vous êtes susceptibles de mobiliser pour réduire leur perte en cas de défaut de paiement. L’articulation de votre négociation doit donc se concentrer sur le business plan du réseau, votre capacité à le mettre en œuvre, et avoir une réflexion sur la cohérence du financement mis en place au regard des possibilités de remboursement prévues dans le plan d’affaires.

Les intervenants en fonds propres vont détenir à vos côtés et selon des modalités à déterminer  une quote-part de la propriété de la structure cible ou de la société constituée pour en prendre le contrôle. Ceux-ci sont donc à considérer comme des actionnaires comme vous-mêmes et vont obéir à deux logiques différentes suivant la durée prévisionnelle de leur investissement. 

S’ils investissent à vos côtés pour pérenniser une relation avec le réseau, et donc envisagent un investissement à long terme, ces partenaires vont être soucieux de bien sécuriser ce qui motive leur entrée au capital (relation commerciale avec le réseau, …).  L’avantage de ce type d’actionnariat est sa stabilité, l’inconvénient réside dans le fait qu’ils souhaitent éviter que le réseau tombe à terme entre des mains qui leur soient hostiles, et donc essayent généralement d’obtenir une priorité lors d’une future vente de vos parts.

S’ils investissent à vos côtés pour une période plus courte (3/5 ans), ils sont généralement assimilables à des fonds d’investissement, et leur motivation est liée au taux de rendement interne de leur investissement. Ce TRI (taux de rendement interne)  ou ROI (return on investment), représente  le taux de rendement équivalent à ce qu’ils toucheront au moment de la revente de leur quote-part dans la structure dans laquelle ils auront investi. 

Dans le cas simple d’une cession à l’issue de trois ans 

TRI = (montant final/montant initial)^(1/3)-1

Ce qu’il faut retenir, c’est que des actionnaires en fonds propres sont davantage intéressés par un discours sur la valeur future de leur investissement et sa croissance par rapport à leur valeur d’entrée que par cette dernière de manière globale.

N’oubliez jamais qu’un prêteur va regarder la liquidité créée par votre structure afin d’être certain que vous le remboursiez.

Un investisseur va mesurer le différentiel de valorisation que vous anticipez entre le rachat et son horizon de sortie, ainsi que le profil de ceux qui sont susceptibles de lui racheter sa participation.

3 – Comment raisonnent vos partenaires financiers ?

Au-delà des différences de raisonnement, vos partenaires financiers vont s’attacher à se faire une opinion sur sept composantes essentielles de votre projet :

La première concerne votre capacité à mener le projet que vous avez imaginé, à porter le réseau, et à piloter dans tous les environnements, favorables pour de la croissance comme défavorable si des restructurations sont à mener. Pour cela, ils vont s’attacher à examiner au travers de vos expériences passées ce qui laisse augurer d’un élément favorable en ce sens ou non. Vous devez aider à cette lecture en préparant vous-même les éléments de votre parcours professionnel qui vont dans le sens de cette fonction.

La seconde concerne le business model de votre projet, c'est-à-dire la description de l’écosystème interne et externe de votre réseau qui conduit à justifier l’ensemble des niveaux et des modes de rémunération qui sont pratiqués. Le business model va s’attacher à décrire les dix éléments suivants :

  • Quelles sont les activités clés ?
  • Quels sont les partenaires clés,
  • Quelles sont les ressources clés ?
  • Quelles sont les relations avec les clients finaux ?
  • Quelles sont les relations avec les franchisés ?
  • Quels sont les segments de clientèle identifiés ?
  • Quelle est la proposition de valeur au client ?
  • Quels sont les canaux de distribution ?
  • Quels sont les types de flux de revenus ?
  • Quelle est la structure de coût ?

La troisième prolonge le point précédent par l’explication de l’opinion que vous avez sur la situation présente du réseau et ce que vous souhaitez en faire. Cette présentation de votre projet sera associée à une analyse de risque pointue qui va démontrer que vous avez une vision objective de la situation et de ce type de changement, et que vous avez pensé à toutes ses composantes. Il est aujourd’hui courant d’adjoindre à cette analyse la présentation d’une scénario dit dégradé qui comme son nom l’indique va prendre en compte une juxtaposition de points défavorables, et montrer à la fois l’impact sur les résultats et la trésorerie, ainsi que les décisions que vous seriez susceptibles de prendre. 

