Démarchage par courrier électronique, automate d’appel et télécopieur
jeudi 30 mars 2023

Démarchage par courrier électronique, automate d’appel et télécopieur

L’entrée en vigueur du nouveau régime juridique relatif au démarchage téléphonique est l’occasion de présenter les règles applicables au démarchage que les professionnels peuvent réaliser par courrier électronique, par automate d’appel ou encore par télécopieur. 


Le régime de la prospection directe au moyen d’un automate d’appel, d’un courrier électronique ou d’un télécopieur est régi, par renvoi de l’article L. 223-7 du Code de la Consommation à l’article L. 34-5 du Code des Postes et des Communications Electroniques (CPCE), qui dispose que : 

« Est interdite la prospection directe au moyen de système automatisé de communications électroniques au sens du 6° de l'article L. 32, d'un télécopieur ou de courriers électroniques utilisant les coordonnées d'une personne physique, abonné ou utilisateur, qui n'a pas exprimé préalablement son consentement à recevoir des prospections directes par ce moyen ».

Quatre conditions doivent donc être analysées pour apprécier la licéité de l’opération de démarchage opérée par le professionnel. 

1. La réalisation d’une « prospection directe »

La prospection directe se définit comme « l'envoi de tout message destiné à promouvoir, directement ou indirectement, des biens, des services ou l'image d'une personne vendant des biens ou fournissant des services ».

L’article L. 34-5 du CPCE inclut dans cette forme de sollicitation, les appels et messages qui ont pour objet d’inciter son destinataire, en retour à la prospection qui lui a été faite, à renvoyer un message surtaxé ou rappeler un numéro surtaxé. 

2. Le système de « communication électroniques […], d’un télécopieur ou de courriers électroniques »

La réglementation du démarchage s’applique dans l’hypothèse où la prospection directe est réalisée par un service de communication électronique (définit par l’article L. 32 6° CPCE) tel que les automates d’appel, les télécopieurs/fax ou encore par courrier électronique qui est une catégorie plus large que le simple courriel puisqu’il inclut tout message électronique tel que les SMS, MMS, … (Avis CNIL. 27 janvier 2000.n°00-009). 

3. L’utilisation des « coordonnées d’une personne physique »

Les règles susvisées sont applicables au démarchage réalisé via les données personnelles de personnes physiques, conformément à l’article premier du Règlement Général européen sur la Protection des Données1 (RGPD).  

Selon l’article 4 du RGPD, les données personnelles sont « toute information se rapportant à une personne physique identifiée ou identifiable […], directement ou indirectement, notamment par référence à un identifiant, tel qu'un nom, un numéro d'identification, des données de localisation, un identifiant en ligne, ou à un ou plusieurs éléments spécifiques propres à son identité physique, physiologique, génétique, psychique, économique, culturelle ou sociale ». 

Les données peuvent donc concerner un particulier, un non-professionnel ou un professionnel selon que les données permettent, directement ou indirectement, d’identifier ou de rendre indentifiable, une personne physique. 

En conséquence, les personnes morales sont exclues du champ d’application du présent régime juridique. Ainsi, le professionnel pourra utiliser leurs coordonnées professionnelles pour réaliser du démarchage sans que celles-ci n’aient autorisé au préalable une telle collecte et un tel traitement de leurs données.

4. L’expression préalable du consentement du destinataire du démarchage

i) La collecte des données personnelles

Toute collecte et tout traitement de données à caractère personnel implique le respect des règles édictées par le RGPD. 

L’article L.34-5 CPCE dispose que « on entend par consentement toute manifestation de volonté libre, spécifique et informée par laquelle une personne accepte que des données à caractère personnel la concernant soient utilisées à fin de prospection directe ».

Le démarchage par automate d’appel, fax ou courrier électronique ne peut donc être réalisé par un professionnel que si ce dernier a recueilli le consentement préalable, libre, spécifique, exprès et univoque de son destinataire. 

Le consentement doit être demandé explicitement à des fins de prospection commerciale dans le sens où le professionnel doit communiquer une information claire, transparente et loyale sur l’usage des données à des fins de prospection. 

La Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) précise à ce titre que l’acceptation de la personne dont les données personnelles sont recueillies ne peut pas, par exemple, se manifester par la simple acceptation de conditions générales d’utilisation. En effet, l’acceptation quant à la collecte et au traitement des données pour une telle finalité doit être libre. 

ii) Exceptions au recueil du consentement 

Deux exceptions permettent de ne pas recueillir le consentement de la personne physique conformément aux règles précitées. 

