Hôtels : à qui incombent les travaux exigés par l’administration ?
Sauf stipulation expresse contraire insérée au bail commercial, les travaux de mise en sécurité prescrits par l’autorité administrative incombent au bailleur.
Dans un arrêt rendu le 19 octobre 2022, la Cour de cassation s’est prononcée sur l’obligation de délivrance du bailleur d’un établissement hôtelier.
Un propriétaire donne à bail commercial un immeuble destiné à l’exploitation d’un hôtel.
Des années plus tard, la commission de sécurité de la ville émet un avis défavorable à la poursuite de l’exploitation de l’établissement hôtelier. Elle notifie même au locataire un arrêté de fermeture administrative de l’établissement.
Le locataire assigne le bailleur en remboursement des loyers acquittés entre la fermeture administrative et la restitution des clefs.
La Cour d’appel de Bordeaux déboute le locataire de sa demande en remboursement des loyers payés postérieurement à la fermeture administrative de l’établissement hôtelier en retenant que les pièces produites par le locataire ne sont pas de nature à établir la responsabilité du bailleur.
Le locataire se pourvoit alors en cassation.
La Haute juridiction casse l’arrêt d’appel.
Elle rappelle, au visa de l’article 1710 du code civil, que le bailleur est obligé par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et d’entretenir cette chose en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée.
Elle relève que la Cour d’appel de Bordeaux a constaté que l’établissement hôtelier donné à bail a fait l’objet d’une fermeture administrative à raison de très graves anomalies de nature à mettre en danger la sécurité du public.
Or, selon la Cour de cassation, les travaux prescrits par l’autorité administrative sont, sauf stipulation expresse contraire, à la charge du bailleur.
La Cour d’appel de Bordeaux n’a donc pas donné de base légale à sa décision.
Observations :
i) D’une part, cet arrêt rappelle l’étendue de l’obligation de délivrance du bailleur d’un établissement hôtelier.
Le bailleur a l’obligation de délivrer un local conforme à sa destination d’hôtel, ce qui implique que le local réponde aux normes de sécurité des établissements recevant du public.
Le bailleur manque à son obligation de délivrance conforme dès lors que la commission de sécurité a émis un avis défavorable à la poursuite de l’activité d’hôtellerie et qu’il n’a pas réalisé les travaux préconisés (Cour d’appel de Paris, 27 juin 2012, n°11/09037).
La jurisprudence décide que les travaux de mise en conformité avec la réglementation, ordonnés par l’autorité administrative sont à la charge du bailleur :
- lors de l’entrée dans les lieux, sur le fondement de l’obligation de délivrance du bailleur prévue à l’alinéa 1 de l’article 1719 du Code civil, aux termes duquel le bailleur est tenu de mettre à la disposition de son locataire un bien conforme à sa destination contractuelle (Cour de cassation, 3ème chambre civile, 14 février 2012, n°11-10.243).
- en cours de bail, sur le fondement de l’obligation d’entretien du bailleur prévue à l’alinéa 2 de l’article 1719 du Code civil (Cour de cassation, 3ème chambre civile, 17 avril 1996, n°1996-001644).
Dans l’arrêt commenté relatif à une mise aux normes en cours de bail, la Cour de cassation se fonde sur les deux alinéas de l’article 1719.
ii) D’autre part, cet arrêt rappelle l’importance de bien négocier la clause du bail commercial relative aux travaux prescrits par l’autorité administrative.
La clause contractuelle ayant pour objet d’exonérer le bailleur de la charge des travaux prescrits par l’autorité administrative doit nécessairement être expresse (Cour de cassation, 3ème chambre civile, 1er juin 1999, n°1999-002278).
Les parties doivent veiller à exprimer leur commune intention de manière précise et claire. En effet, la clause prévoyant que le locataire doit se soumettre aux injonctions de la commission de sécurité ne suffit pas à exonérer le bailleur de son obligation de réaliser les travaux prescrits par l’autorité administrative (Cour de cassation, 3ème chambre civile, 1er décembre 2016, n°15-22.248).
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