La quatrième va décrire les éléments de pilotage que vous allez privilégier et qui sont en cohérence avec les sources de valeurs créées. Il s’agit de mettre en valeur les indicateurs liés au métier, et les indicateurs que l’on regarde sur ce type d’opération : croissance du CA, nombre de franchisés, EBITDA, free cash-flow, Gearing (dette financière nette / capitaux propres). 

La cinquième sera une analyse fine de la production de cash-flow, qui va servir de base à l’évaluation de vos associés et à l’analyse du recouvrement par vos futurs banquiers. Ce document doit constituer la traduction chiffrée de votre projet et en réunir toutes les conséquences économiques et financières chiffrables. Une grande attention doit être portée à son élaboration car il va se retrouver comme un fondement essentiel de la décision de vos futurs partenaires.

Le sixième va faire le point sur les paramètres qui vont piloter la transaction proprement dite : la structure concernée par la reprise,  le mécanisme de valorisation, les points particuliers de cette transaction (engagements pris ou reçus concernant des personnes, des clients…), son calendrier prévisionnel.

La septième sera la proportion entre dettes et capitaux propres qui vont servir à financer la reprise du réseau. Ce ratio Dettes/capitaux propres mesure le risque supplémentaire apporté  par le financement du projet, et sera regardé de manière attentive. En toute logique, ce ratio devrait être compris entre 1 et 2, mais l’appréciation qui sera portée sur son niveau dépend de l’environnement du projet et des cinq premiers paramètres que nous avons balayés.  

Ces sept éléments vont constituer la trame de votre premier dossier de présentation (ou executive summary), et permettre à vos interlocuteurs de mesurer votre sérieux, et d’orienter directement la seconde étape de questionnement, dans laquelle sera présenté le business plan de manière complète. 

N’oubliez jamais de faire signer à vos interlocuteurs un engagement de confidentialité (ou NDA non disclosure agreement) qui permet d’éviter la circulation de ces documents qui sont par nature confidentiels.

4 – Impact de la maturité et du profil du réseau sur son financement

Il est important de bien analyser de quelle catégorie ressort le réseau que vous souhaitez acquérir pour comprendre la mise en œuvre des logiques que nous avons parcourues jusque-là.

Vous pouvez dans une approche très simpliste vous posez les trois questions  suivantes :

  • Le réseau est-il en démarrage, en croissance, stabilisé  ou en déclin ?

La maturité du réseau s’apprécie à la fois sur sa capacité de recrutement et d’occupation des territoires pertinents, et sur l’adaptation de sa promesse et du contenu qui doit l’accompagner au client final…et au franchisé. La jeunesse d’un réseau peut signifier des investissements importants mais des opportunités de croissance forte, la maturité d’un réseau doit s’accompagner d’une réflexion sur le vieillissement (et donc le rajeunissement) de son concept, et l’attention à porter à des horizons de raisonnement trop optimistes. De manière caricaturale, la jeunesse du réseau va générer des attentes fortes en termes de capitaux propres, alors qu’un réseau mature va permettre de maximiser l’endettement. La maturité du réseau va vous entraîner vers des choix de fonds d’investissement spécifiques qui sont naturellement plus à l’aise dans certaines situations et peuvent d’ailleurs constituer un réel soutien pour vous (fonds de retournement pour des réseaux en difficultés)

  • Est-ce que le business model du franchisé et du franchiseur fonctionnent ? (double emploi avec le premier ?)

L’étude de la rentabilité du réseau et des conditions qui la favorisent est un élément qui va déterminer une notion de visibilité sur l’avenir, et vous inciter à la plus grande prudence sur la récurrence des revenus et flux que vous avez pu observer dans le passé, et dont votre cédant vous assure de la grande stabilité. Les difficultés des franchisés rejaillissent irrémédiablement sur la tête de réseau, et sans anticipation de cette évolution cela peut coûter très cher.  La prise en compte de difficultés dans le réseau de franchisés va militer pour un examen très pointilleux de la valeur ainsi qu’un renforcement des capitaux propres apportés relativement à l’endettement requis.

