Pourquoi la DGCCRF ne veut pas vous laisser regarder les matchs de l’ATALANTA BERGAME ?
Les téléspectateurs français de la chaine de télévision BEIN SPORTS ont eu la mauvaise surprise de ne pas pouvoir visionner le match phare de la SERIE A italienne opposant l’une des meilleures équipes de ces dernières saisons l’ATALANTA BERGAME à la légendaire JUVENTUS de TURIN. La raison fournie par BEIN SPORTS : elle a été contrainte à cette déprogrammation par injonction de la DGCCRF, et ne diffusera plus de matchs de l’ATALANTA avec son sponsor actuel. Explications :
Pour la DGCCRF, ledit sponsor, en l’occurrence la société Plus 500, dont le logo apparaît sur les maillots des joueurs, proposerait « des services d'investissement portant sur les contrats financiers risqués », ce qui serait prohibé par les dispositions du Code de la consommation.
Sponsoring visant à promouvoir des services d’investissement portant sur des contrats financiers risqués : publicité interdite
Pour rappel, la loi couramment désignée comme « Sapin II » a introduit l’article L533-12-7 dans le Code monétaire et financier qui interdit expressément la sollicitation directe ou indirecte, en ligne, de produits financiers, à destination de non professionnels, lorsque celle-ci présente une des caractéristiques suivantes :
- Le risque maximal n'est pas connu au moment de la souscription ;
- Le risque de perte est supérieur au montant de l'apport financier initial ;
- Le risque de perte rapporté aux avantages éventuels correspondants n'est pas raisonnablement compréhensible au regard de la nature particulière du contrat financier proposé.
Par ailleurs, l’article L222-16-1 du Code de la consommation est venu préciser que : « La publicité, directe ou indirecte, adressée par voie électronique à des clients susceptibles d'être non professionnels, notamment des clients potentiels, relative à la fourniture de services d'investissement portant sur les contrats financiers définis à l'article L. 533-12-7 du code monétaire et financier est interdite. »
Sponsoring en vue de promouvoir des services d’investissement portant sur des contrats financiers risqués : pratique commerciale trompeuse
Au-delà de ces textes venant prohiber la publicité pour les produits financiers considérés comme hautement spéculatifs et risqués, la promotion en ligne de ce type de service peut également être qualifiée de pratique commerciale trompeuse au sens de l’article L121-2 du Code de la consommation qui dispose « Une pratique commerciale est également trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l'entourent, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu'elle n'indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte. »
Sans avoir eu accès à la décision d’injonction en cause, ce sont certainement ces fondements qui ont été visés par la Répression des fraudes pour motiver sa décision d’injonction à l’encontre de BEIN SPORTS.
Les sanctions applicables en cas de publicité interdite
Au niveau des sanctions applicables, celles-ci peuvent s’avérer être assez lourdes et impactantes.
En effet, l’article L222-16-1 du Code de la consommation précité dispose :
« Est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 100 000 € :
1° Tout annonceur, à l'exception des prestataires de services d'investissement mentionnés au même article L. 533-12-7 et des conseillers en investissements financiers mentionnés à l'article L. 541-9-1 du même code, qui diffuse ou fait diffuser une publicité interdite en application du présent article ;
2° Tout intermédiaire réalisant, pour le compte d'un annonceur, une prestation ayant pour objet l'édition d'une publicité interdite en application du présent article ;
3° Tout prestataire qui fournit à un annonceur des services de conseil en plan média ou de préconisation de support d'espace publicitaire pour une publicité interdite en application du présent article ;
4° Tout acheteur d'espace publicitaire réalisant, pour le compte d'un annonceur, une prestation ayant pour objet la diffusion d'une publicité interdite en application du présent article ;
5° Tout vendeur d'espace publicitaire, en qualité de support ou de régie, réalisant une prestation ayant pour objet la diffusion d'une publicité interdite en application du présent article, sans préjudice des dispositions prévues au I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique ;
6° Toute personne diffusant une publicité interdite en application du présent article. »
Les sanctions applicables en cas de pratiques commerciales trompeuses
Les pratiques commerciales trompeuses sont-elles sanctionnées de deux ans d’emprisonnement et d’une amende pouvant aller jusqu’à 300 000 euros. Le montant de l’amende pouvant être porté, de manière proportionnée aux avantages tirés du délit, à 10% du chiffre d’affaires moyen annuel, calculé sur les trois derniers chiffres d’affaires annuels connus à la date des faits, ou à 50 % des dépenses engagées pour la réalisation de la publicité ou de la pratique constituant ce délit.
Une action concertée de la Répression des fraudes et de l’AMF, qui vise aussi les influenceurs
Cette injonction de la DGCCRF, qui peut toujours faire l’objet d’un recours, s’inscrit dans la volonté, très nettement affirmée, de la Répression des fraudes d’accentuer les contrôles, de concert avec l’Autorité des Marchés Financiers (AMF), sur les services financiers considérés à risques et visant un public non averti, parfois par l’emploi d’influenceurs qui sont également dans le collimateur de Bercy, comme nous l’avons déjà commenté.
Elle pourrait avoir des conséquences pour les protagonistes du football français, certains clubs, comme notamment celui de l’AS MONACO faisant apparaitre sur leur maillot un sponsor proposant des services similaires, alors que les téléspectateurs se trouveraient également impactés par de nouvelles déprogrammations qui modifieraient en substance l’abonnement auquel ils ont souscrit, sans parler des relations entre sponsors et clubs concernés qui se verraient certainement altérer, la rétrocession des droits TV étant une manne financière importante pour ces derniers.
Cette décision vient rappeler une nouvelle fois que les règles imposées par le Code de la consommation nécessitent d’être maitrisées, que ce soit au niveau du marketing, du sponsoring, et de publicité en règle générale, car l’impact financier, et réputationnel des sanctions applicables peut s’avérer être énorme.
Elle vient aussi souligner qu’un accompagnement lors des contrôles de la DGCCRF est essentiel, pour tenter d’endiguer la prise de ce type de décisions coercitives, et au fort impact réputationnel.
Guillaume Gouachon
Avocat Associé
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