Quid de la limitation contractuelle des ventes en ligne en période de pandémie
Un franchisé ne peut reprocher à son franchiseur de lui avoir interdit, lors de la pandémie du Covid-19, d’ouvrir un site internet marchand, s’il ne remplit pas les critères contractuellement définis, ou d’utiliser la marque pour l’exploitation de ce site internet, lorsque son utilisation est réservée aux points de vente physique.
En l’espèce, le 24 avril 2019, une société signe un contrat de franchise pour l’implantation d’un magasin de running franchisé au sein d’une galerie marchande. Le magasin a ouvert le 23 juillet 2019, date constituant le point de départ du contrat de franchise.
Quelques mois plus tard, le franchisé est contraint de fermer boutique temporairement du fait des mesures sanitaires décidées par le gouvernement. En pleine crise du Covid-19, et face à l’absence de solution e-commerce, le franchisé adresse un courrier au franchiseur afin de lui proposer de résilier amiablement et sans indemnité le contrat avec fermeture du magasin.
En substance, le franchisé reproche un manquement du franchiseur à une obligation d’assistance, pendant la période de confinement et de fermeture des commerces non essentiels, en l’absence de possibilité d’utiliser un système internet de commande et de retrait en magasin (click-and-collect).
L’obligation de faire évoluer le savoir-faire est effectivement parfois considéré comme étant une composante de l’obligation d’assistance du franchiseur.
Il lui reproche d’avoir refusé de mettre en place un site marchand, et donc de n’avoir pas actualisé ses méthodes commerciales sur la période affectée par le Covid-19, alors que dans le même temps la vente en ligne lui était restreinte contractuellement.
De son côté, le franchiseur contestait les motivations du franchisé après avoir constaté par exploit d’huissier que les stocks avaient été écoulés de sortes que tout portait à croire que le franchisé souhaitait uniquement sortir du réseau de manière anticipée.
Face au refus du franchiseur de résilier amiablement le contrat de franchise, le franchisé décide de cesser l’exploitation de son fond de commerce sous l’enseigne. Après envoi d’une mise en demeure de régulariser la situation restée sans effet, le franchiseur constate la résiliation du contrat aux torts exclusifs du franchisé et sollicite l’indemnisation du préjudice subi.
Faute d'obtenir le paiement des sommes réclamées, le franchiseur a assigné le Franchisé devant le tribunal de commerce de Pau.
Il appartenait ici aux juges de déterminer si la résiliation était imputable au franchiseur ou au franchisé.
Dans ce cas d’espèce plusieurs limites à la vente en ligne étaient soulignées.
- D’une part, la création du site internet marchand du franchisé était subordonné à ce que celui-ci dispose au préalable d’un point de vente physique ouvert et exploité depuis plus d’un an. Ce qui n’était pas le cas pour le franchisé ;
- D’autre part, le nom de domaine du site internet ne devait pas être constitué de la marque et le franchisé s’interdisait d’acheter des mots-clés de référencement, des liens commerciaux et/ou autres pop-up composés en tout ou partie de la marque ;
- Enfin, aucune affiliation en ligne à la marque ne devait être revendiquée compte tenu d’une instance en cours opposant le réseau de franchise au site marchand I-Run le poursuivant des chefs de concurrence déloyale et parasitisme.
Au regard de ces différents éléments, la Cour d’appel de Pau rejette toute faute du franchiseur dans la mesure où l’ensemble de ces limites avaient été portées à la connaissance du franchisé lors des échanges précontractuels. Ce dernier avait donc contracté en toute connaissance de cause.
On comprend à travers la motivation de la solution, que le franchiseur n’était finalement pas mesure de faire évoluer son savoir-faire concernant la vente en ligne du fait de la procédure en concurrence déloyale et parasitisme en cours.
La Cour d’appel souligne également que les restrictions portées par les mesures législatives et réglementaires destinées à limiter la propagation du covid 19 étaient en tout état de cause extérieures au franchiseur.
Le Franchisé ne pouvait donc pas se prévaloir d’un manquement du franchiseur à ses obligations de sorte qu’il commet un manquement de nature à justifier la résiliation du contrat à ses torts exclusifs lorsqu’il cesse d'exploiter son fonds de commerce et qu’il cesse de verser toute redevance au franchiseur.
Par ailleurs, la Cour d’appel s’est prononcée sur l’indemnisation du préjudice subi par le franchiseur.
En l’espèce, le contrat de franchise stipulait une clause pénale selon laquelle en cas de rupture anticipée du contrat par le franchisé, ce dernier doit verser les sommes correspondantes aux redevances dues jusqu'au terme contractuel convenu.
Le franchiseur s’est donc prévalu de cette clause afin d’obtenir l’indemnisation du préjudice subi du fait de la résiliation anticipée du contrat aux torts exclusifs du franchisé.
La Cour d’appel a cependant constaté que le franchiseur avait pu rapidement ouvrir un nouveau magasin sur ce territoire de sorte que la clause pénale présentait un caractère manifestement excessif au regard du préjudice effectivement subi par le franchiseur.
La Cour d’appel a donc fait usage de son pouvoir modérateur en matière de clause pénale pour réduire le montant de l’indemnisation sollicitée par le Franchiseur.
CA Pau, 2e ch., sect. 1., 30 mai 2023, RG n°21/03973
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