  • Le réseau est-il faiblement ou fortement succursaliste ?

L’existence de succursales  au sein d’un réseau de franchisés permet à la fois de disposer de sources de liquidités en cas de besoin de financement (cession des affaires correspondantes) et  permet également au franchiseur de justifier d’une expérience  dans le métier exercé. 

Cependant cela implique d’ajouter aux investissements collectifs les investissements du réseau détenu, en immobilisation, et aussi en BFR si l’activité requiert du cash pour son exercice. Il est certain que l’existence de succursales est un élément qui va rassurer des banquiers dans une perspective de garantie interne, alors que certains investisseurs en fonds propres peuvent considérer que le métier du franchiseur n’est pas d’exercer directement mais au contraire d’avoir un levier de création de revenus maximal sans avoir à porter des investissements autres que ceux correspondant à la tête de réseau.

5 – Le rôle central du business plan

C’est un document fondamental qui vous engage aux yeux de vos interlocuteurs, il ne faut jamais l’oublier, car il est une mesure de votre crédibilité tant vis-à-vis des partenaires en fonds propres que des partenaires bancaires. Nous avons vu plus haut que les écarts de réalisation postérieurs à l’acquisition pouvaient mener à des situations de litige mettant les banques dans un rapport de force très favorable (covenants) ou à des pertes de valeur pour vous (clauses de relation au profit des minoritaires).

Voici le plan d’un business plan :

  • Synthèse des éléments clés de votre projet (on retrouve l’executive summary) 
  • Porteurs de l’opération et mise en avant de leurs compétences au regard de leur expérience 
  • Description des marchés visés par le réseau de franchise, de leur segmentation, et identification des critères d’achats des clients 
  • Analyse concurrentielle et positionnement du réseau de franchise visé
  • Formulation d’une ambition et des points de transformation majeurs du réseau et de ses constituants : mise en perspective des compétences des porteurs de projet
  • Passage en revue détaillée des ressources disponibles (ressources humaines et investissements), des principaux process du réseau et de leur évolution
  • Synthèse du plan de transformation sous forme de grandes échéances et d’objectifs
  • Opération envisagée : mode de valorisation, engagements pris ou reçus, financement envisagé, scénario de sortie des partenaires en fonds propres
  • Plan d’affaires : traduction chiffrée du plan d’action permettant de comprendre la formation des cash flows, la formation de la rentabilité, et la structure financière qui en résulte. Mise en évidence du remboursement de la dette et de la création de valeur actionnariale.
  • Mise en évidence des indicateurs clés à suivre
  • Identification d’un scénario de crise, du plan d’action anticipé et de ses résultats au regard de la valeur

6 - le rôle d’un expert-comptable dans le financement de votre opération

L’accompagnement par un professionnel  des questions économiques financières est motivé par la complexité des questions à mener en parallèle :

  • La conception générale de l’opération et sa faisabilité au regard de vos objectifs
  • La documentation du projet et ses implications pour vous tout au long de votre investissement
  • L’ampleur des négociations à mener et la nécessité de disposer d’outils qui vous permettent d’apporter des réponses précises et favorables
  • La prise de distance que permet le dialogue avec un interlocuteur rompu à ces questions
  • La capacité à ne pas subir toutes les séances de travail, notamment les séances très techniques, mais à se concentrer sur les discussions à fort enjeux, et à bien identifier toutes les décisions à prendre et leurs conséquences.

L’important est de bien lister l’ensemble des travaux à mener, de disposer d’une proposition de mission listant bien les contributions de chacun, ainsi que le coût lié à l’intervention lors des séances de négociation. 

Sur ce sujet, vous pouvez également voir la vidéo de Gouache Avocats : 

https://www.gouache.fr/P-286-18-C1-vente-d-un-reseau-de-franchise.html

Vous pouvez également découvrir notre fiche partenaire KPMG sur notre site ainsi que le site officiel KPMG pour de plus amples informations.