D’une part, le recueil du consentement ne sera pas obligatoire lorsque le démarchage par automate d’appel, courrier électronique ou télécopie ne revêt pas d’aspect commercial pour la promotion d’une produit ou d’un service. 

D’autre part, le professionnel est également exempté du recueil du consentement si la personne démarchée est déjà cliente du professionnel qui réalise la prospection et que cette prospection concerne des produits ou des services « analogues » déjà vendus par ce même professionnel. A ce titre, un produit ou service sera dit analogue s’il appartient à la même famille de produit. 

Cependant, la condition selon laquelle le professionnel a déjà vendu un produit ou service est strictement apprécié. Par exemple, la CNIL estime qu’un consommateur s’étant uniquement créé un compte sur un site de vente en ligne ne permet pas de conclure à la condition d’une vente préalable, même si elle est éventuelle, de telle sorte que la prospection qui serait réalisée sur la base des coordonnées de ce compte serait illicite.

Dans cette situation, le démarchage ne sera licite qu’à la double condition que le premier recueil des données ait été licitement mené par le professionnel et que le consommateur se soit vu offrir « la possibilité de s’opposer sans frais  à l'utilisation de ses coordonnées au moment où elles sont recueillies et chaque fois qu'un courrier électronique de prospection lui est adressé au cas où il n'aurait pas refusé d'emblée une telle exploitation ». 

5. Les conditions au démarchage par automate d’appel, courrier électronique ou télécopie

Outre les informations obligatoires instituées par le RGPD et par les dispositions susvisées du CPCE, le professionnel doit indiquer la finalité de la collecte et du recueil des données personnelles en vue d’un démarchage commercial. 

Le professionnel a également pour obligation de mentionner les « coordonnées valables auxquelles le destinataire puisse utilement transmettre une demande tendant à obtenir que ces communications cessent sans frais autres que ceux liés à la transmission de celle-ci ». Par exemple, un lien de déconnexion inséré dans un e-mail de démarchage permet de remplir cette condition. 

Enfin, le professionnel a pour obligation d’indiquer l’identité de la personne réalisant, ou pour le compte de laquelle est réalisée, l’opération de démarchage. En effet, l’article L. 34-5 du CPCE interdit de « dissimuler l'identité de la personne pour le compte de laquelle la communication est émise et de mentionner un objet sans rapport avec la prestation ou le service proposé ».

6. Les sanctions en cas de manquement aux obligations précitées

Le manquement au régime juridique présenté ci-dessus peut emporter d’importantes conséquences pour le professionnel qui y contrevient. 

Tout d’abord, la CNIL peut enjoindre un rappel à l’ordre, une mise en conformité des pratiques professionnelles ou encore, suspendre temporairement le traitement ou le flux des données. Au surplus desdites sanctions, la CNIL peut prononcer une amende administrative dont les montants peuvent être conséquents. 

A titre illustratif, le producteur et fournisseur d’énergie TOTAL ENERGIES ELECTRICITE ET GAZ a été sanctionné par la CNIL à une amende d’un million d’euros pour n’avoir mis aucun moyen à disposition des utilisateurs pour s’opposer à la prospection commerciale et pour ne pas avoir communiquer des informations claires et précises sur les droits des utilisateurs quant à leurs données personnelles, et ce notamment leur droit d’accès et leur doit d’opposition. 

Les manquements au régime juridique présenté peuvent également être constatés par les agents de la Direction Régionale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF). Outre les injonctions de mise en conformité, les agents peuvent également sanctionner les professionnels à une amende dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale.

Une sanction pécuniaire peut également être prononcée par l’Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes (ARCEP). La sanction de l’ARCEP est même « prioritaire » face à la sanction de la DGCCRF.  

En effet, si l’ARCEP a déjà prononcé une sanction avant la DGCCRF, cette dernière ne pourra plus condamner le professionnel à une sanction financière alors que l’inverse est admis. 

Si la DGCCRF a prononcé une sanction avant l’ARCEP, cette dernière pourra quand même prononcer une sanction financière en plus. Toutefois, l’ARCEP devra veiller à ce que la sanction prononcée, cumulée avec celle de la DGCCRF, ne dépasse pas « le maximum légal le plus élevé » c’est-à-dire 3% du chiffre d’affaires hors taxes du dernier exercice clos du professionnel, ou 5% en cas de récidive. 


Le cabinet GOUACHE Avocats vous accompagne dans la mise en conformité de vos activités de démarchage ou pour tout éventuel contrôle ou litige survenu quant à vos pratiques. 


Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données).

 

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