Contrat de franchise et non-concurrence post-contractuelle
lundi 15 janvier 2024

Contrat de franchise et non-concurrence post-contractuelle

La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 10 mai 2023, rappelle que les clauses de non-concurrence post-contractuelles prévues dans les contrats de franchise doivent être proportionnées aux intérêts légitimes du franchiseur sans porter une restriction excessive à la liberté d’entreprendre du franchisé.

En l’espèce, un contrat de franchise était conclu le 12 septembre 2013, ayant pour concept la construction de maisons individuelles en « prêt-à-finir » par lequel le franchisé, après avoir sous-traité les opérations de construction, livrait à ses clients des maisons construites à un stade leur permettant de faire seuls les travaux de finition. Près de 5 ans plus tard, le franchisé, alléguant de graves manquements de la part de son franchiseur, notifie la résiliation immédiate du contrat de franchise avant de se réaffilier au sein d’un réseau concurrent. Le franchiseur assigne donc son ancien partenaire aux fins de faire prononcer la résiliation du contrat à ses torts exclusifs et de se faire indemniser le préjudice né de la violation de la clause de non-concurrence que celui-ci stipulait.

Débouté de ses demandes en première instance, le franchiseur invoquait le bénéfice de l’article L341-2 du Code de commerce. Introduite par le législateur via la loi Macron du 6 aout 2015, cette disposition exige la réunion de 3 conditions cumulatives emportant la validité des clauses ayant pour effet de restreindre la liberté d’exercice de l’activité commerciale d’un franchisé postérieurement au terme ou à la résiliation de son contrat. Le non-respect de ces conditions lors de leur rédaction réputant ces dernières non écrites.

En dépit des manquements allégués et imputés au franchiseur lors de l’exécution du contrat de franchise, on peut facilement comprendre dans cette affaire l’enjeu du respect de cette clause. L’objectif étant d’empêcher tout détournement de son savoir-faire par un concurrent.

La Cour d’appel de Paris, a opéré à ce titre 2 rappels, l’un sur l’application temporelle de la disposition, l’autre portant sur le nécessaire équilibre entre les intérêts légitimes du franchiseur et la liberté d’entreprendre du franchisé lors de la rédaction de ces clauses.

Sur l’applicabilité de l’article L341-2 du Code de commerce, les juridictions de fond (dont la Cour d’appel de Paris) considéraient que cet article était applicable à des contrats en cours lors de son entrée en vigueur. C’est finalement dans un arrêt du 16 février 2022 que la chambre commerciale de la Cour de cassation a pu en juger autrement. Un arrêt si didactique, que la Cour d’appel en a repris la substance dans cette affaire pour en écarter son application aux motifs que « la loi nouvelle ne peut, sauf rétroactivité expressément stipulée par le législateur, remettre en cause la validité d’une clause contractuelle régie par les dispositions en vigueur à la date où le contrat a été passé » (Cass. Com, 16 févr. 2022, n°20-20429). La cour répond ici sans surprise par l’inapplicabilité de l’article L341-2 au contrat litigieux, signé en 2013, soit antérieurement à l’entrée en vigueur de la disposition. 

Dans un second temps, la Cour reconnait que les clauses de non-concurrence post-contractuelles peuvent être considérées comme inhérentes à la franchise. En effet, celles-ci permettent d’assurer la protection du savoir-faire transmis, lequel ne devant profiter qu’aux membres du réseau. Il est aussi essentiel que le franchiseur puisse disposer du temps nécessaire à la réinstallation d’un franchisé dans la zone d’exercice de l’activité. 

Cependant, de telles clauses doivent être proportionnées entre la protection des intérêts légitimes du franchiseur et la liberté d’exercice de la profession du franchisée. Cette proportionnalité est appréciée in concreto par les juges. En l’espèce, le premier alinéa de la clause prévoyait l’interdiction pour le franchisé de s’affilier dans un réseau « comparable au réseau [du franchiseur] » sur l’ensemble du territoire national et ce durant un délai d’un an à compter de l’échéance du contrat. Le second une interdiction de créer un réseau concurrent dans les mêmes délimitations géographiques mais pour une durée de 2 ans. Le dernier alinéa quant à lui prévoyait une interdiction, pour le franchisé, de poursuivre une activité de construction de maisons individuelles sur la région du territoire qui lui était concédé pour une durée d’un an. La Cour juge ici que la clause est disproportionnée par rapport à l’objet du contrat, notamment par son étendue géographique et sa durée, mais aussi par l’activité de construction désignée au sens large alors même que le savoir-faire du franchiseur se limitait à la construction très spécifique de maisons individuelles en prêt-à-finir. 

Il convient donc pour vous, franchiseurs, de faire preuve de la plus grande prudence lors de la rédaction de vos clauses de non-concurrence, lesquelles sont appréciée en considération de la durée et de l’étendue géographique de la restriction, mais aussi de l’activité visée, propre à votre savoir-faire.

CA Paris, 10 mai 2023, n°21/01738   


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